Seul le silence

Puisant dans ses souvenirs, l’écrivain Joseph Vaughan se rappelle d’Alice, son égérie avec laquelle il a passé d’agréables moments lorsqu’il avait à peine douze ans. Cette dernière a été retrouvée morte sur le bord d’une route en 1939, battue sans pitié. Quelques mois plus tard, une deuxième fillette, Laverna, est retrouvée sauvagement assassinée provoquant un réel émoi chez Joseph. Ce dernier, conseillé par son institutrice, se met alors à écrire et même à se présenter à un concours. Alors qu’il reçoit des encouragements du jury, il s’aperçoit que sa mère entretient une relation avec son voisin Kruger. En juin 41, le corps d’une troisième petite fille, Emma, est retrouvé atrocement mutilé et à la suite de longues recherches, aucune piste n’est découverte. C’est l’entrée en guerre des Etats-Unis et les yeux se braquent sur le conflit mondial. En mars 42, Catherine, âgée de 8 ans, est retrouvée morte affreusement décharnée et le mystère de l’identité de l’assassin reste complet. Tout semble se déliter autour de Joseph qui propose alors à plusieurs copains de créer un groupuscule qui protègera les petites filles selon un pacte de sang.

Par phibes, le 2 novembre 2021

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Notre avis sur Seul le silence

Le scénariste romancier Fabrice Colin moult fois récompensé pour ses œuvres s’associe à l’illustrateur Richard Guérineau reconnu pour son travail sur des grandes séries telles Le chant des Stryges, Asphodèle, Le casse et sur des ouvrages plus historiques comme Charly 9, Henriquet… Ensemble, ils décident de s’accaparer du fameux roman noir de R.J. Ellory paru en 2007 pour le restituer dans une forme illustrée.

Dès le départ le ton est donné. Dans une prose personnelle, le personnage clé de cette œuvre, Joseph Vaughan, nous livre des péripéties horrifiques au long cours (dès 1939 jusqu’2005) qui profondément marqué sa destinée. Il y est question d’assassinats de fillettes à répétition, d’incompréhension, de douleurs psychologiques, de difficultés à identifier le tueur, de guerre mondiale… Dans cette terrible ambiance savamment pesée, le récit ne manque pas de nous engluer dans une noirceur terrible qui, au passage, suscite bien des émotions et des interrogations au fur et à mesure que l’on suit les évènements.

Qui est à l’origine de ces meurtres en série ? La réponse que l’on attend ne vient que dans les dernières planches, après que l’on ait rendu coupable une bonne partie des protagonistes qui sévissent dans cet album, y compris le narrateur. Il ne fait aucun doute que la césure du roman original est parfaite, par le fait que tout semble être dit narrativement parlant, dans une linéarité et une fluidité qui rendent le récit terriblement accrocheur. Dense dans son développement et dans la tragédie, il a la particularité d’être entêtant et pousse inévitablement avec une efficacité reconnue le lecteur vers l’issue finale.

Richard Guérineau apporte une touche picturale pour le moins profitable à cette adaptation. A partir d’un style qu’on lui reconnaît, qu’il a su faire évoluer au fil de ses œuvres, l’artiste parvient à donner corps à ce thriller en mettant en avant un excellent travail réaliste. Se faisant fort de camper l’Amérique rurale des années 40 et plus, il nous régale de sa générosité sur la restitution des superbes décors qu’il traite avec un détail impressionnant. Tout comme la galerie de personnages qu’il anime avec soin, le dessinateur parvient à visualiser tout son petit monde sans faux pas et ce, avec émotions. Le tout sous le couvert d’une colorisation sobre, sans excès et judicieusement employée.

Une adaptation à sensations, réalisée de mains de maitres et qui se veut un très bel hommage au roman d’origine. A lire absolument par les amateurs de thriller !

Par Phibes, le 2 novembre 2021

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