Teshkan

Au sein du peuple des Algonquins, le clan du Cerf est très peu estimé à cause de son animal-totem qui, selon la légende, est à l’origine de la mise à mal de l’harmonie. Afin de retrouver les bonnes grâces de toutes les tribus et faire cesser cette malédiction pesante, le chef du clan mandate son fils Teshkan pour aller à la rencontre des Robes-Noires, les jésuites français, et leur proposer leur soumission. Dans sa quête, le jeune indien va être confronté à de douloureuses épreuves au contact de Mihina, sa petite sœur, ou de Lornand, le trappeur, qui de par leurs actions respectives vont le pousser à affronter l’ennemi juré du Cerf, à savoir le perfide Loup et faire tomber la terrible malédiction.

 

Par phibes, le 9 janvier 2011

Notre avis sur Teshkan

Amateur de contes et de légendes indiennes, François Lapierre repart en solo pour un one-shot tout en sensibilité qui nous plonge dans le cadre historique de la découverte du Nouveau monde. C’est dans ce contexte d’annexion territoriale qu’il nous nous propose une chronique pour le moins métaphorique (il suffit de voir le premier de couverture pour en sentir les effluves), opposant deux animaux-totems tels le cerf et le loup.

Sous ce couvert mythologique, l’aventure dont il est question donne la "parole" à un autochtone algonquin, Teshkan, qui se voit confié une mission diplomatique. C’est lors de celle-ci que sa destinée va basculer dramatiquement, dans un affrontement à la teneur sanglante et horrifique.

François Lapierre signe ici un album de qualité, sur un univers surprenant par ses ambiances tragiques qui tranchent avec la représentation qu’il en donne. Après une brève évocation mystérieuse sur deux planches, l’auteur pique judicieusement la curiosité du lecteur pour l’amener dans un récit qui puise ses bases dans les racines indiennes. Servie par des dialogues modernes, la mission qui s’ensuit prend des tournures plutôt insoupçonnées et fait tomber le ton dans une dureté intentionnellement soft et cauchemardesque. Le voyage du jeune Teshkan est également l’occasion de dévoiler le choc de deux cultures, diamétralement opposées, dans une allusion plutôt amère qui fait mouche indubitablement.

Graphiquement, le trait doucereux de l’artiste conforté par une colorisation délicate que l’on ne reconnaît que trop pour l’avoir appréciée dans les albums de la série Magasin général, est remarquablement utilisé pour dépeindre les péripéties de Teshkan. Son coup de patte est attachant, fait preuve d’une recherche personnelle dans la façon de représenter les personnages, à l’effigie juvénile, dotés d’une expressivité attachante pour certains et terrorisante pour d’autres. Les paysages sous la neige sont d’une grande beauté et ajoutent une poésie fortement probante.

Une bien belle histoire du Nord américain aux intonations mythologiques et dramatiques préfacée par un parrain de taille, Régis Loisel.

 

Par Phibes, le 9 janvier 2011

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