Exposition - Salon

Exposition Batman – Angoulême 2019

Du 24 au 27 janvier 2019

CRIME ALLEY – LES ORIGINES

UN NOUVEAU HÉROS POUR UN NOUVEAU SUPPORt

En couverture du numéro 27 de _DETECTIVE COMICS_, daté de mai 1939, apparaît un étrange personnage. Surgissant dans le ciel nocturne de Gotham City, il saisit un malfaiteur tandis qu’il est lui-même visé par deux autres truands postés sur un toit avoisinant. Son nom ? Batman ! Ou plutôt « le » Batman : un mystérieux _vigilante_ qui fait régner la terreur dans le cœur des criminels et qui représente une figure littéraire née un an plus tôt : celle du super-héros.

Superman avait en effet pris d’assaut les kiosques à journaux américains, dans le numéro 1 d’_ACTION COMICS_ daté de juin 1938. Alors que ce dernier agit sans masque, est surpuissant, résiste aux balles, et porte un costume aux couleurs primaires chatoyantes, Batman, lui, avant masqué, endossant une panoplie noire et grise rehaussée d’une cape et d’un masque qui lui donnent des airs de démon. Surtout, et c’est ce qui fera la différence avec ses autres collègues justiciers, Batman ne dispose d’aucun superpouvoir sinon son intelligence redoutable et sa volonté inébranlable. C’est grâce à elles que Bruce Wayne, son alter ego, s’est entraîné jusqu’à devenir le plus grand détective au monde, doublé d’un combattant hors pair.

Son apparition consolide la présence des _comic books_ sur le marché américain : ces revues bon marché, héritières des _pulps_, répondent à l’attente d’un lectorat qui, à la fin des années 1930, subit toujours l’impact de la crise économique de 1929, que le dernier plan de relance du président Roosevelt n’a pas su endiguer. Au départ constitués de _comic strips_ parus d’abord dans les journaux, les _comic books_ proposent rapidement des séries inédites. Du fait du succès de _Superman_ et _Batman_, le concept de super-héros s’impose avec une telle puissance qu’il devient en quelques année synonyme de bande dessinée aux Etats-Unis.

LES CRÉATEURS

UN HÉROS COMPOSITE

C’est le succès de Superman qui engendre la création de Batman : en 1939, le responsable éditorial VIN SULLIVAN recherche un personnage capable de reproduire cet exploit dans les pages de _Detective Comics_. Le dessinateur BOB KANE propose alors un projet qu’il a conçu avec l’aide du scénariste BILL FINGER : à eux deux, ils ont déjà réalisé quelques séries pour l’éditeur, comme _Rusty and His Pals_ pour _Adventure Comic_, et _Clip Carson_ pour _Action Comics_. Les deux auteurs vont utiliser l’idée de départ de KANE, qui pense appeler son héros « Bird Man », le vêtir d’un costume bleu et rouge, et l’affubler d’aile d’oiseau. BOB KANE se rappelle avoir vu, enfant, des dessins de machines volantes de Léonard de Vinci, aux ailes évoquant celles de chauve-souris. Il puise également dans ses souvenirs du film _The Bat Whispers_ (Roland West, 1930), qui met en scène un tueur au costume de chauve-souris, tout en songeant au _Signe de Zorro_ (Fred Niblo, 1920), avec DOUGLAS FAIRBANKS dans le double rôle du justicier masqué et du playboy falot Don Diego.

Prenant conseil auprès de BILL FINGER, BOB KANE fait évoluer graphiquement le personnage : il lui dessine un masque complet couvrant le haut du visage qui évolue les oreilles des chauve-souris. Il suggère également que les couleurs primaires, bleu et rouge, soient remplacées par du gris et du noir teinté de bleu, que les ailes deviennent une cape, et que les yeux ne soient pas apparents derrière le masque, ne laissant que des interstices blancs.

TRAVAIL D’ÉQUIPE

En terme d’écriture pour ses premières aventures, BILL FINGER s’inspire très nettement des pulps, ces publications bon marché présentant des récits de genre (crime, horreur, fantastique, …) qui font florès chez les marchands de journaux. Un personnage en particulier fait forte impression sur FINGER : le Shadow, un justicier impitoyable aux méthodes expéditives qui élimine les rangs des la pègre de Ne-York, épaulé par une horde d’assistants.

