PUBLIC DOMAIN
Tome 1

Chip Zdarsky est certainement l’un des auteurs les plus en vogue du moment. Il scénarise Batman et Daredevil, on le retrouve deçi delà, au cœur de l’actualité et il anime seule cette série assez discrète, malgré les sujets qu’elle aborde qui concernent très frontalement l’industrie des comics et son éternel rapport aux créateurs…

Derrière le portrait de ce dessinateur floué par son co-créateur et par son éditeur on peut reconnaître pas mal de grands noms de l’industrie, comme Kirby, mais surtout Bill Finger, qui créa Batman avec Bob Kane… Aujourd’hui, on le sait tous, les gros éditeurs n’ont jamais été très tendres avec leur créateurs qui ont souvent du se battre pour être reconnus comme ceux qui ont initié les plus belles idées sur lesquelles se sont ensuite battis des empires financiers juteux qui ont fait la fortune des éditeurs.

Avec Public Domain, Zdarsky ranime l’un des débats les plus houleux de l’industrie, la reconnaissance à la fois intellectuelle et artistique de toutes ces créations et la juste rémunération des artistes. Mais il soulève aussi une autre réalité propre à ces métiers de l’ombre, l’assentiment passif de tous ces "ouvriers" qui ne voulaient pas faire de vague, de peur de perdre leur emploi, acceptant finalement que tout reste tel quel.
Syd Dallas est un dessinateur qui a posé les bases du personnage de The Domain, il a créé les costume et participé aux idées. Il a accepté sa progressive mise à l’écart au profit de son scénariste, puis la récupération totale de l’éditeur qui a ensuite joué la carte du marchandising à outrance sans rien verser à Syd. Quand il découvre l’existence d’un contrat stipulant qu’il est le propriétaire légitime de la licence, les choses changent. Ses enfants voient là la possibilité qu’enfin le travail de leur père soit reconnu, une revanche sur une industrie de l’oubli, de l’assimilation forcée.

Étant donné sa position privilégiée dans les comics, auprès de ceux qu’on appelle les "Big Two" (Marvel et DC), le scénario de Zdarsky apparait vite comme un pied de nez d’un incroyable cynisme, surtout quand il met dans la bouche de ses personnage une critique sans ambiguïté de l’évolution violente et sombre des vieux personnages… Ne scénarise-t il pas justement Batman ? Et c’est en ça que c’est intéressant, une vision sans compromis et complètement assumée d’un médium qui ne fait pas dans la dentelle.
L’écriture est vraiment fine, avec de vrais portraits très bien caractérisés.

Certainement l’une de meilleures sorties comics du moment !

Très conseillé !

Par FredGri, le 21 avril 2023