PSYCHO-INVESTIGATEUR
Psycho Investigateur

Erwan Courbier : Toute l’histoire tourne autour de Simon Radius, personnage principal et héros de la BD. C’est un psy qui a développé un pouvoir étonnant : il est capable d’entrer physiquement dans les souvenirs de ses patients, et de les modifier. Cela lui permet également d’être le témoin des souvenirs des visités, y compris de ce dont ils ne se souviennent pas consciemment. Avec cette aptitude, il soigne naturellement ses patients, mais peut également apporter son concours sur des enquêtes criminelles : il peut découvrir des faits que personne ne connaît, ou bien trouver des indices qui ont disparu…

Extrait de notre interview de 2005

Simon Radius doit donc enquêter sur les motivations et autres mobiles qui peuvent avoir poussé ou non des tueurs à assassiner leurs victimes. Mais ce qu’il découvre n’est pas forcément pour plaire à tout le monde. La police est sceptique, les tribunaux ont du mal à lui reconnaître une vraie légitimité et ses confrères se moquent de lui… En plus de tout ça, la femme de Simon a disparut mystérieusement depuis deux ans, il a du mal à s’y faire et tente de chercher dans ses propres souvenirs les indices qui pourraient lui indiquer la vérité sur cette disparition… A un moment donné il remarque une adresse sur une enveloppe qu’elle glisse dans son sac… Serait-ce là une piste à suivre ? Et est-il prêt à assumer tout ce qu’il découvrira ?
Avec Simon nous entrons dans les méandres de la mémoire…

Par fredgri, le 20 juillet 2013

Notre avis sur PSYCHO-INVESTIGATEUR #Intégrale 1 à 3 – Psycho Investigateur

Avec cet album, on entre dans un univers très particulier ! Un héros plutôt atypique qui pratique une science complètement marginale, qui enquête sur des histoires à priori inextricables, qui n’a pas vraiment de preuves matérielles de ce qu’il avance, mais qui arrive à déceler le moindre élément qui peut permettre de démêler ces sacs de nœuds qui trompent tout les autres !

Ce genre d’intrigue n’est certes pas forcément nouvelle, me direz vous, peut-être, mais ce qui l’est c’est le traitement, la forme même donnée à ce récit, autour de ce personnage principal, de sa technique d’investigation.
Le véritable intérêt réside donc dans sa capacité à voyager dans les souvenirs, à la recherche des portes qui peuvent s’ouvrir sur des faits marquants pour ensuite les décortiquer et tenter d’y trouver des indices, plus que dans l’enquête elle-même !

Mise à part cette séquence avec le voisin parano, certainement l’une des plus curieuses de l’album, ainsi que quelques flash par-ci par-là, les visions de Simon ne sont pour autant pas vraiment "affectées" par les visions subjectives de leur propriétaire qu’il traverse ! Néanmoins le propos est vraiment intéressant et profondément original. La perspective de ces voyages mnémoniques, de ces facettes qui s’ouvrent devant l’investigateur, lui offrant même la possibilité d’intervenir en amont, de travailler sur les sources même des psychoses qu’il découvre est tout simplement fascinante de richesses et de possibilités !
L’écriture à quatre mains est très bien équilibrée, très expressive et, vraiment, c’est passionnant du début à la fin ! De plus, tout semble extrêmement documenté ou en tout cas très cohérent. Le processus d’investigation de Simon se déroule avec une fluidité très didactique, il nous décrit sa façon de rebondir sur ses trouvailles, d’interpréter ce qu’il voit en fonction du vécu des uns et des autres, il décortique ses pistes en nous expliquant ce qu’il comprend et ce que cela signifie. Et même si parfois cela peut-être quelque peu complexe (le dernier chapitre avec Simon qui cherche dans ses propres souvenirs, il faut s’accrocher !) tout est finalement très clairement exposé et captivant !

Ce Simon Radius ne se contente donc plus d’avoir des aveux ni même d’une vague mémoire, non il creuse, reconstitue les puzzles, allant jusqu’à intervenir sur la matière même du souvenir pour porter secours et tenter de trouver une solution. La forme profonde de ces enquêtes perd donc de son statut culpabilisant pour entrer dans une phase reconstructive, pour trouver des solutions. Et c’est là que cet album et son héros sont atypiques. Progressivement le héros se nourrit de ces connaissances, il mène en parallèle sa recherche sur ses souvenirs liés à sa femme, une affaire intime qui le transforme, qui influe sur sa vie, sur son travail pour de plus en plus prendre énormément de place. Le héros n’est donc pas seulement un vecteur pour ces enquêtes, il en devient l’une des matières premières !

Certes, on est encore dans le schéma, malgré tout relativement classique, d’enquêtes, d’un détective, d’une série d’indices et d’une résolution, mais comme on touche à des domaines assez particuliers qui ouvrent sur d’autres voies encore peu explorées, très vite ce cadre explose pour nous entraîner dans les méandres des souvenirs refoulés, dans une narration très impressionnante !

Mais bien plus que ce formidable concept ce qui m’a le plus marqué, c’est le graphisme de Benoît Dahan, lui aussi particulièrement expressif, très typé, il rappelle d’autres styles plus underground. Aucun personnage ne se ressemble, les mondes subjectifs traversés sont eux aussi très distincts les uns des autres, il se dégage une atmosphère de l’ensemble que je trouve très séduisante !

On avait eu le plaisir de découvrir le premier tome dans la collection "Trilogies" d’Emmanuel Proust, en 2005. Nous avions, ici sur Sceneario, pu interviewer les auteurs à l’occasion de cette sortie et depuis la série semblait n’avoir pas eu de seconde chance. Quel incroyable plaisir donc de découvrir cet album chez Physalis, qui reprend donc intégralement le premier album en complétant l’histoire avec les deux albums préalablement prévus chez EP éditions. Ainsi de 46 pages on passe à 144 pages, pour 17,90€ , avec une couverture spéciale présentant une ouverture en forme de pièce de puzzle laissant entrevoir le héros !
On croise les doigts pour que cela donne d’autres idées d’aventure pour ce personnage hors du commun !

En tout cas s’il y a un album à ne pas louper c’est bien celui là. Un scénario particulièrement adroit allié à un dessin d’une grande virtuosité (il suffit d’admirer les jeux formels de Benoit Dahan, cette façon de gérer les blancs de la page, de jouer avec le cadre, les bulles etc. C’est époustouflant !)

De la très très grande bande dessinée !

Par FredGri, le 20 juillet 2013

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