Une histoire de fantômes

A Londres, à la veille de Noël de l’année 1843, Scrooge marche dans la rue alors qu’un froid mordant sévit ardemment. Connue pour son manque d’humanité et pour sa grande richesse, elle est sollicitée par un groupe de personnes qui quêtent en faveur des déshérités. Rejetant toute participation pour une gente qu’elle déconsidère, Scrooge rentre à son officine et retrouve son employé Cratchit qui lui souhaite un joyeux Noël. Cet accès d’amabilité est mal perçu par la patronne qui voit là une demande déguisée pour obtenir un jour de congé pour le lendemain. Tout comme la prévenance de sa nièce qui, entrant dans la boutique, se voit recevoir en guise de réponse une volée de réprimandes. A toute évidence, Scrooge fuit l’esprit de Noël et lui préfère la passion du gain. Le soir venu, elle regagne son domicile afin de s’y retrouver dans sa solitude habituelle, sans aucune intention de fêter Noël. C’est dans la soirée qu’elle est témoin de l’apparition du fantôme de son ancien associé, Marley, décédé sept ans plus tôt. Celui-ci vient tenter de lui ouvrir les yeux sur son comportement cupide et lui annonce que trois esprits vont venir lui rendre visite dans la nuit pour la sensibiliser à l’humanité.

Par phibes, le 11 décembre 2022

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2 avis sur Une histoire de fantômes

Après avoir lancé sa série fantastique avec Béka (Les cœurs de ferraille) dont le tome 1er est paru en juin dernier, José-Luis Munuera enchaîne, cette fois-ci en solo, sur un autre projet, celui d’adapter l’une des nouvelles du grand romancier Charles Dickens. Cette résolution éditoriale qui met en valeur l’un des contes les plus connus tombe à point nommé puisqu’il coïncide avec la période de Noël.

Pour cela, l’artiste s’est approprié le récit de 1843 et nous le restitue dans une superbe forme imagée tout en y apportant sans le dénaturer quelques suggestions personnelles. La principale concerne le personnage central lui-même qui n’est pas le vieux Scrooge d’origine mais plutôt Madame Scrooge, une quadra certes au minois non désagréable mais à l’ambition et l’insensibilité démesurées. Fort de ce choix somme toute intéressant, le récit de toute une nuit reste des plus agréables à parcourir tant la mise en exergue des défauts de Scrooge est bien caractérisée et touche pleinement notre entendement.

Si la forme se veut indubitablement classique, le développement associé à une consistance narrative appréciable demeure de belle qualité selon un chapitrage adapté. José-Luis Munuera nous fait assister à un spectacle bien sensible et magique surtout quand le fantastique s’empare de celui-ci via des esprits « malins » qui ont le privilège de réveiller selon une certaine temporalité (avant, pendant et après) la conscience de Scrooge… et la nôtre par la même occasion.

Graphiquement, le résultat est époustouflant. L’artiste se détache complètement des illustrations de l’époque de John Leech pour nous introduire dans son univers pictural, celui qu’il maitrise au mieux, assez disneyen. Si les décors londoniens sous la neige issus d’un processus de traitement aiguisé, sont d’un réalisme et d’une beauté saisissants, les personnages se révèlent complètement dans leur générosité semi-réaliste. Même Scrooge dont la forte personnalité et ses gros défauts ne nous poussent pas à la détester entièrement. Le travail est impressionnant rehaussé par une colorisation particulièrement efficace.

Une adaptation superbe d’un très grand classique à la morale subtile qui tombe à point nommé pour se retrouver au pied du sapin. Un gros plaisir de lecture pour tous !

Par Phibes, le 11 décembre 2022

  Le Scrooge de José-Luis MUNUERA est en fait « une Scrooge ». Car dans cette adaptation de la célèbre nouvelle de Charles DICKENS, il s’agit ici d’une femme nommée Elizabeth, et non plus d’un homme.

L’auteur a créé une femme très moderne, une femme d’aujourd’hui qui se retrouve propulsée au 19ème siècle, avec un caractère bien trempé, glaciale au possible, un « brin » capitaliste et au phrasé très irrévérencieux ! Cette Scrooge est tout autant sans cœur que le Scrooge original – cinglante aussi et, bien sûr, cupide. Mais cette femme rebelle en diable, battante, déterminée, pour ne pas dire dure à cuire, a aussi de la répartie et le sens de l’a propos.

Le dessin est tout autant déterminé que Scrooge elle-même. Un trait adapté à chacun des personnages, selon leur personnalité, avec de la rondeur pour la nièce et le petit Tiny Tim ou de l’anguleux pour Elizabeth … La palette de couleur oscille entre les tons chauds et la froideur. Le fantastique est omniprésent sur presque chaque planche. Et certaines cases, assez sombres, nous transportent sans mal dans l’univers fantasmagorique de l’auteur.

Cette histoire de fantômes revisitée par José-Luis MUNUERA nous mène certes au 19ème siècle mais avec un personnage principal bien ancré dans le monde d’aujourd’hui, grâce à cette vision très féministe de Scrooge. La ténacité et la liberté affirmée de cette femme fait du bien !

Par Céline 1, le 2 janvier 2023

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