Très vite, Batman remporte l’adhésion des lecteurs. Dès 1940, en plus des douze pages mensuelles de _Detective Comics_, quatre épisodes supplémentaires sont proposés dans une nouvelle revue _Batman_. Le personnage est également au sommaire du trimestriel _World’s Finest Comics_, l’ensemble des titres étant supervisé par WHITNEY ELLSWORTH puis JACK SCHIFF. De 1943 à 1946, un strip de presse quotidien viendra s’ajouter à cette production déjà importante. De 1939 aux années 1960, pour l’aider dans sa tache, _Bob Kane_ embauche des assistants dont SHELDON MOLDOFF, JERRY ROBINSON, ou LEW SAYRE SCHWARTZ. De leur côté, les éditeurs de DC, SCHWARTZ, DON CAMERON, JOE SAMACHSON ou JOSEPH GREENE, et à des dessinateurs comme JACK BURNLEY, DICK SPRANG, RAY BURNLEY ou WIN MORTIMER. Les encreurs GEORGE ROUSSOS et CHARLES PARIS assurent, quand à eux, l’homogénéité du style qui perdurera jusqu’en 1964, quand l’éditeur JULIUS SCHWARTZ et le dessinateur CARMINE INFANTINO modifieront l’apparence du justicier et débuteront l’ère du Batman « New Look ». La longévité du héros va ainsi de pair avec sa capacité à s’adapter au fil des ans et à refléter les évolutions sociales et artistiques du monde qui l’entoure.

UN CRIME DANS LA NUIT

Bruce Wayne est le fils de Thomas et Martha Wayne, un couple de la haute société de Gotham City. Thomas, chirurgien de renom, est le dernier héritier d’une famille qui a contribué à développer et faire prospérer la ville. Martha est également issue de la bourgeoisie de Gotham. Élevé dans un environnement privilégié, choyé par ses parents et promis à un avenir radieux, le jeune Bruce a vu sa vie à jamais brisée par un drame auquel nul ne s’attendait.

Un soir, en sortant du cinéma, les Wayne traversent l’avenue de Park Row, surnommée « Crime Alley ». Un agresseur sort de l’ombre, une arme à la main, réclament de l’argent et le collier de perles de Martha. Thomas Wayne s’interpose, deux coups de feux partent. Devant les yeux horrifiés de l’enfant, le couple s’écroule, sans vie. À partir de ce moment, le jeune Bruce n’aura plus qu’une idée en tête : châtier les criminels et protéger les innocents.

LA PEUR COMME UNE ARME

Dès son plus jeune âge, Bruce est terrifié par une image, celle d’un animal, d’un prédateur nocturne qui hante la caverne dans laquelle il est tombé étant enfant. Il sait que sous le manoir de ses parents se trouve un dédale de grottes qui abritent des centaines de chauves-souris. L’une d’entre elles traverse un soir la fenêtre du salon où Bruce s’interroge sur la manière la plus efficace de combattre le crime. « _Les criminels sont lâches et superstitieux, il faut que je trouve un moyen d’inspirer la peur_ ». L’arrivée de la créature ailée va sceller à jamais son destin : désormais, Bruce sera une chauve-souris.

Comme tous les grands mythes de la culture populaire, la scène des origines de Batman sera racontée de multiples fois au gré des quatre-vingts ans d’existence du héros. L’image d’un enfant apeuré, rendu orphelin de la manière la plus brutale qui soit, est suffisamment frappante pour ne pas se trouver entamée par les différences entre ces multiples versions. Qu’importe, au fond, l’époque à laquelle se joue le drame, que l’identité du meurtrier soit connue ou non, que Martha Wayne ait succombé d’une balle ou d’une attaque cardiaque après la mort de son mari … Le crime a définitivement brisé l’existence du jeune Bruce. Il ne lui reste plus désormais qu’à se reconstruire.

BATMAN, HÉROS ESSENTIALISTE

DE NOMBREUX MAÎTRES

Après avoir fait le serment de venger la mort de ses parents et d’empêcher qu’un tel drame se produise à nouveau, _Bruce Wayne_ entame une longue quête qui va l’amener à se recréer et à se forger une nouvelle identité. Entre la fameuse « visite » de la chauve-souris et sa renaissance en _Batman_, il se déroule un laps de temps conséquent qui voit Bruce passer par l’adolescence et entrer dans l’âge adulte. Ces années de deuil et d’errance sont aussi celles d’un douloureux apprentissage qui va l’emmener aux quatre coins du monde afin de pousser son corps et son esprit aux limites de ce dont un être humain est capable … voire au-delà.

Au fur et à mesure des années, les différents scénaristes et dessinateurs de Batman vont imaginer les multiples étapes de ce parcours et ajouter de nombreux éléments au mythe : des mentors, des rivaux mais aussi des rencontres fortes qui vont marquer son apprentissage. La jeunesse de Bruce Wayne, loin d’être narrée de façon rigoureuse et homogène, se compose de mille fragments, selon l’époque où elle est relatée et selon les envies des auteurs. On découvre ainsi qu’il a tout appris de la chasse à l’homme auprès d’_Henri Ducard_, un détective privé français, que le magicien_ John Zatara_ lui a enseigné l’escapisme et la prestidigitation, que le vieux maître _Kirigi_ a fait de lui un combattant implacable, ou que l’inspecteur _Harvey Harris_ a vu en lui en enquêteur hors pair.

