STORYVILLE - L'école du plaisir

A la Nouvelle-Orléans, la jeune Santa Maria, âgée de 17 ans et déjà bien au fait de ses sens, partage sa vie avec sa mère et ses deux frères. Adeptes de l’argent facile, ces derniers traficotent en vendant de l’alcool de contrebande. De même, ils passent beaucoup de temps dans le quartier de Storyville et plus particulièrement dans le lupanar de Madame Lala se nommant le Make love to me baby. Etant toujours pucelle et vivant une réelle complicité avec le jeune Trévor, Santa n’est pas sans s’interroger sur le fonctionnement de la maison close. Le jour où ses frères décèdent de la petite vérole, elle rend responsable Madame Lala et décide de se venger. Elle obtient de Trévor son assistance pour exécuter la basse œuvre. Malheureusement, celui-ci disparaît et Santa doit alors à son tour infiltrer la maison de tolérance pour assumer sa vengeance et également rechercher son ami. Son insertion au sein de ce milieu du sexe va tout d’abord la décevoir pour ensuite l’amener à bouleverser complètement les pratiques habituelles pour la quête du plaisir.

Par phibes, le 9 octobre 2023

Notre avis sur STORYVILLE – L’école du plaisir

En rapport avec le quartier chaud de la Nouvelle-Orléans dans lequel jeux, trafic d’alcool et prostitution restent au début du 20ème siècle étroitement liés, cet album nous entraînent dans les péripéties émancipatrices d’une jeune fille, Santa Maria, qui, à partir d’une quête de vengeance, va apporter un souffle nouveau sur une maison close et instaurer des pratiques novatrices en faveur de ses pensionnaires.

Se nourrissant d’un contexte un tantinet sulfureux et souvent dissimulé, Laurianne Chapeau nous livre un récit qui a le privilège de cultiver liberté, légèreté et féminisme. Prônant le fait que le plaisir doit être partagé, l’autrice nous immerge dans le parcours de Santa Maria qui, ayant idéalisé l’univers de la prostitution, va être mise devant le fait accompli et découvrir une facette de ce milieu beaucoup moins engageante. Cette analyse frustrante va la pousser à envisager une autre échappatoire, celle de la quête du plaisir par l’éducation.

Faisant de beaux efforts pour bien cadrer historiquement son histoire, l’artiste nous permet de suivre plusieurs personnages au charisme subtilement travaillé, à commencer par Santa elle-même, jeune femme volontaire, sans retenue et proche de la gent féminine qui va faire sa place au cœur de la troupe du Make love to me baby. La tonalité est des plus agréables, sans tabou pour parler sexe et se veut anticonservatrice. Par ce biais, elle donne un gros coup de pied aux vieilles traditions tout en générant malgré tout en parallèle une réelle intrigue policière avec quelques accents dramatiques. On saluera au passage le joli travail sur les dialogues particulièrement directs, instillant une belle dynamique au récit.

Graphiquement, Loïc Verdier que l’on connaît pour ses illustrations antérieures sur son one-shot La farce des hommes-foudre réalise une prestation qui se veut remarquablement efficace. Campant historiquement la Nouvelle-Orléans qu’il a su croquer à force de recherches documentaires, l’artiste joue avec brio sur ce semi-réalisme qu’il a appris à dompter et qui lui permet de restituer un message clair et on ne peut plus convaincant. La galerie de portraits est visiblement bien variée, mettant en avant des personnages bien choisis, caractériellement bien étudiés au point pour certains, d’être très attachants (Santa, Trévor, Nina…).

Une histoire complète qui se veut être un véritable plaidoyer pour la femme et le plaisir partagé.

Par Phibes, le 9 octobre 2023

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