PALESTINE
Intégrale

Alors qu’il était étudiant en journalisme, Joe Sacco avait décodé que toute l’information que lui livraient les media auxquels il avait accès à propos des problèmes entre Israéliens et Palestiniens était passée au tamis pro-israélien. Pas étonnant, en avait-il conclu, puisque les Etats-Unis où il faisait ses études étaient les premiers alliés d’Israël ; et que des impôts que les Américains payaient allaient directement dans les caisses du gouvernement dont Yitzhak Shamir était alors le premier ministre !

N’aimant ni cette idée que son argent aille renflouer les caisses d’un état qui foule du pied les droits de l’Homme en ne respectant pas ceux les plus élémentaires des Palestiniens, ni cette idée que l’information dont il disposait puisse n’être pas complète et donc pas objective, Joe Sacco s’est alors décidé à voyager en Palestine, voulant se faire sa propre opinion, et pourquoi pas se faire la voix de ceux que le monde n’entendait pas.

Joe Sacco est parti pour la première fois en Palestine lors de l’hiver 1991-1992, et il a mis son séjour à profit pour réaliser une série qui allait faire référence en termes de BD-journalisme. Parue aux Etats-Unis en 9 parties, cette série allait en Europe être déclinée en un diptyque (pour la version francophone) avant de reparaître sous la forme d’une intégrale dont cette fiche se fait l’écho.
 

Par sylvestre, le 20 mars 2010

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Notre avis sur PALESTINE # – Intégrale

Avant que la place soit laissée à la bande dessinée Palestine, une préface signée par Edward Said s’offre comme première lecture. Edward Said est un Américain d’origine palestinienne, et ses écrits ont orienté la démarche artistique et professionnelle de Joe Sacco après l’avoir interpellé, l’emmenant au-delà de l’empathie qu’il a développée pour le peuple palestinien en le poussant à œuvrer pour leur mémoire et pour leur honneur ; pour eux, êtres humains.

A cette préface succède un cahier écrit par l’auteur dans lequel il revient sur la genèse de cette série et sur ses méthodes de travail.

Ensuite, c’est Palestine… Au départ prévue en 6 volets pour finalement en totaliser 9, cette série de Joe Sacco est d’abord parue aux Etats-Unis aux éditions Fantagraphics. Publiée par contre en 2 tomes en version française chez Vertige Graphic (puis rééditée), elle existe depuis janvier 2010 en intégrale aux éditions Rackham qui ont soigné sa présentation en lui réservant une couverture toilée imprimée très classe !

Cette intégrale est parue en même temps que sortait, aux éditions Futuropolis, une autre œuvre, inédite, relative au même conflit israélo-palestinien et signée par le même auteur : Gaza 1956. Une bonne stratégie éditoriale pour que viennent à Palestine les lecteurs qui ne connaissaient pas le travail de l’auteur et qui l’ont découvert avec ce Gaza 1956, d’autant que chacun des deux ouvrages peut être considéré comme un complément indépendant de l’autre.

Avec Palestine, on découvrait un style de narration et d’implication dont l’auteur ne se défera plus : Joe Sacco n’aime pas parler de ce qu’il n’a pas pu vérifier par lui-même. Il va chercher l’info et les témoignages. Et lorsqu’il n’a pas vu des lieux qu’il veut ensuite dessiner, comme par exemple l’intérieur d’une prison, il recoupe auparavant plans et schémas qu’il réussit à se faire dessiner par ceux qu’il interroge. Car le dialogue est primordial dans son travail. C’est pourquoi il se met souvent en scène, mais ce n’est jamais au détriment du sujet qu’il traite. Sa présence devient un repère, un élément qui humanise l’info qu’il transmet. Elle permet aussi, le cas échéant, d’inviter l’humour là où le drame trône.

Avec Palestine, on découvrait aussi un style graphique, un excellent dessin en noir et blanc à cheval entre semi-réalisme de cartoon et pointilleux réalisme. Les visages appartiennent souvent au premier groupe (bien que Joe Sacco n’ait aucune intention de moquer qui que ce soit !), et les décors au second.

L’intérêt du sujet fait le reste. Avec une analyse et un dessin de qualité, l’auteur nous dissèque des facettes de la politique d’Israël et de ses conséquences sur le peuple palestinien comme on n’en entend jamais trop parler ailleurs. Assassinats, humiliations, destructions, saccages, arrestations arbitraires, tortures et régimes de détention inhumain… C’est le vif du sujet. C’est aussi le quotidien des Palestiniens… Depuis des dizaines et des dizaines d’années.

Des faits malheureusement toujours d’actualité. Une bande dessinée donc toujours aussi utile.
 

Par Sylvestre, le 20 mars 2010

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