SHÔGUN MAG
Septembre 2006

Shôgun Mag est un mensuel de prépublication ne faisant pas moins de 308 pages. Fonctionnant sur le même mode que ses inspirateurs japonais, ce mag offre non seulement des articles thématiques sur le monde du manga, mais aussi des extraits de Bds qui devraient être prochainement éditées. Comme au Pays du Soleil Levant, la parole est laissée au lecteur quant au choix des bds qui poursuivront leur route dans le magazine. Un questionnaire-qualité permet ainsi de faire une sélection des premières prépublications.
Pour ce premier numéro, les rédacteurs ont élaboré des articles de première approche du monde manga : une explication sur les genres et classifications, une présentation du métier de traducteur et de ses difficultés, et, enfin, un reportage sur la longue voie du métier de mangaka. Ils terminent ce volet « théorique » sur le thème des textes bibliques dans les mangas.
Pour ce qui est des extraits choisis, 9 Bds nous sont présentées : cela va de l’Heroic Fantasy, au conflit social en passant par l’humour potache et la science-fiction. Il devrait y en avoir pour tous les goûts.

Par KOMORI, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur SHÔGUN MAG #1 – Septembre 2006

Le principe de ce magazine est intéressant : ouvrir un mode de publication à des mangakas européens en herbe est un bon moyen de leur donner une chance de se faire connaître et d’accrocher un public. En outre, le prix reste abordable et sa mise en vente en kiosque et librairie devrait en faciliter l’accès.

Les chapitres techniques sont vraiment intéressants : l’explication des genres permet d’éclairer les lanternes des néophytes, même si le tableau récapitulatif n’est pas ce qu’il y a de plus limpide. De même, l’article sur les traducteurs permet de donner des pistes de travail à tous ceux qui souhaiterait s’essayer à ce métier si particulier. L’article le plus pertinent sur le monde du manga est celui relatif au métier de mangaka : il rappelle à tous ceux qui espèrent y faire leur trou qu’il s’agit d’un Métier, qui nécessite de la discipline, un apprentissage et de la rigueur (en particulier lorsque l’on opte pour la voie de l’autodidactie). Cela permettra de ramener les pieds de certains sur terre et leur évitera bien des désillusions.

L’article sur les textes bibliques est étonnant et ouvrira un autre niveau de lecture à ceux qui connaissent déjà les titres cités.

Pour ce qui est des Bds en elle-même, l’impression générale est mitigée :

Mind : les premières pages rappellent l’univers de Princesse Mononoke dans le choix des animaux. Cette ressemblance s’arrête cependant au bestiaire. Les trames sont assez sombres, ce qui rend parfois difficilement déchiffrable le trait. Cela donne une impression de ton sur ton. Les onomatopées sont parfois trop grandes par rapport à la taille générale de la case. Pour ce qui est du scénario, on a la sensation d’avoir loupé un chapitre : on passe de la forêt et d’un clan de chasseurs à un village avec un génie de la nanotechnologie. Il manque un lien du temps ou de lieux ou même d’action. Bref, on s’y perd.

Holly War : il y a un texte explicatif avant l’entrée en matière qui est tout à fait bienvenue. Le scénario prend alors une toute autre dimension : la lutte entre monde céleste et anges déchus, les origines de l’humanité, le partage de la Terre… Le dessin est clair, fin. Les bulles de présentation permettent rapidement de poser le décor et l’ambiance du récit. L’utilisation des pleines pages est intéressante car elle renvoie instantanément une impression de démesure et d’intensité. En revanche, la qualité du dessin est parfois inégale dans le traitement des personnages. Quoiqu’il en soit, ce titre semble prometteur.

Love INC : le trait du dessinateur semble clairement inspiré par le manga Family Compo. Il y a des cases qui ne trompent pas. Pour ce qui est du scénario, bonjour les clichés sur le provincial qui débarque de sa campagne dans la grande capitale ! Béret, chemise canadienne et doudoune en laine de mouton ! Bref un poil trop lourd même si c’est pour servir le scénario !

Anarky : conflit social et engagement politique au menu avec un arrière goût de flash infos du 20h. Si l’auteur essayait de nous faire saisir son rejet de la politique intérieure française actuelle, aucun doute : c’est réussi. Quant à sa projection de ce que cela pourrait donner dans le futur, il semblerait que l’on se rapproche plus de la situation américaine actuelle : banlieues chics sécurisées, ghettoïsation, pouvoir quasi militaire… Pour autant, si la source d’inspiration est claire, le propos aurait mérité d’être approfondi et pas simplement "donné à voir". Pour ce qui est du dessin, il semble parfois un peu pataud, surtout dans le traitement des mouvements.

Breath effect : Le trait semble trop rapide, néophyte. Pour ce qui est du propos : c’est l’éloge de la pouf ; le ton est graveleux et s’affiche comme tel. Mais, à vouloir trop en faire, du comique ironique on bascule vite dans le lourd !

Quantic soul : impression de déjà lu dans le thème et surtout dans le traitement graphique du personnage scientifique (père de l’héroïne). Ledit papounet est exilé aux USA, qui vivent en autarcie depuis la fin de leur hégémonie, et tente de développer un système de téléportation, ce qui agace bien entendu les nouveaux puissants. Et bien entendu, c’est sa fille qui se retrouve à courir pour sauver sa peau. Bref, assez classique. Le dessin, quant à lui, inégal. Le trait reste à travailler : pourquoi tant de différence entre les deux professeurs ennemis et les autres personnages. Les premiers sont précis et travaillés quand les seconds ont l’air d’ébauche.

Lolita HR : le dessin paraît débutant, un peu plat (même si pour le coup, ça crée un style) et risque de desservir le scénario. Le récit tourne autour du conflit social, de la lutte des classes : entre ceux qui sont mis en quarantaine pour cause de contamination par le marabout (qui semble transformer les victimes en Chubaka) et les biens nés. Au centre de cette lutte une chanteuse provocatrice qui milite pour le libre arbitre.

Summer snow : sea, surf and sun pour cette avant dernière histoire qui met en scène une bande de surfers sur le point de basculer dans un monde surnaturel. Le trait est intéressant mais les cases semblent un peu saturées par l’effet des trames choisies. Une impression de ton sur ton ou de trop gris. Le dessin mériterait d’être moins ombré.

Sanctuaire reminded : un marin russe délirant échappé de sa cellule de confinement et lâché au beau milieu d’un sous-marin en pleine immersion. Le trait des premières cases est aéré, minimaliste, simple et les fonds sont cantonnés au minimum. Il semble plus proche du "style européen" que les précédents. Pour ce qui est du scénario : la confusion entre réel, cauchemar, délire est intéressante car elle insinue le doute dans l’esprit du lecteur. Reste à savoir comment l’auteur va intégrer le côté surnaturel et mystique dans les prochaines pages.

Un magazine qui offre une tribune à de jeunes auteurs pour qu’ils parfassent leur style !

Par KOMORI, le 7 octobre 2006

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