Voyage à Uroshima

 Du même auteur ont déjà été publiés en France "Don Giovanni" (Casterman 1996), "Le jour du loup" (Casterman 2004), "Bienvenue au Gamurakan" tomes 1 et 2 (Casterman 2005). Vient le tour de "Voyage à Uroshima" en 2006. Ces 3 derniers titres sont parus dans la collection Sakka dirigée par Frédéric Boilet depuis janvier 2004. "Voyage à Uroshima" a été originellement prépublié au Japon en épisodes dans le magazine "Manga Erotics" entre 1999 et 2000 ; cette manga en cotoyait d’autres, réalisées par Frédéric Boilet (qui me disait, en 1997 dans un entretien toujours disponible sur son site, tout le bien qu’il pensait justement de Yoji Fukuyama…), Yamada Naïto, etc. Du beau monde du milieu de la manga plus ou moins alternative et érotique. Fukuyama, lui, a un dessin plus classique mais très solide ! Ses personnages sont très expressifs également.

 Yôji Fukuyama, né en 1950, débute en 1970 avec "Naya no naka" édité par Futabasha. Au fil des ans, dans un style devenu proche de celui d’Otomo, il développe un ton fantaisiste, bourré d’énergie. La fuite en avant de ses personnages où les événements font boule de neige jusqu’à la folie ou l’apaisement final, le rythme effréné de ses récits, sont devenus une des marques de son style narratif. Une bonne dose d’humour assez délirant, mais dans un contexte réaliste, complète ces éléments définissant son style.

 "Voyage à Uroshima" est une fable érotique, bizarre, décapante ainsi que drôle. Inspirée du conte "Urashima Tarô", célèbre conte traditionnel au Japon dans lequel un pêcheur découvre un royaume sous-marin où le temps est arrêté et où règne ce qu’il croit être le bonheur, Fukuyama le détourne pour en faire un récit érotique dans lequel un homme se perd dans ses fantasmes… Fantasme d’un pays où l’on peut faire l’amour à tout bout de champs avec n’importe qui (désinhibition totale) et où il devient même un véritable Don Juan (alors qu’il est frustré dans la vie ordinaire), mais crainte de l’impuissance (il n’arrive jamais à ses fins avec celle qu’il a choisie) ou pire encore de la castration – au sens propre – !…

 Chacun tirera la morale qu’il veut de cette étonnante histoire. En tout cas, il serait dommage de passer à côté d’ Uroshima sans s’y arrêter ne serait-ce qu’un moment…

Par François Boudet, le 1 septembre 2006