Rappelle-toi ces belles années

Julien Langlais, issu de l’Académie de Bande dessinée Delcourt, signe avec Rappelle-toi ces belles années son premier album, pour lequel il assure scénario, dessin et couleurs !

Célestin est mobilisé sur le front lors de la Première Guerre Mondiale, et doit laisser sa femme Mathilde à l’arrière. Le récit va se concentrer sur les souffrances psychologiques et physiques endurées par celui qui est mari, mais également père. Pas d’héroïsme forcené dépeint par l’auteur, juste l’horreur des tranchées et les traumatismes qu’elles entrainent sur les combattants.

Projet risqué de traiter une nouvelle fois une période omniprésente dans le 9^ème Art, encore plus depuis les célébrations du Centenaire de la Grande guerre et les multiples publications qu’elles ont engendrées ! Julien Langlais choisit d’éclater son récit, navigant entre les différentes périodes de combat, les permissions, les blessures et hospitalisations, instaurant ainsi une ambiance particulière, entre front et arrière, qui perd peu à peu le lecteur dans les méandres de la pensée de Célestin.

Mobilisant les mécanismes de déshumanisation et de brutalisation du combattant, tout en les nuançant à travers ces poilus lambdas qui sont loin de se transformer en machine à tuer, l’auteur livre une histoire intimiste dans laquelle la modernité du conflit bouleverse toute une société touchée par la mort et le retour des mutilés et gueules cassées.

Rappelle-toi ces belles années vous surprendra probablement, bousculera vos habitudes de linéarité scénaristique, vous perdra peut-être aussi à certains moments, tout comme Célestin divague, rongé par ses tourments. Mais vous serez peut-être vite tenté par une relecture pour replonger dans la tête et l’esprit torturé de Célestin.

Le dessin réaliste de J. Langlais, son travail sur l’encrage et la colorisation, sont une réussite, et participent à adhérer pleinement à l’histoire. Ne vous laissez pas rebuter par une problématique déjà abordée et lue à maintes reprises, tentez l’expérience Rappelle-toi ces belles années et toute l’humanité et la souffrance qui se dégagent de cette BD !

Par V. DEGACHE, le 23 mai 2023