Un tout petit bout d'elles

Yue travaille dans une concession forestière chinoise située au Congo. Lorsqu’il est en repos, il quitte l’exploitation pour aller au « Coup de bambou » afin d’y retrouver la belle congolaise Antoinette. Courtisée également par François qui œuvre dans les travaux publics, la jeune femme a toutefois une petite préférence pour Yue qui est très apprécié par sa fille Marie-Léontine. Profitant du temps présent, Antoinette bénéficie de la gentillesse de Yue et ensemble s’offre de petites soirées, au cinéma, au restaurant. Un soir, les deux jeunes gens finissent par se retrouver au lit. Lors de leurs ébats amoureux, Yue finit par découvrir la terrible mutilation intime dont Antoinette a été victime dans sa prime jeunesse. Profondément marqué par cette pratique africaine ancestrale appelée excision, le jeune forestier tente d’en comprendre les raisons. Après un temps de séparation voulu par Antoinette, les deux amants se retrouvent, cette fois-ci pour mieux se connaître et faire en sorte que cette expérience douloureuse reste figée dans le passé. Malheureusement, cette coutume est encore bien enracinée et va à nouveau frapper durement Antoinette.

Par phibes, le 6 juin 2016

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Notre avis sur Un tout petit bout d’elles

Avec ce nouveau récit plein d’humanité et après Le montreur d’histoires et Tourne disque, l’intarissable Zidrou vient clôturer son triptyque consacré à l’Afrique. Sous le couvert d’un titre particulièrement explicite, l’artiste nous offre une histoire forte basée sur la relation amoureuse entre un forestier chinois et une congolaise, relation qui aurait pu être, somme toute banale, si celle-ci ne révélait pas une particularité douloureuse.

En effet, Zidrou a souhaité, à travers l’histoire de Yue et d’Antoinette, se pencher sur une pratique ancienne africaine qui consiste à mutiler l’appareil génital de la femme sous le couvert d’une tradition culturelle. Eludant pratiquement le documentaire (pour cela, voir le dossier pédagogique sur l’excision qui suit le récit), le scénariste s’emploie plutôt à narrer simplement le relationnel affectif entre les deux personnages centraux qui va bientôt mettre à nu la terrible pratique. Confortées par le témoignage personnel de la jeune congolaise et par celui rapporté par les pairs de Yue, les péripéties ont tendance à prendre un côté didactique ô combien effrayant.

De fait, Zidrou, dans sa grande sensibilité, trouve la juste tonalité pour capter notre attention sur ce fait de société ô combien répandu dans le monde et qui se veut une atteinte à l’intégrité physique et morale des femmes. Sans tomber dans un catastrophisme à outrance mais suffisant pour alerter, l’artiste trouve le moyen d’ébranler nos certitudes en exposant le cas d’Antoinette dans des effets imparables. L’émotion est de rigueur, portée par le témoignage de la belle congolaise et également par la juvénilité de Marie-Léontine, qui nous ouvre un quotidien certes plein d’insouciance mais qui cache bien des passages douloureux. C’est ce que vont découvrir à la fois Yue et le lecteur.

Raphael Beuchot poursuit sa participation à la trilogie africaine et ce, pour notre plus grand plaisir. D’un geste adroit qui dénote là-aussi, une très grande sensibilité artistique, ce dessinateur démontre tout son talent via une représentation semi-réaliste particulièrement généreuse. Force est de constater que son trait reste assez épuré mais se veut d’une efficacité redoutable pour susciter les émotions. Ses personnages ont vraiment quelque chose de convaincant, surement dû à leur expressivité, leur naturalité rafraîchissante, leur simplicité réconfortante et leur douleur communicante.

Un excellent témoignage sur une pratique inique, dénoncée avec tact, simplicité et sensibilité par deux artistes réellement inspirés pour conter des histoires. A lire sans retenue !

Par Phibes, le 6 juin 2016

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