Quand souffle le vent

En plein pays minier, les mauvaises conditions de travail de ce début de siècle attisent la colère de ceux qui vont quotidiennement dans le trou. C’est dans ce climat social très tendu, entretenu par André Mortier, le responsable de la mine, que débarque dans le coron une troupe de tsiganes. Cette arrivée qui n’est pas au goût de bien des personnes, le maire en premier, va être l’occasion de faire ressurgir des fantômes d’un passé qu’une partie de la petite communauté minière avait tenté d’oublier. De la rencontre de Kheshalya, la sémillante bohémienne, et d’Antoine, le jeune mineur, va germer l’incroyable vérité.

Par phibes, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Quand souffle le vent

Sans contestation possible, la collection "Long courrier" de chez Dargaud, est un gage de haute qualité scénaristique et picturale. Forte d’un vivier pluraliste d’une trentaine d’albums, elle peut se targuer de publier les travaux d’auteurs de très grands talents. "Quand souffle le vent" confirme haut la main cette constatation.

En ce one-shot, Laurent Galandon nous expose un récit fort dans son contexte. Il dresse un état des lieux alarmant d’une petite communauté minière du nord de la France du début du 20ème, marquée par la vanité et le manque d’humanité d’un responsable minier et grevée d’un passé mystérieux jusqu’à présent dissimulé. L’arrivée inopportune d’une troupe tsigane va faire remonter à la surface les remugles de faits tragiques que tous auraient souhaité voir enfouis au plus profond de la terre.

Finement menées par celui qui est également à l’origine des séries "Gémélos" et "L’envolée sauvage", ces péripéties minières développent une intrigue bien prenante. Pour cela, Laurent Galandon a choisi les épaules d’Antoine et de Kheshalya pour pouvoir la porter à son terme. Ces deux personnages, enferrés chacun dans un carcan culturel différent, éveillent par leur rencontre de nombreux sentiments (neutralité, insouciance, profit de l’instant présent, jeunesse, amour…). Par ailleurs, à l’ombre des deux jeunes, d’autres personnages au passé énigmatique commun se tapissent tels le vieux Mortier, Louis et une bonne partie de la communauté minière.

On ne pourra que se laisser entraîner par le souffle scénaristique qui dans une progression bien maîtrisée, enfle au rythme des aveux disséminés, jusqu’à prendre tout son ampleur à la divulgation de la vérité. S’il subsiste une once de fantastique, le sujet est traité avec une certaine humanité et dénonce avec vigueur la folie des hommes.

L’univers minier vu par Cyril Bonin est d’une authenticité frappante. L’insécurité de ces forçats des galeries souterraines y est palpable. Son trait atypique qui n’a cessé d’évoluer favorablement et que l’on peut apprécier également dans la série "Fog" ou dans le premier volume de "Quintett", est d’une grande finesse, très détaillé et parfois légèrement disproportionné au niveau de certains personnages. La beauté de Kheshalya au travers de son regard mutin est fondante et retranscrit avec pudeur la culture tsigane.

"Quand souffle le vent" est un très grand moment de lecture que je conseille vivement pour sa façon d’aborder, dans un contexte social difficile, des fait tragiques avec bonté et rigueur artistique.
 

Par Phibes, le 21 mars 2009

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