UNE IDÉE DE LA PERFECTION

Chacun de ces professeurs enrichit la légende du héros, en tant que « _pinacle de la condition physique et mentale_ ». Cette idée de la perfection permet paradoxalement d’expliquer l’attrait des lecteurs et spectateurs pour Batman – un attrait d’expliquer jusqu’à l’identification. Contrairement à la plupart des super-héros, Batman doit sa force et ses compétences à sa seule volonté : il n’est pas un extraterrestre ou un immortel, il n’a pas acquis de pouvoirs par accident ou d’armes venues de l’espace, il n’a pas muté et n’utilise pas de sorts magiques. Batman est le plus humain des super-héros, c’est un héros essentialiste en qui chacun peut se reconnaître : avec un entraînement rigoureuxn un mental de fer (et un compte en banque bien rempli…), nous pouvons tous imaginer accomplir les mêmes exploits que le héros … ou trembler face à ses pires échecs.

MANOIR WAYNE – ALFRED

ENFANCE SOLITAIRE

Le Manoir Wayne est le lieu où le jeune Bruce a été élevé par son majordome, _Alfred Pennyworth_. C’est en tout cas l’histoire officielle telle qu’elle a été révisée à partir des années 1980. auparavant, Bruce passe par un tuteur et Alfred n’arrive à son service qu’à l’âge adulte, alors que Batman et Robin sont déjà actifs. Le Manoir est également le lieu où l’on trouve les tableaux représentant les différents ancêtres de la famille Wayne, tous liés à la légende de Batman. Dans les années 1970, Bruce et Alfred quittent un temps le Manoir pour un penthouse situé en centre-ville : cette « garçonnière » permet à Batman d’être au cœur de la ville qu’il défend et de consacrer plus de temps à la Fondation Wayne, l’organisation caritative héritée de ses parents.

LES FANTÔMES DU PASSÉ

Le manoir abrite les vestiges de la famille Wayne et notamment, les nombreux portraits des ancêtres de Bruce. Au fil des décennies, la description du lieu s’est développée et celui-ci a gagné en stature : c’est désormais une imposante bâtisse ; une propriété comparable au Xanadu du _Citizen Kane_ d’ORSON WELLES (1941). Loin d’être une simple résidence, elle symbolise la démesure du deuil du héros : les portraits de ses parents se font de plus en plus gigantesques, tout comme les pièces innombrables du Manoir, et des salles secrètes y sont découvertes, inconnues même de Dick, Damian et Alfred, lors de l’attaque des homme du Dr Hurt (_Batman & Robin #10 à 12_, en 2010). Dans _The Dark Knight Returns_, c’est le dernier lieu à tomber, volontairement incendié par Alfred afin de cacher les secrets de Bruce Wayne, Tandis que ce dernier maquille son décès et « renaît » au sein même de sa Batcave. Le Manoir est donc le dernier lien entre l’orphelin devenu justicier et sa famille, même si sa vraie demeure est désormais la Batcave, révélatrice de son évolution en tant qu’homme et justicier.

ALFRED, DU MAJORDOME AU PÈRE DE SUBSTITUTION

Alfred, le majordome dévoué de Bruce Wayne, arrive au Manoir dans le n°16 de _Batman_, en avril-mai 1943. Son épisode d’introduction est écrit par DON CAMERON et dessiné par BOB KANE et JERRY ROBINSON, qui présentent le ventripotent serviteur comme le fils de l’ancien valet des Wayne, désireux de reprendre le flambeau. Mais Alfred est également un acteur de théâtre et un détective amateur. C’est d’ailleurs en tentant d’échapper à deux voleurs qu’il découvre le secret de la double identité de son nouvel employeur. Bruce décide alors de garder ce majordome et accompagnés de Robin, ils vont désormais livrer ensemble leur guerre au crime.

Peu de temps après cet épisode, débute le premier serial de Batman : ce feuilleton diffusé au cinéma est la première adaptation filmée des aventures du héros, et Alfred fait partie de la distribution. Or, celui-ci n’a pas les traits rondouillards du personnage croqué par KANE et ROBINSON : il est svelte et porte une fine moustache. Dès lors, décision est prise pour les auteurs de la bande dessinée de claquer le physique d’Alfred sur son interprète, WILLIAM AUSTIN. Un épisode qui le voit s’amincir (_Detective Comics_ #83 de janvier 1944) sert d’explication à la « métamorphose » du personnage. Par la suite, de 1944 à 1945, Alfred aura droit à sa propre série, principalement dessinée par JERRY ROBINSON, dans les pages du mensuel _Batman_.

Alfred disparaît de 1964 à 1966 : les auteurs le remplacent durant cette période par la tante de Dick Grayson, Harriet Coope qui habite dans le Manoir en ignorant tout de la double-identité de nos héros. Cette Tante Harriet est d’ailleurs l’un des personnages principaux de la série télévisée de l’époque. Alfred revient à la vie dans une histoire abracadabrante qui le voit, amnésique, endosser la panoplie du criminel l’Outsider.

Avec _The Dark Knight Returns_, en 1986, FRANK MILLER établit qu’Alfred a élevé Bruce et était donc au service des Wayne au moment de leur décès. C’est cette version qui demeure encore aujourd’hui officielle, même si le passé du majordome se fait plus complexe avec le temps. Les lecteurs apprennent ainsi qu’il était un ancien membre des services secrets britanniques, et que cet entraînement lui a bien servi aux côtés de Bruce devenu le justicier de Gotham. Comme de nombreux personnages secondaires évoluant avec les années, Alfred a été à la fois un comparse comique et cliché et un personnage à la forte charge symbolique, parfois père de substitution du héros.

