Robespierre - Le sphinx mélancolique

Jeune et brillant avocat, né à Arras, Robespierre est un ardent démocrate, nourri aux idées des Lumières. Il va devenir une des figures les plus controversées de la Révolution française, notamment avec l’instauration de la Terreur. Une légende noire que tentent de défaire Makyo, Gabrielli et Polelli.

Par v-degache, le 11 octobre 2024

Notre avis sur Robespierre – Le sphinx mélancolique

La lecture de ce Robespierre laisse derrière elle un sentiment étrange : celui d’avoir pénétré l’âme du « Sphinx mélancolique », d’avoir été au plus près de sa pensée et de ses états d’âme, en s’introduisant dans son intimité avec ces scènes qui jalonnent l’album, où on le voit discuter avec la fille de son logeur, et possible amante, Éléonore Duplay, tourmenté et affaibli par la maladie.

La mère de Maximilien de Robespierre décède alors que celui-ci est âgé de 6 ans.

Ceux qui s’attendent à une biographie classique de l’homme vont être déçu. Le scénario de Makyo fait des choix forts, éludant quasiment certains passages ou en tout cas en les traitant via des séquences dialoguées durant lesquelles Robespierre converse avec Saint-Just ou Fouché, ou bien en s’arrêtant sur les discours prononcés à la Convention ou au Club des Jacobins, tout en amenant des éléments purement fictionnels comme les cours de peinture pris avec David. Peu de scènes en extérieur, ou alors de nuit, ou sous la grisaille. C’est bien toute la complexité d’un homme que les auteurs tentent de sonder, tout en démontant la Légende noire de l’Histoire, titre de cette nouvelle collection de Delcourt.

Discours de Robespierre au Club des Jacobins.

On retrouve un Robespierre menant des études studieuses au collège d’Arras, puis au collège Louis-le-Grand, avec la fameuse scène de rencontre en 1775 avec Louis XVI, de retour de sacre, scène qui servira d’ouverture au film de Robert Enrico, La Révolution française, en 1989. Passionné par les récits des Lumières, fréquentant le salon de Madame Roland, il est élu député du tiers état de l’Artois et va défendre avec passion ses idées, y compris l’abrogation de la peine de mort, dont il demandera l’application pour le roi, après le 10 août 1792 !

Vous ne trouverez pas de grandes scènes d’exécution durant la Terreur, tout juste une planche montrant Danton et ses partisans conduits à l’échafaud, accentuant ainsi les divisions au sein de la Convention. Pas de Robespierre grand ordonnateur des exécutions des « suspects », mais des scènes à la bougie au Comité de Salut Public, où il n’est pas le tyran craint qu’on a pu décrire. Une grande place est accordée à la chute de l’Incorruptible et nous vivons quasiment heure par heure le 9 thermidor, à l’issue funeste pour Maximilien qui a attisé les jalousies.

Simone Gabrielli (12 septembre) assure la partie graphique avec un trait réaliste convaincant, maintenant le dynamisme du récit, malgré les nombreuses scènes statiques de dialogue. Alessandro Polelli aux couleurs assure une certaine luminosité à l’ensemble, malgré les nombreuses planches se déroulant dans la pénombre de la demeure des Duplay ou de la nuit parisienne.

Le rendu final est donc éloigné de l’album Robespierre paru en 2017 chez Glénat, dans la Collection Ils ont fait l’histoire. Conjuguer la lecture des deux ouvrages permet d’avoir une idée assez précise de la complexité de cet homme, assez éloignée de l’image que l’on a pu se forger, de quelqu’un de sanguinaire et tyrannique.

Ce Robespierre comblera les passionnés d’histoire, en allant parfois assez loin dans le traitement de la période, et permettra de donner au grand public une vision de l’Incorruptible plus proche de de la réalité historique !

Par V. DEGACHE, le 11 octobre 2024

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