Retour à Saint-Laurent des Arabes

 
C’est une interview de ses parents par l’auteur doublée d’un très intéressant reportage que propose cette bande dessinée signée Daniel Blancou : Retour à Saint-Laurent des Arabes. C’est la mise en images de souvenirs remobilisés après bien des années et exposés au lecteur au rythme posé d’une conversation "en famille sur un coin de canapé" à laquelle on a l’impression de participer.

Dans cet ouvrage, les parents de Daniel Blancou racontent leur expérience de jeunes enseignants dans ce milieu bien spécial qu’était le camp "Cité d’accueil Saint-Maurice-l’Ardoise", un camp administré par les militaires et dont on apprend qu’avant d’avoir accueilli des harkis, il a vu depuis 1938 transiter de nombreuses personnes issues de communautés ou de populations en rapport direct avec l’Histoire (réfugiés, prisonniers, etc…) Un camp où se tenait une école, cependant, comme pour faire taire ceux qui se risqueraient à dire que les pauvres gens qui y étaient enfermés étaient complètement abandonnés.

Plus que l’expérience de l’enseignement, c’est la relation entre ces deux Français et les harkis qu’ils ont côtoyés qui nous est contée, avec, en pointillés, le constat de n’avoir à l’époque pas bien su saisir la situation et ne s’être pas, alors, posé plus de questions. Des questions, on s’en pose lors de la lecture, mais tout nous est expliqué de façon simple, ce qui est une bonne chose. Et l’exposé, très riche, donne matière à réflexion sur la condition de ces gens dont personne ne voulait et sur les logiques rebellions qui ont vu le jour dans ce camp en nous présentant diverses situations et différentes personnes ou différents points de vues.

Cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, plusieurs BD (Le cousin harki, Leçons coloniales…) paraissent qui traitent du sujet, de l’Algérie française, et notamment des harkis. A sa manière, Retour à Saint-Laurent des Arabes s’ajoute à la liste en nous faisant porter sur la question un regard nouveau, intéressant, personnel et original.
 

Par Sylvestre, le 5 avril 2012