Super-Héros, une histoire française

Xavier Fournier (rédacteur en chef de Comic Box) nous invite à suivre l’évolution, en France, du genre "Super héros" de la fin du XIXe siècle à nos jours. Nous découvrons ainsi que contrairement à ce que l’on pourrait croire, les super-héros ne sont pas nés aux États Unis, mais en France !
Nous rencontrons ainsi le Comte de Monte Cristo, Rocambole, Le Capitaine Fantôme, La Dame Masquée, Fantomas, Judex, La Femme Volante, le Nyctalope, Yordi, le Scarabée d’Or, Fantax, Super Boy, Mikros… Au grès d’une histoire éditoriale assez mouvementée !

Par fredgri, le 5 février 2015

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Notre avis sur Super-Héros, une histoire française

Depuis des décennies on connait les super-héros américains qui ont modelé l’image que l’on se fait du genre, imposant ses archétypes, ses codes, son écriture. Pour tout un chacun, le super-héros est avant tout américain, il représente le sensationnalisme de cette nation, une mythologie exacerbée, aux couleurs primaires, très manichéenne…
Néanmoins, il convient de recadrer les choses !

Dans ce passionnant livre, richement documenté, Xavier Fournier s’interroge sur les bases du genre, sur les sources qu’il retrouve dans la littérature populaire française, qui ont pu, progressivement, amener l’émergence d’un nouveau type de héros… ! La démonstration est à la fois audacieuse et très instructive, car elle met en avant l’importance de cette littérature et son aspect précurseur et fondamental, d’autant que les codes vont très vite évoluer et s’enrichir au fur et à mesure.

Alors bien sur c’est assez orienté, même si Xavier Fournier ouvre le plus possible son éventail afin de rester avant tout objectif. Il ne s’intéresse, évidemment, qu’à l’aspect "français" de ce processus, et construit donc une chronologie du super-héros dans les publications françaises. Après tout on sait très bien qu’aux États Unis le genre s’est aussi formulé sur le même créneau populaire, avec les Dime Novel du milieu du XIX e siècle, les Pulp’s plus tard etc. Et que le mélange de toutes ces diverses sources à permis aux genres de se formaliser, de s’ouvrir aux autres cultures… Le héros est hors du commun avant d’être "super".
Toutefois, j’ai aussi l’impression que les premières "parentés" dans le livre se font sur des aspects plus anecdotiques qu’éthiques. Si untel porte un masque, ou une identité secrète, qu’il possède une force légèrement plus importante il rejoint d’office le banc des précurseurs, bien plus que ces héros de type "Robin des bois", par exemple ! D’où une première partie de livre assez déstabilisante, qui insiste sur des inconnus qui portent des capes ou qui se cachent derrière un masque, au détriment d’un véritable "héroïsme".

Mais, paradoxalement, c’est important aussi de passer par ce cheminement, car il met en avant un contexte social propice à l’émergence d’une certaine littérature. Tel évènement provoque tel autre et de fil en aiguille on voit apparaitre des romans, des feuilletons dans les journaux. L’imagination s’envole et forcément les règles morales du héros se forgent dans la foulée ! Le roman de gare se nourrit de ces personnages extraordinaires qui peuvent voler avec ou sans l’aide de gadgets, de ces savants fous, de ces aventures que les lecteurs retrouvent chaque semaine, ici comme aux States, le processus est lancé !

A partir du chapitre 6 Xavier Fournier aborde l’aspect éditoriale de cette chronologie avec l’arrivée des frères Offenstadt (L’Épatant), de Paul Winkler (Opera Mundi), Lotario Vecchi, Cino Del Duca (Les Editions Mondiale)… Le phénomène grandissant, la presse se découvrant des enjeux économiques importants on voit apparaitre les premières BD, les premiers héros. Il y a des traductions bien sur mais pas uniquement… Sans oublier les attaques de la censure qui vont amener au fil des ans les divers créateurs à retravailler leur copie, lisser etc.
Dès lors le livre en devient encore plus passionnant.

Je ne vais pas entrer dans les détails, car Xavier Fournier le fait bien mieux que moi, d’une part, et surtout, le but premier de cette chronique est de vous amener à rapidement découvrir ce remarquable livre qui brosse le portrait d’un genre qui, en France, n’a pas à pâlir devant les "grands" américains, loin de là.
Peut-être en effet, les canons américains ont pris progressivement le relai et du coup le lecteur français moderne a tendance à oublier cette histoire nationale très riche et importante. Toutefois, il y a des faits, des filiations évidentes qu’il était important de réhabiliter, histoire de mieux appréhender le retour en force du genre, l’émergence actuelle des super-héros français, ou plus communément des "french comics" qui bien plus que de n’être que de vulgaires ersatz (comme il est souvent dit) sont davantage les héritiers d’une culture populaire fascinante qui fit les beaux jours de la presse en France.
On redécouvre ainsi de nombreux personnages, on aurait envie d’en lire davantage d’ailleurs et c’est certainement la très grosse qualité de ce livre, ce défrichage érudit et passionné qui met l’accent sur une histoire parallèle qui permet de mieux comprendre l’impact du genre ici, bien plus proche d’une tradition que d’un bête copié collé !

Un livre indispensable pour tout amateur de comics, mais plus globalement de BD populaire en général. Après tout, il est certes ici question de super-héros, mais je trouve que l’intérêt du livre ne se cantonne pas uniquement à cet aspect des choses, il va tout de même un peu plus loin… !

Très vivement conseillé !

Par FredGri, le 5 février 2015

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