Rose

Parce qu’elle est subitement abandonnée par son amoureux, une jeune femme arrache la fleur d’amour qui lui pousse dans le cœur. Une gangue végétale la paralyse alors, tandis qu’un petit peuple féérique nait de son chagrin. Des factions se créent et un cérémonial bien particulier démarre entre les petites créatures étranges

Par geoffrey, le 7 août 2014

Publicité

Notre avis sur Rose

Si l’amour pousse telle une fleur dans le cœur, une rupture amoureuse s’apparente à un acte de violence contre sa propre unicité. A la mort de l’amour, l’être vole en éclat, la personnalité se fractionne et un combat intérieur se livre entre des forces antagonistes, des envies opposées.
Le monde végétal et protéiforme d’Isabelle Melançon n’attendait que cela pour s’animer. De petits êtres s’échappent soudain de bourgeons suintants, des fleurs germent sur le front, se plantent sur la tête, comblent des vides ou s’arrachent de la poitrine. Incompréhension, refus du choix de l’autre, du deuil et agressivité entre les clans sont vécus au premier degré par les petites créatures. Elles s’affrontent, les idées noires d’un côté et la volonté de s’accepter au-delà de la souffrance, de l’autre.
Des épées et des roses. L’auteur a choisi une forme métaphorique, mélange d’univers gothiques, de clins d’œil aux contes féériques aux légères senteurs d’héroïc-fantasy. On s’attache à cet univers où rien n’est tout à fait neutre et mignon, où rien n’est bien affreux non plus. L’œuvre reste une fragile ligne de partage entre l’écœurement et le merveilleux. Comme si les mini-pouces ou Astrid Lindgren s’étaient invités chez Coraline.
Côté dessin, s’il y a parfois trop de personnages et si le trait gagnerait à changer d’épaisseur pour améliorer la profondeur de champs, ces maladresses de jeunesse ne masquent pas le talent réel, le trait envoûtant et organique qui parfume les planches en noir et blanc. L’enchantement s’empare du lecteur, il succombe à la malédiction des amants maudits, à l’affrontement des sensations intimes dans une joute à la Roméo et Juliette. Il est touché par le mythe d’Isabelle Melançon qui, en près de soixante planches, s’épaissit et s’épanouit jusqu’à laisser refleurir à nouveau le printemps du cœur.

P.S : il est à noter que Vents d’Ouest qui a récemment acquis l’éditeur québécois (http://voir.ca/raymond-poirier/2014/06/26/les-collections-bd-du-studio-premieres-lignes-passent-chez-lediteur-gatinois-vents-douest/ ) n’a pas, jusqu’à aujourd’hui, encore ajouté l’œuvre d’Isabelle Melançon à son catalogue. Gageons qu’il ne s’agit que d’une histoire de temps. Affaire à suivre…

Par Geoffrey, le 7 août 2014

Publicité