Petit traité d'humanisme à la française

Le lundi 28 mars 1757, sur la Place de Grève, avait été programmée l’exécution publique du régicide Damiens. En effet, 23 jours auparavant, ce dernier avait attenté à la vie de son souverain, le blessant avec un couteau.

Nombreux furent les curieux à assister au spectacle. Des petites gens, des nobles… Tous en eurent pour leur argent, car le supplice dura très… trop longtemps ! En effet, c’est un bourreau nommé Sanson qui officiait ce jour-là et son manque d’expérience en la matière ressembla fort, aux yeux de beaucoup, à de l’incompétence. La lenteur avec laquelle Damiens passa l’arme à gauche en fit d’ailleurs presque un héros pour ceux qui voyaient en lui "celui qui avait osé" et ressembla, pour les fidèles de la couronne, à une bonne leçon donnée à ceux qui pourraient être à leur tour tentés de vouloir nuire à leur roi…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

Notre avis sur Petit traité d’humanisme à la française

On dit parfois qu’on aimerait être une mouche, pour pouvoir aller regarder ou écouter ce qui se passe ici ou là. Et bien ce lundi 28 mars 1757, il devait y en avoir, des mouches, tant le sang coula ! Jugez-en par vous-même : après la torture par le soufre, les amputations et l’écartèlement, ce n’est que sur le bûcher que le régicide Damiens poussa son dernier souffle ! Aïe ! Quelles douleurs !!! Quant aux curieux (comme nous), il y en avait moult également !

Avec ces Hautes Oeuvres, Simon Hureau nous invite à une leçon d’histoire authentique doublée d’une bonne tranche de rigolade. "Apprendre autrement", comme qui dirait !!! Et s’il réussit autant à captiver le lecteur, c’est parce que sa narration est excellente, parce qu’elle est multiple. Le bourreau Sanson nous relate par exemple sa version des faits en racontant, après que l’exécution ait été menée à terme, son éprouvante journée à une parente. Mais c’est aussi en suivant la conversation entre Eliacin et Aline, spectateurs dans la foule, qu’on va avoir un autre point de vue, le leur. Ces deux-là se plaisant l’un l’autre, ils vont enchaîner le spectacle avec une petite partie de jambes en l’air, après quoi ils vont croiser des marchandes de babioles qui seront à leur tour nos guides en étant notre ticket pour monter dans les étages d’un bâtiment ayant ses fenêtres donnant sur la Place de Grève, occupé par des gens de la haute. Ainsi, c’est un traveling constant qui nous fait aller de personnages à d’autres et qui nous fait de cette manière cocasse nous intéresser à ce supplice sans fin que subit Damiens !

Les autres atouts de cette bande dessinée sont le dessin, qui, en noir et blanc, partage équitablement les planches avec les textes qui sont eux, pour diverses raisons, très humoristiques. Parfois parce que très modernes ("Etre bourreau, c’est ringard !"), parfois parce qu’au contraire c’est un français châtié qui est employé, contrastant avec le drame qui se joue ("Vous oubliâtes une cuisse !") ou encore par des petits jeux de mots bien trouvés ("Ma foi, à une lettre près…" – Là, hors contexte et sans avoir lu Hautes Oeuvres, vous ne pourrez pas savoir de quoi il s’agit, héhé !)

Mais bon, en un mot, c’est complet, intéressant, génial !

En outre, une strate narrative supplémentaire a été ajoutée en la personne de Limul Goma, un collectionneur atypique concerné à son niveau par cet événement qu’on aura suivi tout au long de la BD et, qui plus est, se fait le porte-parole de son auteur en nous touchant mot de sa biographie et de son éditeur en n’omettant pas de nous rafraîchir la mémoire sur les autres excellents titres parus récemment (ou à paraître) aux éditions La Boîte à Bulles.

Hautes Oeuvres, un coup de coeur… et tout ça grâce à un coup de couteau ! A découvrir absolument !!!
 

Par Sylvestre, le 13 mai 2008

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