THOMAS WAYNE

LE « PREMIER » BATMAN

la figure de Thomas Wayne a son importance particulière dans la mythologie batmanienne. Au cours d’un bal costumé (où Thomas porte une tenue d’Halloween, dont son fils s’inspirera), les homme du gangster Lew Moxon viennent cherche le médecin pour qu’il porte secours à leur chef, qui vient de recevoir une balle dans l’épaule. Thomas finira par témoigner contre Moxon, qui en représailles embauchera Joe Chill pour abattre les Wayne. Thomas est donc à la fois le modèle de Bruce en tant que justicier mais aussi le responsable indirect de son tragique destin, deux idées qui vont être explorées au fil des années.

DR HURT

En 2008, le scénariste Grant Morrisson a mélangé la figure de Thomas Wayne à celle d’un personnage secondaire d’un épisode des années 1960, pour délivrer un nouveau et fantastique vilain : le docteur Hurt. Ce dernier utilise le costume de Thomas Wayne pour déstabiliser le héros et le faire douter de sa mission. L’idée d’un « mauvais » père est au centre de l’intrigue : ce dernier aurait manipulé les autorités et Joe Chill afin de se débarrasser de sa femme pour s’adonner à ses pires vices. Cet arc est représentatif de la déconstruction des héros, tendance postmoderniste en vogue depuis les années 1980, consistant à prendre ce que les lecteurs considèrent comme certain et immuable pour le pervertir, afin de faire réfléchir sur la nature même de la fiction.

LE BATMAN DE FLASHPOINT

alors que Thomas Wayne a été dépeint comme un criminel potentiel, il a aussi été reconsidéré en Batman dans un univers alternatif de la série : celui que le super-héros Flash a engendré en tentant d’empêcher l’assassinat de sa propre mère. Dans cet univers surnommé « Flashpoint », et la série du même nom écrite par Geoff Johns et dessinée par Andy Kubert en 2011, Thomas Wayne voit son fils abattu dans Crime Alley, et il utilise sa fortune colossale afin de devenir Batman : un justicier encore plus redoutable que ne l’est Bruce, puisque Thomas n’a pas le même code d’honneur, et évolue dans un monde au bord de la guerre entre les Atlantes et les Amazones. Comme les lecteurs qui ont grandi avec les comic books. Bruce voit en son père un héros, voire un super-héros, et l’idée de montrer littéralement Thomas comme un « Premier Batman » résonne bien avec la culture populaire actuelle.

LA BATCAVE

À l’origine Batman avait installé ses quartiers dans une étable délabrée attenante au Manoir Wayne. Jusqu’au jour où Bruce découvre par accident une caverne sous la propriété. Les premiers temps, il y range simplement son équipement. Mais rapidement, il scelle la majorité des accès, crée des entrées dérobées, creuse le limon et transforme la grotte en base opérationnelle : _la Batcave_. Le premier plan est publié en 1948, dans le n°48 de Batman. La caverne ne compte alors qu’un niveau, c’est encore un simple tunnel. À partir des années 1950, la Batcave s’étoffe avec un second niveau. Dans les années 1960, elle gagne un accès maritime, un atelier et des ascenseurs. Puis, dans les années 1970, Dick Grayson/Robin s’inscrit à l’université et Bruce Wayne décide de déménager du Manoir Wayne, situé au calme en périphérie de Gotham, au 1007 Mountain Drive, en plein cœur du centre économique, dans un penthouse construit au sommet du bâtiment de sa Fondation. Durant dix ans, la Fondation Wayne abrite tous les équipements de Batman et devient la nouvelle base opérationnelle du héros.

Dans les années 1980, Bruce regagne le Manoir Wayne et y réinstalle l’attirail du Chevalier Noir. C’est au milieu de cette décennie que la mythologie commence à être réinventée. Bruce Wayne ne découvre plus la caverne adulte, un fois sa carrière de justicier lancée, mais dès l’enfance, avant même que ses parents soient assassinés. Si la Batcave reste construite sur deux niveaux, elle gagne une salle de sport ultra perfectionnée, et surtout, un ordinateur à la pointe de la technologie doté d’une base de données unique au monde. La seule porte dérobée du Manoir est située dans le bureau de Bruce, derrière une horloge qui déclenche le mécanisme d’ouverture lorsque l’on positionne les aiguilles sur 22h47, l’heure exacte à laquelle les parents de Bruce ont été assassinés.

Mais la Batcave est aussi l’endroit où naît le lien entre Batman et Robin. Bruce y recueille le jeune _Dick Grayson_ pour en faire son assistant dans sa lutte contre le crime : Dick y devient Robin – le premier d’une longue lignée. Elle est également le lieu où _Ra’s al Ghul_ se présente à Batman et lui révèle qu’il connaît son identité secrète. On assiste aussi à un moment décisif quand Bruce montre la Batcave à son fils _Damian Wayne_, également petit-fils de Ra’s.

