Pillages

Face aux braconniers de la mer, l’ONG Sea Shepherd tente de lutter pour préserver les ressources halieutiques, quitte à employer des méthodes musclées. Les petits pêcheurs et les équipages souvent exploités de ces bateaux qui pratiquent une pêche illégale sont aussi les victimes de ces pratiques.

Par v-degache, le 16 mai 2024

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Notre avis sur Pillages

Pillages est un ouvrage militant retraçant l’action de l’ONG Sea Shepherd contre la pêche illégale. Scénarisé par Maxime de Lisle, qui a officié comme Commandant en second sur un navire de l’association lors de plusieurs missions, on suit un équipage opérer dans le Golfe de Guinée, tentant de stopper les bateaux enfreignant les lois, mais devant aussi faire face aux risques de piraterie omniprésents dans cette zone.

Des poissons de plus en plus rares pour les petits pêcheurs locaux

Le récit entrecroise l’engagement de ces hommes et femmes avec le destin de Marius, petit pêcheur autochtone, tentant de survivre et de subvenir aux besoins de sa famille, alors que les ressources halieutiques se raréfient, et ceux des équipages souvent exploités par les armateurs. Les liens de causalité entre la surpêche et ses conséquences sur la population locale sont ainsi abordés, et permettent de donner une vision plus large à ces problématiques environnementales.

Le scénario se focalise néanmoins davantage sur l’action de Sea Shepherd, et le lecteur se retrouve un membre à part de l’équipage. Des planches spectaculaires nous font suivre les méthodes musclées de l’ONG : abordage des navires enfreignant les règles, mode de défense face aux tentatives d’arraisonnement des pirates, pressions exercées sur les équipages afin qu’ils stoppent la pêche en cours, l’ensemble donnant une narration rythmée et pas mal d’action sur les 117 pages ! On pense immédiatement aux campagnes médiatiques et elles aussi spectaculaires de Greenpeace, le fondateur de Sea Shepherd, Paul Watson, étant lui-même un ancien militant de l’organisation de protection de l’environnement.

Le MY Bob Barker, navire de l’ONG Sea Shepherd, à Wellington, en 2014, et mis en retraite de la flotte en 2022. Il a servi de modèle à l’aboyeur de la BD (à droite). (©Pseudopanax)

Le dessin à l’aquarelle de Renan Coquin (Le sourire d’Auschwitz) est particulièrement appréciable sur les scènes marines et aquatiques. Il apporte réalisme et mouvement au récit, et c’est un plaisir de naviguer avec le Breton !

Le docu-fiction est à la gloire de l’ONG, et évite ainsi les critiques et controverses pesant sur Sea Shepherd concernant les méthodes coup de poing employées pour lutter contre les braconniers, que certains qualifient même d’écoterroristes. En 2012, dans un article de Mediapart, le photographe de Greenpeace, Pierre Gleizes, avait affirmé que l’on ne pouvait « pas répondre à la violence que l’homme inflige au monde animal par une nouvelle forme de violence faite aux hommes » (https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/220612/haines-et-baleines). Même si le débat n’est pas lancé dans la BD, quelques actions de l’ONG y sont montrées, et le lecteur pourra ainsi se faire sa propre opinion.

Drapeau de Sea Shepherd : trident de Neptune, crosse de berger, et crâne sur lequel s’inscrivent un dauphin et une baleine.

A droite : scène d’arraisonnage d’un bateau pêchant illégalement.

Prenant, didactique et engagé, Pillages soulève des enjeux vitaux pour nos mers, mais aussi pour les milliers de petits pêcheurs qui en vivent, et voient leur quotidien bouleversé par la raréfaction des poissons. C’est passionnant et joliment dessiné !

Par V. DEGACHE, le 16 mai 2024

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