Un art neuf: la bande dessinée

Loin de se cantonner à une histoire exhaustive de la Bande Dessinée, ce discours de Benoît Peeters est davantage là pour expliquer consciencieusement et pédagogiquement à un public peut-être moins connaisseur comment la bande dessinée s’est progressivement construite au fil des décennies et comment la perception que l’on pouvait en avoir a elle aussi évolué. La démonstration est claire et édifiante, le conférencier/auteur établit ainsi une chronologie en remontant à Töpffer, tout en précisant que de toute façon, cette idée de narration par une succession d’images est bien antérieure. Puis il suit le courant en passant par les strips, les premiers journaux, l’arrivée de la critique, l’émergence de revues plus adultes et petit à petit la disparition de la presse etc.
Au passage, il réinsiste sur son amour immodéré pour Hergé et Tintin. Cet aspect du livre est peut-être un peu poussif, on a l’impression que le père de Tintin est l’ultime artiste, visionnaire et génial de ce média… Mais passons, on peut excuser cette insistance toute subjective, tant le reste du livre est éclairant.

Il ne faut toutefois pas oublier à qui s’adresse ce discours. Il est question ici d’expliquer à un public d’intellectuels, certainement non connaisseurs des enjeux qui remuent le monde de la BD, en quoi ce neuvième Art est légitime et quel parcours du combattant a animé cette prise de conscience et qui amène aujourd’hui un théoricien aussi réputé que Peeters à se retrouver devant le collège de France pendant une période d’un an. Aujourd’hui, il n’est plus seulement question de vagues albums pour enfants, ou de délires pompeux autour des Romans Graphiques, mais d’un véritable Art qui combine plusieurs formes d’expression, qui nous a permis de nous immerger dans une succession de chefs d’œuvre narratifs, pour tous les publics, qui a définitivement acquis ses lettres de noblesse en dehors des sempiternelles références assénées par la critiques.
En ce sens, ce discours est vraiment intéressant, car jamais il ne se veut moraliste, ni l’expression d’un jugement qui cherche à se justifier. On est dans l’ouverture, la pédagogie la plus généreuse, le partage et la transmission.

Peut-être que le lecteur aguerri aura le sentiment de lire des évidences mille et une fois récitées deçi delà, mais je trouve, de mon côté, que cela reste un témoignage intéressant !

Très conseillé !

Par FredGri, le 18 mars 2023