Au-delà de ses véritables parents et de Robin, Batman se constitue son pool de justiciers, « famille » étendue qui va des différentes Batwoman et Batgirl à des groupes de héros comme les Outsiders, en passant par des justiciers solitaires comme Orphan, Spoiler, ou encore Azrael. Au final, manoir, Batcave et famille sont intimement liés : ainsi, quand le _Joker_ lance sa pire attaque contre la famille de Batman, le combat se déroule une fois encore dans les entrailles des grottes qui mènent au repaire du héros.

LA BATCAVE, LIEU DES TROPHÉES

La Batcave située sous le Manoir est liée à un trauma d’enfance de Bruce, peu de temps avant l’assassinat de ses parents, il tombe dans une caverne et, avant d’être secouru par son père, il y aperçoit pour la première fois l’animal qui deviendra son symbole, la chauve-souris. La Batcave est aussi le lieu ou Batman accumule les trophées et souvenirs de ses aventures passées ainsi que ses différents véhicules : Batmobile, Batplane, Batmoto, etc …

Elle devient une sorte de parc d’attraction, reflet de la démesure autant que de la dimension ludique du héros.

On y trouve ainsi un Penny géant, un dinosaure mécanique, une carte géante du Joker. En revanche, son design et sa forme ont varié de nombreuses fois selon les artistes l’ayant représentée mais également selon les époques et les tendances. Ces dernières années, l’accent a été mis sur l’ordinateur surpuissant et sa base de données exhaustive, le laboratoire d’analyse dernier cri, et plus encore, sur les nombreuses mesures de sécurité supplémentaires destinés à parer à toutes les catastrophes, que ce soit une attaque humaine ou tremblement de terre.

LA BATMOBILE

la Batmobile est le véhicule le plus connu de Batman : autrefois simple automobile rouge lui servant à se rendre au cœur de l’action, elle est devenue au fil des ans l’expression de la sa lutte contre le crime. Furtive, dotée d’un armement évolutif, elle est aussi décorée à l’image de son propriétaire : pendant des années, la Batmobile aura ainsi un bélier en forme de masque du héros sur l’avant et des ailerons sur les côtés ou à l’arrière. Frank Miller, dans The Dark Knight Returns, en donnera une vision dantesque en un char de combat anti-émeutes. D’autres versions la montrent traversant les rues de Gotham sous la forme d’un puissant dragster.

UNE MULTITUDE DE BAT-ENGINS

tout chevalier se doit d’avoir une monture et pour Batman, sa lutte contre le crime passe par de nombreux engins aériens, amphibiens ou tout ce qui capable de lui faire traverser les quatre coins de Gotham en un rien de temps. On trouve ainsi des ailes volantes qu’il conçoit lors de ses premières aventures mais aussi des batplanes, bat-copter, bat-boat et même une bat-fusée. Mais la livraison de ces engins de pointes ne remplacent pas sa fidèle Batmobile.

LES ALLIÉS

ROBIN

Étonnant de songer que, durant près de trente ans, Batman et Robin ont été inséparables. Et pourtant : depuis l’apparition de Dick Grayson en 1940, grâce aux talents de BILL FINGER, BOB KANE et JERRY ROBINSON dans _Detective Comics #38_, jusqu’au _Batman #217_ de décembre 1969, réalisé par FRANK ROBBINS et IRV NOVICK, le fidèle acolyte a accompagné le Chevalier Noir dans toutes ses aventures.

DICK GRAYSON

Fils d’acrobates et enfant de la balle, Dick Grayson a connu le même drame que Bruce Wayne puisque ses parents ont été tués par un criminel lors d’une représentation. Fidèle acolyte jusqu’aux années 1960, il devient le leader des Teen Titans et quitte le Manoir Wayne pour l’université d’Hudson dans les années 1970. S’émancipant peu à peu de son mentor, il prend le nom et le costume de _Nightwing_ en 1984, dans _Tales of the Teen Titans #44_, réalisé par MARV WOLFMAN et GEORGE PÉREZ. Il remplace également par deux fois Bruce dans le costume de Batman.

JASON TODD

Devenu Robin dans _Batman #366_, réalisé par GERRY CONWAY et DON NEWTON en 1983, Jason Todd connaît un destin tragique lorsque DC Comics soumet aux lecteurs la possibilité de le sauver ou non d’une explosion orchestrée par le Joker. Jason meurt dans l’arc Un deuil dans la famille, écrit par JIM STARLIN et dessiné par JIM APARO, mais est miraculeusement ressuscité en 2005 par JUDD WINICK et DOUG MAHNKE quand il adopte l’identité et les méthodes radicales du Red Hood.

CARRIE KELLEY

Dans le futur sombre de _Dark Knight Returns_ inventé par FRANK MILLER, Bruce Wayne recueille une jeune adolescente nommée Carrie Kelley qui devient son assistante en le sauvant du gang des Mutants. Depuis, Carrie aura changé de surnom pour celui de Catgirl et même de Batgirl après avoir remplacé un temps son mentor dans le costume même de Batman !

