Sông

Petit à petit, au gré des retrouvailles, au Vietnam, en France, un soir dans le salon, pendant une panne d’électricité, au téléphone pendant la crise du Covid, Linh raconte à sa fille Hài-Anh sa vie dans le maquis, entre 1969 et 1975, avec les révolutionnaires communistes ou elle a appris les bases de la résistance, mais aussi du cinéma, auprès de son père qu’elle ne connait qu’à peine. Elle l’assiste sur le tournage de documentaires, y apprend les rudiments de son futur métier, y découvre une vie en communauté, dans l’urgence. Progressivement, Linh raconte aussi la relation avec ses parents, et sa fille apprend à redécouvrir sa propre mère à travers ce portrait juste et touchant.

Par fredgri, le 1 mars 2023

Publicité

Notre avis sur Sông

Si Sông nous plonge en pleine histoire du Vietnam, qu’il est important de s’attarder sur la chronologie des évènements en fin de volume, il est surtout question de deux femmes, une mère et sa fille, qui se dévoilent progressivement dans ce superbe album, première œuvre des deux autrices Hai-Anh et Pauline Guitton.

Ensemble, elles se penchent sur la jeune Linh qui apprend en même temps le rythme du quotidien dans les maquis, les regards posés sur elle, cataloguée comme petite bourgeoise, les bases d’un tournage de documentaire, du montage… Mais c’est une façon, pour Hai-Ahn, de reconstruire la relation avec sa mère, de mieux la connaître, et de redéfinir sa propre histoire, les liens entre ces adultes qui se sont petit à petit éloignés les uns des autres.

L’écriture est réellement fine. Elle ne s’attarde pas forcément sur l’aspect bassement pénible, pour forcer le pathos, mais préfère développer un tissu de vie qui se tient surtout sur les personnages, les rencontres et l’expérience du quotidien. La mère et la fille se confient, leur confidences se croisent, passent de l’enfance à l’âge adulte, évoquent un père, des premiers amours, se glissent entre Paris et Ho Chi Minh-Ville, entre un appartement en ville, une salle de cinéma et la jungle. Petit à petit, transparait derrière les mots l’amour d’une petite fille pour cette mère qui semble avoir été trop distante et qu’il est enfin temps de retrouver.

Graphiquement, le trait de Pauline Guitton est d’une grande douceur. A la fois épuré et juste, il va à l’essentiel, tout en gardant une très belle et simple expressivité. La narration est fluide et agréable, on évolue dans les planches, gagné par le charme de ces femmes, par ce que leur regard dégage, par un mouvement de cheveux, une silhouette qui se glisse entre les branches. Il y a un peu de Daphné Collignon dans cette justesse, cette sensibilité, il va falloir surveiller de très prêt cette artiste…

Un album que je ne saurais assez vous conseiller.

Par FredGri, le 1 mars 2023

Publicité