SHAOLIN COW-BOY (NOUVELLE ÉDITION)
1/3: Start Trek

Geoff Darrow est un auteur qui se fait avant tout plaisir sur ses planches, quitte à passer un temps incroyable sur le moindre détail, à découper un mouvement sur plusieurs pages panoramiques, à ralentir l’action pour accentuer son impact… Les planches défilent, on est abasourdi devant cette performance graphique qui nous laisse sans voix…
On pourrait s’imaginer, alors, qu’il ne se passe pas forcément grand chose dans cette histoire, tant l’auteur étire le plus possible la moindre scène, qu’il semble même ne pas vraiment savoir ou il va, donnant l’impression d’être complètement en roue libre tout du long, ne donnant aucune explication, laissant le lecteur glisser irrémédiablement dans une narration en flux constant. Et c’est vrai que ramené sur 200 pages, l’intrigue est assez fine, voir carrément prétexte pour permettre cette démonstration de mise en scène presque cinématographique. L’album se lit très vite, l’essentiel se résumant à un combat dantesque et une course poursuite complètement improbable, le tout saupoudré de dialogues qui sont davantage de l’habillage qu’autre chose.
Mais, contre toute attente, la magie opère tout de suite. On accepte les codes qu’impose Darrow, on se laisse porter par ce film qui nous transporte dans un monde complètement barré, avec des références mystiques, des renvois aux films d’action asiatiques… Darrow travaille très précisément l’enchaînement des mouvements, les cadrages, c’est très fluide, très vivant. On est très clairement dans un univers très imagé, très graphique. Il n’est pas réellement question de nous raconter une histoire, mais bien plus de nous prendre par la main sans se poser de question… Et ça fait du bien !

Néanmoins l’essence de cette série, comme c’était déjà le cas avec Hard Boiled et Big Guy, tient beaucoup plus dans l’originalité de son univers visuel. Et même si cette surenchère de détails en deviendrait presque anecdotique, on est fasciné par ce voyage incroyable, cette multiplicité qui occupe parfois le moindre centimètre, qui nous enveloppe dès les premières pages, alternant avec des scènes beaucoup plus "vides", plus "narratives".

Si vous êtes, comme moi, un fan de cet auteur, si vous aimez son dessin, les mondes qu’il déploie devant nous, vous devriez apprécier cette réédition augmentée de Shaolin Cowboy !
En effet, on peut trouver en fin de volume quelques illustrations inédites mettant en scène cet étrange héros si atypique !

Très recommandé !

Par FredGri, le 15 mai 2020