TIM DRAKE

Introduit par MARV WOLFMAN et PAT BRODERICK dans la saga _Batman Année Trois_ en 1989, Tim a découvert l’identité secrète de Batman en utilisant ses dons de détective. Comme Dick Grayson avant lui, il a pris la tête du groupe de jeunes héros, les Teen Titans.

DAMIAN WAYNE

Le fils de Bruce Wayne et de Talia al Ghul a fait irruption dans _Batman #655_, écrit par GRANT MORRISON et dessiné par ANDY KUBERT en 2006. Damian est à la fois aussi bravache que Jason et aussi brillant que Tim : associé un temps à Dick Grayson, alors Batman, il est appelé lui-même à devenir un jour le tenant du titre, même si cet avenir paraît bien dantesque

CAT WOMAN

ÂME SŒUR OU ÂME DAMNÉE ?

Depuis 1940, Batman (et non Bruce Wayne) est séduit par un personnage fort et avant-gardiste, l’alter-ego féminin du héros : Selina Kyle dite Catwoman, une voleuse-née qui agit parfois également du côté de la loi et n’a de cesse de tester les limites du justicier. Dès leur premier rencontre (_Batman #1_, en 1940), le justicier et la cambrioleuse se tournent autours, et le Chevalier Noir laisse échapper la belle volontairement, certain que leurs routes sont appelées à se recroiser.

Dans les années 1950, Batman tente de convaincre Catwoman de rejoindre le bon côté de la barrière et de mettre à profit ses liens avec la pègre pour mettre à mal les criminels. Mais l’adrénaline et l’attrait pour l’aventure l’emporteront, et Catwoman retournera vite à ses mauvaises habitudes.

Comme d’autres vilains classiques, Catwoman doit attendre les année 1960 et l’avènement de la série TV pour faire son grand retour. Dans cette adaptation, la tension entre le justicier et la criminelle grimpera d’un cran, portée par l’interprétation de JULIE NEWMAR durant les deux premières saisons. Dans les années 1970, à l’instar de Batman, Catwoman opère un retour aux sources retrouvant son costume mauve et vert des années 1940. Selina Kyle en profite pour se rapprocher de Bruce Wayne et au tournant des années 1980, le duo Batman et Robin devient brièvement un trio.

Après une première série dans les années 1990 où elle mène une vie de voleuse globe-trotter. ED BRUBAKER et DARWYN COKE, qui inaugurent un mensuel en 2002, ramènent Selina Kyle dans les quartiers chauds de Gotham. Endossant un nouveau costume, elle aide les plus pauvres et les plus démunis tout en affrontant les criminels de la haute société : la série témoigne ici d’un regard sociologique intéressant sur la vie des oubliés du Rêve Américain et sur les raisons qui peuvent pousser à une vie de crime, de prostitution ou d’addiction.

Récemment le scénariste TOM KING a repris les destinées de Batman dans un nouveau bimensuel, et a établi comme point central de ses intrigues la relation entre le détective et la voleuse. Il offre même un sens à leur chassés-croisés incessants. Catwoman teste en réalité Batman et le force à s’endurcir. Venu d’un milieu privilégié, Bruce Wayne ne comprend pas d’instinct les codes et les dangers des bas-fonds, tandis que l’orpheline Selina Kyle en a fait son terrain de chasse privilégié. C’est par amour qu’elle le défie perpétuellement et c’est également par amour qu’elle accepte sa demande en mariage : une cérémonie pour le moins mouvementée.

BAT GIRL

La plus fameuse des justicières à avoir accompagné Batman et Robin dans leur croisade est bien entendu Batgirl, la propre fille du Commissaire Gordon : Barbara. Apparue dans _Detective Comics n°359_, en janvier 1967, elle annonce sa présence dans la série télévisée ou elle est interprétée par YVONNE CRAIG. Une première « Bat-Girl » éphémère aura auparavant été présente dans les titres de 1961 à 1964.

Après une période en solo ou en duo avec Robin dans les années 1970, Barbara connaît un destin tragique, étant grièvement blessée par le Joker dans le mythique _Killing Joke_ d’ALAN MOORE et BRIAN BOLLAND. Paralysée, Batgirl mettra à profit ses talents en informatique et en renseignements sous le pseudonyme d’Oracle, afin d’épauler le Suicide Squad puis la Ligue de Justice, et elle formera même sa propre équipe : les Birds of Prey, association de justicières férues d’enquêtes et d’espionnage. Le costume de Batgirl est, durant cette période, délivré à Cassandra Caïn, une combattante muette hors pair, puis a Stéphanie Brown, connue jusqu’alors sous le nom de spoiler.

