Vingt Décembre

Alors qu’il est encore adolescent, Edmond Albius, esclave et amoureux des plantes, découvre le procédé artificiel de  fécondation de la vanille. Sa trouvaille va faire la fortune des propriétaires de l’Ile de la Réunion. Cela l’aidera-t-il, quelques années plus tard, lorsque la République est proclamée ? La France va-t-elle réellement abolir l’esclavage ? C’est l’effervescence et l’espoir pour les uns, l’inquiétude pour les autres.

Par legoffe, le 21 janvier 2024

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Notre avis sur Vingt Décembre

Appollo et Tehem se passionnent pour l’Histoire de leur île. A l’occasion d’une résidence d’artiste aux Archives de la Réunion, ils ont imaginé ce récit qui raconte le destin d’Edmond Albius, mais, surtout, à travers lui, les bouleversements qui suivent la fin de l’esclavage. L’album rend également hommage à un pionnier de la bande dessinée, un vrai visionnaire voici 175 ans !

Nous remontons donc le temps avec les auteurs, jusqu’au milieu du XIXe siècle, dans une île dont l’exotisme fait rêver. Mais cela n’a pas toujours été le cas, en particulier pour ceux qui y étaient amenés d’Afrique en tant qu’esclaves, ou ceux qui, plus tard, arriveraient d’Inde pour remplacer la main d’oeuvre gratuite par une autre bien mal payée.

Parler de la fin de l’esclavage, c’est évoquer la maltraitance et l’injustice, et l’éternel histoire humaine, composée de dominants et de dominés, qui est toujours en cours, malheureusement. 

La BD évoque toutefois cette inhumanité avec le style plutôt cartoonesque de Tehem – et des couleurs gaies – ce qui évite au livre de tomber dans la noirceur. De là à faire perdre un peu de force au propos ? Ce n’est pas impossible, même si les auteurs évoquent toute la dureté de l’époque sans équivoque. 

Edmond, par ailleurs, n’est pas traité en profondeur dans le livre. Il dégage une certaine naïveté, sans doute du fait d’un manque de connaissances sur sa pensée et sa personnalité. Il faut dire que les propriétaires blancs n’ont évidemment pas beaucoup documenté la vie d’un homme né esclave et qui avait réussi à trouver un procédé que n’étaient pas parvenus à découvrir ceux qui se considéraient de race supérieure. 

Il est, à ce sujet, intéressant de savoir comment la vanille est devenue une production commerciale.

Le livre met en scène de nombreux personnages. Le lecteur ne peut être que touché par le récit et le destin de ces femmes et ces hommes happés par le système d’exploitation des plus faibles par les plus riches. 

L’ouvrage est également l’occasion de mettre en lumière une des premières « bandes dessinées » au Monde, née avec la fin de l’esclavage, en 1848, à la Réunion. En effet, le journal La Lanterne Magique traitait l’actualité par l’illustration. Une idée venue de Martial Potémont, débarqué sur l’île à 19 ans, en 1847. Le clin d’oeil à cette aventure journalistique et artistique est intéressant. Il aurait d’ailleurs mérité d’être approfondi, en évoquant notamment le rôle que le journal a pu avoir dans l’île, ou comment ses publications ont été perçues à l’époque.

Cet album nous éclaire de manière très vivante sur ce pan de l’Histoire de l’esclavage en France. Une initiative salutaire, d’autant qu’il n’existe pas tant d’ouvrages sur le sujet, contrairement aux Etats-Unis.

Par Legoffe, le 21 janvier 2024

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