Un sombre manteau

La vieille Mara est une trementinaire, une guérisseuse des Pyrénées catalanes. Elle vit des potions qu’elle préparent pour les gens du pays. Mais elle sent ses forces la quitter doucement et espère trouver une personne pour assurer la relève. Elle transmet notamment ses connaissances à une jeune du village, ce qui ne plait guère à sa mère.

Mais le quotidien de Mara est bouleversé lorsqu’elle recueille chez elle une jeune femme muette, habillée comme une citadine, et qui semble autant égarée qu’apeurée. Que peut-elle bien fuir ? La vieille rebouteuse se prend d’affection pour elle et tente de faire croire qu’il s’agit de sa nièce. 

La population locale, dans ce coin reculé, semble osciller entre fascination et crainte vis-à-vis de l’inconnue. 

Le climat, dans le village, s’assombrit aussi de jour en jour avec le développement d’une terrible maladie, la rage.

Par legoffe, le 16 juin 2024

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Notre avis sur Un sombre manteau

Jaime Martin nous entraîne dans un village reculé des Pyrénées, au XIXe siècle ; une période historique pour la médecine, qui va basculer progressivement des traditions vers de grandes découvertes, comme l’artisanat laissera place à l’industrie. 

Pour l’heure, c’est encore le temps des guérisseuses, comme Mara. Elle est vieille et n’a pas la vie facile. Les gens la sollicitent autant qu’ils la craignent. 

Et puis arrive cette jeune femme dont on ne sait rien si ce n’est qu’elle veut se cacher. Voilà qui est intrigant. Tout comme les scènes où on la voit discutant avec un loup effrayant qui semble lui dicter ses actes. Est-ce la fièvre qui la fait délirer ? Ou bien autre chose ?

L’ambiance est donc lourde dès les premières pages. La mort semble rôder partout. Le décor montagnard et la vie simple de ces gens aurait pu être apaisants. Mais le plus beau des cadres n’empêche pas les drames. C’est ainsi qu’une maladie terrible décide de s’inviter, passant sournoisement d’animaux en animaux, jusqu’à infecter des humains. 

Dans ce livre, la rage est le symbole de l’impuissance de l’homme face à la mort microscopique, mais aussi, paradoxalement, le signe annonciateur de ces découvertes qui vont faire progresser la médecine. 

Certes, nos personnages, eux, sont nés trop tôt pour cela. Ils sont encore à la merci de la maladie, comme ils sont à la merci de la rigidité d’une société conservatrice. Les interdits broient les âmes, les destins, à l’instar de Mara ou de l’inconnue, qui gardent en elles de lourds traumatismes. 

La rudesse de la vie et des codes de la société rejaillissent tout entiers sous le coup de crayon de Jaime Martin. Ses planches ont un caractère puissant, une beauté mortelle, jusque dans les couleurs qui créent une atmosphère unique. Cet album raconte avec force la dureté bien concrète de cette époque et l’aura mystique qui entourait les phénomènes que l’on ne comprenaient pas. La traversée de cette montagne sera éprouvante, soyez-en averti. 

Par Legoffe, le 16 juin 2024

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