The nobody

Avec Monsieur personne, Jeff Lemire s’empare avec brio du héros au destin tragique créer par H. G. Wells dans un roman graphique au dénouement inattendu et toujours d’une grande force émotionnelle.

A l’instar de son excellent Essex County, Jeff Lemire centre son histoire dans une petite ville coupée du reste du monde.
Le récit se construit lentement, mais avec cette lenteur maîtrisée et puissante. Au fil des pages on découvre où l’auteur nous guide et la pression, latente au début, se fait de plus en plus ressentir au fur et mesure que la paranoïa des habitants de Large Mouth croit envers l’homme aux bandages. Implacable, l’issue s’annonce d’emblée tragique, mais quand l’heure de la fin approche : c’est à ce moment précis que l’on perçoit réellement tout le talent de Jeff Lemire et son grand sens la narration, mais chut…

Le dessin de Jeff Lemire est structuré par un encrage épais et présent. Le noir faisant office de charpente est rehaussé par une colorisation en grandes plages d’un bleu glacial qui contrastent avec les zones restées blanches. Le rendu final instaure une atmosphère lugubre et pesante. Par son dessin, Jeff Lemire ne nous laisse plus le choix : l’angoisse est au rendez-vous..

Terrible, cruel, captivant, et sans grand espoir sur la nature humaine, Monsieur personne confirme qu’après Essex County, que Jeff Lemire est un auteur de grand talent sur lequel la bande dessinée indépendante nord-américaine va pouvoir compter.

A découvrir de toute urgence.

Par melville, le 16 mai 2010