Une adaptation graphique
Working, une adaptation graphique regroupe l’adaptation de vingt-huit témoignages d’hommes et de femmes américains de tous horizons réalisés par le grand journaliste de radio Studs Terkel. Ont participé, sous la direction éditoriale de Paul Buhle et menés par Harvey Pekar, les auteurs suivants : Pablo G. Gallejo – Garry Dumm – Danny Fingeroth – Peter Gullerud – Bob Hall – Ryan Izana – Sabrina Jones – Peter Kuper – Terry LaBan – Dylan At. Miner – Pat Moriarity – Emily Nemens – Harvey Pekar – Joan Reilly, Sharon Rudahl – Nick Thorkelson – Anne Timmons et Lance Tooks.
Par melville, le 24 octobre 2010
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Scénariste :
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dessinateur :
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Éditeur :
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Sortie :
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ISBN :
9782916207438
Notre avis sur Une adaptation graphique
Studs Terkel est connu et reconnu aux Etats-Unis pour avoir été l’une des grandes figures de la gauche américaine. Mort en le 31 octobre 2008, il fut un homme politiquement engagé – même pendant les heures sombres du maccarthisme – qui a voué son travail de journaliste de radio au service de ses idéaux, au service des gens du peuple.
L’ouvrage original intitulé Studs Terkel’s Working, a Graphic Adaptation paru en 2009 chez l’éditeur américain The New Press est une adaptation en bande dessinée du livre de Studs Terkel, Working, publié pour la première fois aux Etats-Unis en 1974, puis en 2005 en France par les Editions Amsterdam. Un an après, les éditions Ça et là (en association avec les Editions Amsterdam) nous proposent la traduction de cette remarquable bande dessinée sous le titre Working, une adaptation graphique.
Tous les témoignages de ces gens ordinaires, de ces américains issus des couches sociales les plus pauvres ou de la classe dite moyenne, ont comme point commun le travail. Au cours de leur entretient avec Studs Terkel, ils livrent le regard qu’ils portent sur leurs emplois, et avec plus ou moins de recul presque tous dressent un constat bien amer : celui d’un système où les dérives capitalistes et financières sont devenues monnaie courante. Chacun à sa manière remet en cause ce capitalisme outrancié et marchand où l’individu n’a de place que comme simple rouage du système… Et là où le propos est criant de vérité et interpelle le lecteur, c’est que ces gens qui témoignent ne sont ni des politiciens, ni des économistes, ils n’ont pour la plupart même pas eu de scolarité décente. Leur témoignage est celui de gens qui vivent directement au quotidien ce qu’ils décrivent et dans leurs paroles, même si ils ne le « théorisent » pas c’est bien envers ce modèle ultralibéral qu’ils éprouvent de l’amertume ou de la rage. A aucun moment ils ne remettent en cause le fait de devoir travailler, bien au contraire, simplement ils souhaiteraient pouvoir le faire dans des conditions de respect de l’autre.
Le propos de ce livre n’est pas directement politique, mais bien motivé par un sens social fort. Toutefois quand on pousse la réflexion sur le sens du travail et sur les conditions dans lesquelles il est exercé, la politique n’est forcement jamais bien loin puisque c’est elle qui dicte le modèle économique et social.
Working, une adaptation graphique permet simplement d’aborder un monde auquel on ne peut très bien jamais avoir été confronté, et de prendre conscience de la détresse de gens à qui on ne donne que trop rarement la parole. Ensuite libre à vous d’agir.
Si il me semble difficile de ne pas être un temps soit peu ému par les propos de cet album, les témoignages de ces gens ne sont jamais racoleurs, ni démagogues car guidés par une vraie sincérité. Et encore moins « gauchisants », ce livre n’est pas un tract, ni un brulot, et j’insiste sur ce point car c’est en cela qu’il puise véritablement toute sa force.
La partie graphique en est d’ailleurs un bon exemple. Couramment la bande dessinée américaine se démarque par une recherche artistique poussée sur la mise en scène. Ici pas moins de dix-huit auteurs, dont de grands noms, se prêtent au jeu dans ce collectif avec humilité et nous offrent une véritable occasion d’admirer tout leur savoir faire.
Working, une adaptation graphique est une œuvre forte à lire aussi bien pour son propos que pour sa forme. A ne pas manquer, vraiment…
Par melville, le 24 octobre 2010