PIERRES ROUGES (LES)
Ombres au tableau

En novembre 1932, dans le pays provençal, le jeune Ismaël essaye de survivre au décès de sa mère. Buveur invétéré et violent, son père ne ménage pas ses emportements vis-à-vis de l’adolescent qui, après avoir assisté aux funérailles, prend le parti de fuir définitivement la maison familiale. La mort dans l’âme, Ismaël parcourt la campagne jusqu’à tomber sur Antonin avec lequel il passe deux années apaisées. A la suite d’un accident de moissonneuse dans lequel Antonin perd la vie, le jeune garçon, une fois de plus dépité, s’enfuit à nouveau. Après un long moment d’errance, il finit par échouer sur le seuil d’une petite maison isolée habitée par une très vieille femme qui, étrangement, le reconnait. Surpris par cette réaction inattendue, Ismaël fuit une nouvelle fois pour enfin être recueilli dans une grande bâtisse en pierres rouges, fréquentée depuis peu par Esther, une jeune fille qui a décidé faire un retour aux sources et découvrir l’héritage de ces aïeuls. Leur rencontre plutôt houleuse est-elle réellement le fait du hasard ou leurs destinées sont-elles liées ?

Par phibes, le 21 octobre 2014

Publicité

Notre avis sur PIERRES ROUGES (LES) #1 – Ombres au tableau

A peine a-t-il clôturé son remarquable diptyque La porte au ciel que Pierre Makyo revient dans le paysage du 9ème art, cette fois-ci en solo, pour se lancer, sous l’égide de la maison Delcourt, dans une nouvelle histoire qui fleure le drame provençal d’avant-guerre.

A l’instar du personnage qui apparaît sur le premier de couverture, le lecteur ne pourra résister de jeter un œil sur cet ouvrage porté par l’initiateur de nombre de récits à succès à commencer par la grande saga Ballade au bout du monde. Ici, le lecteur est appelé à pénétrer dans une équipée campagnarde tragique, sombre et douloureuse, parsemée de mort, de fuite en avant et également de mystère. A la faveur de ce premier tome, Pierre Makyo, de son verbe poétique et humaniste, plante le décor et nous présente, via un déroulement parallèle, ses deux personnages clés, perdus dans leur histoire personnelle et appelés à se croiser. Le parcours d’Ismaël est des plus poignants, celui d’Esther assez intrigant, la conjonction des deux étant l’occasion de faire naître une énigme surprenante qui devrait assurément être explicitée dans le prochain opus.

Comme à son habitude, Pierre Makyo signe ici un volet qui vaut par sa vision humaine, servie dans une fluidité suffisante pour bien appréhender les deux destinées. A cet égard, la narration via la voix-off a son importance et cerne avec une certaine efficacité les protagonistes et leurs déboires (en particulier Ismaël sur qui le sort semble s’acharner, le poussant à fuir à plusieurs reprises). Esther, pour l’instant reste un peu en retrait et n’apporte que peu de réponses quant à son arrivée dans la maison familiale et son intérêt pour Ismaël.

Très bon conteur d’histoires, Pierre Makyo sait se révéler également dans le dessin. Ici, l’artiste nous livre un tableau à main levée bien agréable, qui dégage une certaine noirceur ambiante. L’épaisseur de son trait y est assurément pour quelque chose, renforcé implicitement par les larges aplats de noir et la colorisation d’Antoine Quaresma souvent sombre. Il ne fait aucun doute que les décors provençaux d’antan qu’il met en avant sont des plus généreux, de nuit comme sous la pluie. Les personnages, quant à eux, sont bien inspirés et sont pour le moins convaincants dans leurs expressions.

Un démarrage dramatique intrigant et mystérieux signé par un Pierre Makyo toujours en forme qui donne envie, au regard du rebondissement de la fin, de voir plus loin.

Par Phibes, le 21 octobre 2014

Publicité