Un ver dans le fruit

Restigné, dans l’Indre-et-Loire, en 1962. Le jeune abbé Ferra débarque par le train pour y administrer la paroisse, il rencontre alors l’inspecteur Derien venu s’occuper d’une histoire sordide. En effet, l’un des principaux propriétaires de vignes meurt suite à une terrible explosion, provoquant commérages et rumeurs toutes aussi exacerbées les unes que les autres. Ainsi, entre querelles publiques et lettres anonymes, le jeune prêtre doit s’habituer à sa nouvelle vie à la campagne…

Par fredgri, le 24 juillet 2013

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Notre avis sur Un ver dans le fruit

Cette réédition de l’album sorti à l’origine en 97 nous ramène vers un Rabaté d’avant Ibicus. Le trait est vif, plein de matière et de vie, il dépeint une campagne pleine de terre, de rugosité, sans concession. Le portrait de ces agriculteurs et vignerons fait plus vrai que nature sous ces coups de pinceau fascinant de justesse et d’expressivité. Et le choix du noir et blanc est simplement parfait tant les planches mettent sobrement en valeur le récit lui même, les jeux de regard, les cadrage très savamment dosés. Tout est au service de l’histoire certes, mais surtout au service de ces personnages, de ces tronches que semble regarder Rabaté en souriant, tant il y a de la truculence, de l’amour derrière ces grimaces et autres petits sourires en coin !

Alors bien sur l’artiste n’épargne personne, pas même son jeune héros qui parcoure cet album de long en large, recueillant des confessions, promulguant moult conseils dans l’espoir de rassembler ses futurs ouailles. Ainsi, en plein milieu de ce village c’est le portrait de l’âme humaine qui se dessine, les idées reçues, les apriori, les défauts tels que la délation, la suspicion, la jalousie et la rivalité qui amènent les uns et les autres à s’observer, à ne rien louper, voir même à se haïr sans appel !

Rabaté garde donc cette science des petits gens, ces secrets gardés qui rongent les nuits. Beaucoup de subtilité au service d’un récit entre polar et chronique rurale qui donne la part belle à une faune locale particulièrement savoureuse. Il ponctue son scénario de scénettes qui rajoutent beaucoup de reliefs à l’ensemble. Ainsi la mère possessive et exagérément maternelle, la bonne qui connait tout les cancans, les grenouilles de bénitier qui viennent se confesser, tout se nourrit d’archétypes peut-être usés jusqu’à la corde, mais cela créé un ensemble vraiment captivant.
D’autant que derrière ce microcosme se profile toute l’étendue de l’âme humaine, ses drames, sa bassesse, mais aussi ses petits moments de simplicité plein de générosité, de partage, loin des complications, à juste boire un coup ensemble !

Cet album est un vrai régal de bout en bout, le plaisir de redécouvrir un formidable récit qu’on ne peut lâcher qu’une fois fini !

Par FredGri, le 24 juillet 2013

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