Un Gentil garçon

Un gentil garçon est un recueil de 11 nouvelles de l’auteur japonais Shin’ichi Abe :

Un gentil garçon (première parution en 1970)
Miyoko, l’atmosphère d’Asagaya (première parution en 1971)
Un pas vers la solitude (première parution en 1971)
Un chat (première parution en 1971)
La chevelure (première parution en 1971)
Une épaule légère (première parution en 1971)
Images de vauriens (première parution en 1972)
Au cœur d’Asagaya (première parution en 1972)
Amour (première parution en 1973)
Vie privée (première parution en 1976)
Miyoko, l’atmosphère de Tagawa (première parution en 1994)

Par melville, le 20 octobre 2011

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Notre avis sur Un Gentil garçon

Shin’ichi Abe est un artiste japonais au parcours chaotique né dans les années 50. A tous justes vingt ans il publie ses premières nouvelles dans la revue d’avant-garde Garo et devient en quelques années seulement une figure majeure du watakushi manga (traduit littéralement par « bande dessinée du Moi » en français). A la fin des années 70 il est approché par la congrégation religieuse de Shôhô dont les préceptes le pousse à s’éloigner de toutes expressions artistiques. Pendant près d’une trentaine d’années Shin’ichi Abe réprime ses élans artistiques qui ne cessent de le hanter. En 2000 ils finissent par avoir raison du dictat religieux et Shin’ichi Abe renoue avec la peinture et la bande dessinée. (Selon la biographie de l’auteur par Béatrice Maréchal)

Le watakushi manga se différencie du genre de l’autobiographie dans « l’idée que la vérité d’un être se lit moins dans ses actes que dans ce qu’il ressent et cache au plus profond de lui » (extrait de la postface de Béatrice Maréchal). En ce sens – et aussi dans le graphisme – on peut rapprocher la démarche de Shin’ichi Abe de celle de Edmond Baudoin. A l’instar de l’auteur des Sentiers cimentés, de Terrain vague ou du récent Tu ne mourras pas (d’après le roman de Bénédicte Heim), les courtes nouvelles du mangaka mettent en scène des personnages à fleur de peau dont la grande mélancolie est infusée par les propres sentiments de son auteur. Il y a quelque chose de fondamentalement sensoriel dans les récits de Shin’ichi Abe avant même d’être conceptuel ou intellectuel, et c’est ce qui fonde avant toutes choses la condition d’artiste de l’auteur nippon. Parler de manga pour ce livre a bien sûr un sens dans la mesure où son contenu est indissociable de la culture japonaise, mais il est également bien plus. Ici le terme de neuvième art prend tout son sens : car le propre de l’art n’est-il pas d’abolir les clivages et les frontières…

Les nouvelles qui constituent ce livre puisent leur grande force dans le non dit, qui ici n’est pas pudique mais métaphysique. En quelques pages seulement pour les récits les plus courts, Shin’ichi Abe invoque une mélancolie d’une rare densité dramatique qui enserre le lecteur pour mieux lui transpercer le cœur. Sous le trait fragile à l’image de son auteur névrotique, le noir de la nuit tranche avec la blancheur des corps au sujet de laquelle le doute est permis entre pureté ou pâleur fantomatique. Dans ses histoires Abe ne met pas en scène des idées mais des sentiments, il laisse soin au lecteur le choix de comprendre ou non son propos. Ses histoires sont des invitations plus que des récits fermés.

Lire Shin’ichi Abe est une expérience singulière que je ne peux que vous inviter à partager.

Un must à lire d’urgence !

Par melville, le 20 octobre 2011

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