LA FEMME DANS L’UNIVERS DE BATMAN

Bruce Wayne est également un playboy mondain, membre de la haute société de Gotham, et ses conquêtes féminines reflètent, comme la ville où celles-ci évoluent, la place de la femme dans la société américaine : des indépendantes carriéristes du début des années 1940 aux éternelles fiancées des années 1950 en passant par les femmes libérées des années 1970, les personnages féminins sont aujourd’hui les égales en terme d’importance narrative et de prestance dans l’action. La place prise par Catwoman au film du temps atteste de cette montée en puissance : la femme-chat est désormais la moitié de Batman, celle qui est capable de le défier autant que de l’épauler.

DES ANNÉES 1940 AUX ANNÉES 1970

Dès ses débuts, en 1939, Bruce Wayne est dépeint comme un playboy mondain, un célibataire par ailleurs entierement dévoué à sa lutte contre le crime. Contrairement à d’autre personnages de l’époque, il n’a pas de partenaire féminine qui le suit dans ses aventures (comme le Shadow, Flash Gordon ou Hawkman). On lui connaît dans quelques épisodes une petite amie commée Julie Madison, qui disparaît très vite, poursuivant une carièrre d’actrice à Hollywood sous le nom de scène de Portia Storme. Julie Madison sera remplacée un temps par Linda Page, une autre jeune héritiere, mais elle aussi ne fera qu’un passage éclair dans la vie mouvementée de Bruce Wayne

Pendant un temp, les personnages feminins seront assez peu nombreux dans les séries consacrées à Batman ; difficile, en effet, de jongler entre les demandes de la censure du Comics Code Authority, mis en place dès 1954, et la nécessité de concentrer l’action dans les douze pages allouées par épisode, d’autant que les histoires ne sont pas à suivre. Tout juste note-t-on quelques apparitions de Vicki Vale et de Batwoman : la premiere sert de pseudo-Loïs Lane, la deuxieme d’alter égo au héros. Conformément aux mœurs de l’époque, les deux tiennent avant tout à passer la bague au doigt à Batman, qui préfre sa vie de célibataire et de justicier.

DES ANNÉES 1970 À NOS JOURS

Après le tournant des années 1970 et la libération de la femme, Bruce Wayne s’engagera dans des relation plus soutenues et adultes : Silver St-Coud sera ainsi la première de ses fiancées à découvrir sa double identité. Plus tard, notre heros sort un temps avec Vesper Fairchild, une animatrice radio qui enquête sur les agissement de Batman. Cette derniere finit assassinée alors qu’une autre femme entre dans la vie du héros. Sasha Bordeaux, engagé pour être son garde du corps. Le cliché de la fiancée sans défense est petit à petit abandonné et les femmes des comic books deviennent aussi redoutables que les hommes, preuve en est avec Jézabel Jet en réalité liée au groupucusle du Gant Noir qui a juré la perte du héros.

Il semble que seules les femmes menant une double vie puissent comprendre le héros, ce qui explique la prédominance de Catwoman et de Talia al Ghul – la mère de son fils Damian – dans le cœur du Chevalier noir.

GOTHAM

GOTHAM CITY, LA MÉTROPOLE DU CRIME

La description de Gotham change avec l’évolution des mœurs et des nombreux courants politiques et sociaux. Cette ville fictive n’est nommée qu’à partir de 1940 : la première année, elle est présentée comme un reflet déformé de New York avant de devenir dans les années 1940 un croisement entre Chicago et une Las Vegas illuminée de mille feux.

UN REFLET DÉFORMÉ DE L’AMÉRIQUE

Gotham City est à la fois la ville natale de Bruce Wayne et le terrain d’opération de Batman. Le Chevalier Noir s’est juré de défende ce territoire et d’y éradiquer le crime par tous les moyens possibles. Pour autant, sa mission n’est pas chose aisée puisque la corruption et le mal règnent à tous les niveaux de la municipalité. Gotham devient donc au fur et à mesure des avancées de la société et du passage du temps un reflet déformé des grandes métropoles américaines.

A l’époque où l’économie propère au sein d’une Amèrique victorieuse de la Secconde Guerre mondiale, Gotham voit les musées, les entrepôts et les enseignes aux néons colorés se multiplier

Mais, avec la crise économique et énergétique qui secoue le monde à partir des années 1970, son apparence se fait plus sombre : les rues sont submergées de gangs et la misère sociale fait son apparition. Dans les années 1990, Gotham devient un personnage à part entière : les lieux et monuments sont baptisés du nom des auteurs de Batman et sa destruction, sa reconstruction et son histoire sont des points d’intrigues pour les comic books comme pour les films. Celui qui règne sur Gotham règne sur le monde et Batman est là pour empêcher la cité maudite de tomber.

Pour cela, il peut compter sur un allié de poids, le commissaire Jim Gordon, qui a d’ailleurs bien eu besoin de l’aide du héros pour nettoyer la corruption au sein de la police de Gotham. Les liens qu’entretient le justicier avec les forces de l’ordre évoluent de concert avec la description de la ville.

