Reload

Ils étaient quatre dans leur groupe, et malgré un prix qu’ils avaient remporté, des disputes ont fini par éclater entre eux jusqu’à ce que l’un quitte la formation, laissant les trois autres face à eux-mêmes… Depuis, Jia et ses deux amies Meng et Minette essayent de se motiver à nouveau pour faire redémarrer le groupe, mais ce n’est pas facile, d’autant qu’à côté de cela, il faut trouver du boulot pour vivre…

Et puis un jour, la chance frappe à la porte de Jia : il lui est proposé d’intégrer le groupe alors en vogue : Fresh Oxygen. Le dilemme est fort : Jia peut-il laisser en plan son groupe, ses amis, et partir sans eux sur le chemin de la gloire ?
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Reload

Cette histoire aurait pu être la banale histoire d’un groupe de jeunes aspirant à vivre de sa musique, mais c’est au final plus que ça. D’abord parce que dans le récit, un certain niveau de rêve est atteint lorsque Jia se voit proposer d’intégrer la formation Fresh Oxygen. Ensuite, parce que Reload, en plus d’être une simple histoire, est un clin d’œil, un hommage, à un ami de l’auteur, Gao Jin, un musicien qui a largement inspiré cette bande dessinée.

Derrière sa belle couverture à rabats et son logo de titre dont certaines des lettres ressemblent à des notes de musique, cette BD Reload nous fait découvrir un énorme travail graphique, comparable, dans le style, à celui de Benjamin mais laissant toutefois plus la place aux rendus manuels. Ingénieux mélanges de photos, de dessins, de saturations de couleurs et d’effets spéciaux, mise en page calculée, aussi, comme avec ces pleines-pages traduisant en images ce qu’entend une oreille qui écoute de la musique ou comme ces visuels sur lesquels il faut s’attarder pour en discerner les différentes composantes imbriquées… Très moderne, très "informatisé", cet album est à l’image de la jeune Chine qui veut percer.

Au niveau de l’histoire, on a surtout affaire au trio Jia / Meng / Minette même si d’autres personnages secondaires entrent en jeu. Aux dires de l’auteur, Minette serait le personnage principal. Il apparaît pourtant que c’est plutôt Jia qui tient la vedette. A travers ces trois-là, on a en tout cas une certaine vision d’une frange de la jeune société chinoise : ces jeunes sont en recherche de boulot mais se payent toutefois le luxe de parier sur un avenir meilleur en s’attachant à leurs rêves… Ce qui immanquablement fait basculer la narration dans la philosophie, très présente dans l’ambiance, dans les questions posées mais aussi dans les pages introduisant les différents chapitres. (Cet aspect philosophique cite notamment Freud, mais il n’est pas le seul européen à qui est fait un clin d’œil… Ainsi, on reconnaîtra par exemple en page 22 une nette référence au "Cri" du peintre Munch)

Enfin, à propos de cri, à côté de celui qu’a poussé Jia et qui l’a propulsé au sommet, il y a une interrogation très importante dans cette histoire lorsque le jeune homme quitte la scène. Bien qu’il ait atteint son objectif, il semble ne pas s’en satisfaire, à la stupéfaction de son public à qui il passe le relais. L’Homme est-il un éternel insatiable, ce qui serait négatif, ou au contraire l’amitié triomphe-t-elle et voit redescendre Jia auprès de ses amies ? A méditer…

Cette histoire se basant sur des personnes et des expériences réelles, on a parfois l’impression en regardant évoluer les protagonistes que le dessinateur Sang Yong leur fait vivre ce qui lui-même vit. Ainsi, au sujet de cet enfermement que peuvent s’imposer manhuagas et artistes en studio, on observe que Jia, Meng et Minette apprécient fortement les rares sorties qu’ils s’accordent, leur liberté, en en parlant comme de grands bols d’air… alors qu’ils sont dans Pékin !

Côté bonus, les éditions Xiao Pan gâtent le lecteur ! On évoquera avant tout le CD inséré dans le livre, comprenant deux titres assez sirupeux mais qui offrent l’occasion d’écouter chanter en chinois – sur la seconde plage avec une petite variation sur le thème de La lettre à Elise, même ! Et on ne pourra pas passer à côté du généreux cahier supplémentaire en fin d’ouvrage, avec une très précise biographie de l’auteur, des illustrations et des images de la BD commentées. On apprendra d’ailleurs dans ces bonus que cet ouvrage Reload serait en réalité le tome suivant cette autre BD de Song Yang appelée Matous et pingouins. Ceci dit, Reload se lit sans problème comme un one-shot. C’est du reste ainsi qu’il est présenté par l’éditeur français.

Enfin l’objet-livre en lui-même est d’excellente qualité. Un beau papier glacé comme support à cette œuvre très visuelle était tout indiqué…

Au final, Reload est une expérience à faire, visuelle et auditive, que notre méconnaissance encore grande de la BD chinoise nous pousse à étudier dans ses moindres détails ; jusqu’à ce qu’on y trouve forcément des choses qu’on a appréciées et qu’il nous sera agréable de retrouver.
 

Par Sylvestre, le 3 juin 2008

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