TRAVERSÉES, La route de l'aventure

Pas un jour qui passe sans qu’aux informations on entende parler de migrants embarqués sur des embarcations de fortune. Pas un jour non plus où le compteur des vies perdues en mer par ces gens-là ne grimpe pas. L’attractivité qu’exercent les pays occidentaux sur les habitants de pays plus pauvres ou en guerre est telle que malgré les différents risques (mourir en mer, être renvoyé à la case départ, n’avoir pas une vie meilleure là où on pensait que tout serait plus facile…) et malgré les nombreux témoignages de plus en plus nombreux dissuadant les candidats aux traversées, ces derniers semblent toujours plus nombreux à garder une foi et un espoir intacts.
Dans Traversées, on est à ce qu’on pourrait appeler la deuxième étape du chemin de croix des rêveurs d’Occident. Car pour certains d’entre eux, des premiers obstacles ont déjà été franchis lors de leur voyage vers leur point de départ en bateau : conditions de voyage déplorables, racket, menaces, séquestration contre rançon, voire pire. Sauf que là, par chance, le point de vue se fait depuis le pont d’un bateau qui est là pour porter secours à ces malheureux. Pas depuis les bateaux de garde-côtes ou de passeurs.
Avec cette BD, on touche du doigt la misère de ces gens qui vont jusqu’à risquer leur vie dans l’espoir de vivre mieux ailleurs. Et encore, bien calés dans nos fauteuils de lecteurs, on ne perçoit sûrement pas comme ils existent la peur, les ténèbres de la nuit, le froid mordant, le stress, etc… On découvre aussi à quoi ressemblent ces missions humanitaires qui viennent à leur secours et les personnes qui les mènent ; qu’on applaudit.
Comme tout témoignage sur un phénomène sociétal, le propos est forcément réduit à ce qu’a vécu directement son auteur. Lucas Vallerie, ainsi, ne peut pas parler des dizaines de milliers d’autres pauvres hères qui sont passés par la « route de l’aventure » avant ceux qu’ils a rencontrés. Mais en hommage à tous, il donne la parole à ceux qu’il a entendus et rappelle à tous ceux qui se reconnaîtront dans cette crainte que les migrants qui souhaitent vivre sous nos latitudes sont parfois des docteurs ou des enseignants, des cuisiniers ou des avocats, des gens souhaitant arracher à la misère ou à la guerre des enfants qui n’ont rien demandé ; pas forcément des terroristes ou des gens qui ne souhaitent que profiter de prestations sociales.
Traversées est une bande dessinée très intéressante au dessin agréable. C’est aussi une histoire de courages et de rêves.

Par Sylvestre, le 23 septembre 2024