GOTHAM CITY POLICE DEPARTEMENT – JIM GORDON

JAMES GORDON, LE MEILLEUR ALLIÉ

James W. Gordon est un homme de loi et le premier (et meilleur) allié de Batman. Présent dès le premier épisode de ses aventures, il fait figure de compas moral pour le héros, voir de père de substitution à certains moments tragiques. De la même manière que Gotham s’est transformée au fil des décennies pour coller au plus près des évolutions de la société, James Gordon s’est également endurci avec le temps. Au départ, il ne participe que rarement à l’action : représentant des autorités de Gotham, il pourchasse un temps le justicier avant d’en faire un membre honoraire de la police , dans Batman #7 (octobre-novembe 1941). Par la suite, il contacte Batman quand une affaire lui semble impossible pour ses hommes. Jusqu’aux années 1980, Gordon est dépeint comme un policier consciencieux – quoique parfois obtus.

Mais, en 1987, la redéfinition des origines de Batman entraîne celle de sa relation avec Gordon. FRANK MILER et DAVID MAZZUCCHELLI relient le retour de Bruce Wayne à Gotham, après ses années d’errance,à l’arrivée du lieutement Gordon, muté de Chicago. Ce dernier, dégoûté par la corruction de son département et bouleversé par une liaison avec une de ses collègues, Sara Essen, alors même que sa femme est enceinte, décide de s’allier au vigilante masqué qu’on lui a ordonné d’arrêter. _Batman Année Un_ se conclut sur la promotion de Gordon au rang de capitaine, au moment de la naissance de son fils James Jr., qui sera sauvé d’un kidnapping par Batman. Le livre trace ainisi un parallèle osé entre héros et super-héros : l’un ne va pas sans l’autre et ce tournant plus réaliste sert de base à une amitié pour le moins mouvementée.

Gordon a également une fille, Barbara, qui ne va pas tarder à rejoindre la croisade de Batman sous le déguisement de Batgirl. Cette aventure est marquée du sceau de la tragédie, puisque Barbara se retrouve un temps paralysée après avoit été touchée par une balle par le Joker. Ce même Joker assassinera la deuxième femme de Gordon, Sarah Essen. Mais ces deux drames ne sont rien face au destin terrifiant de James Gordon Jr. qui cache sous un visage affable un esprit sadique et psychopathe. James Jr. rejoint alors les rangs des nombreux criminels déments de l’Asile d’Arkham, au grand dam de son père, impuissant face à la folie de son fils. James Jr. représente ainsi le sombre reflet de l’héritage des héros de Gotham et futur possible de la ville.

Heureusement, Jim Gordon peut compter sur le soutien de ses équipiers : après avoir netoyé autant que possible les rangs de la police de Gotham, il embauche de nombeux collaborateurs qui s’acclimateront plus ou moins bien à la présence indispensable de Batman en ville. Parmi eux, Harvey Bullock est le plus critique : cet inspecteur « vieille école » sera rejoint dans les années 1990 et 2000 par une distribution plus diversifiée du point de vue ethnique, et même sexuel, puisque sa partenaire Renée Montoya révélera dans un épisode son homosexualité. Une série sera même attribué en 2003 à 2006 à ces enquêteurs de l’ombre : _Gotham Central_ coïncidera avec la mise à la retraite provisoire de Jim Gordon. Mais celui-ci reviendra à son poste en 2006 et ira même jusqu’à remplacer un temps Bruce Wayne sous le costume de Batman, signe que ces deux défenseurs de Gotham, héros et super-héros, sont à jamais liés.

LA VERSION ANIMÉ

Le 5 septembre 1992, les téléspectateurs américains découvrent pour la première fois la nouvelle série animée consacrée au Chevalier Noir. Conçue par le trio composé de BRUCE TIMM, ERIC RADOMDKI et ALAN BURNETT, ce nouveau programme connaît un succès instantané, succès confirmé en France lors de sa diffusion en décembre de la même année sur _Canal+._ Très vite, les jeunes spectateurs font connaissance avec un univers sombre et stylisé où évoluent des justiciers ténébreux, des policiers audacieux et surtout des criminels fascinants, déments et hauts en couleurs !

Dans cette version animée, Batman évolue dans une Gotham dantesque où les dirigeables de la police invertissent un ciel rouge et pollué surpomblant des usines de cartes à jouer, des repaires de scélérats, un asile d’aliénés et des avenues aux enseignes de néon rivalisant avec celles de Times Square. Le costume même de Batman lui permet de se fondre dans cet environnement urbain, le héros se dissimulant parmi les gargouilles d’immeubles d’inspiration gothique.

Grâce au scénariste et producteur PAUL DINI, la série n’hésite pas à mettre l’accent sur les super-vilains qui s’amusent à dynamiter le petit monde de Gotham. En peu de temps, Poison Ivy, Mister Freese, Gueule d’Argile ou Double-Face font leurs grands débuts, rejoignant le Joker, Catwoman ou le Pingouin, déjà connu du grand public grâce à leur apparitions dans les films de Tim Burton, en 1989 et 1992. De plus, de nouveaux ennemis comme Harley Quinn, Lock-UP ou Roxy Rocket y font leur débuts.

La qualité et la fidélité de la série sont telles que l’éditeur d’origine des aventures de Batman en bandes dessinées, DC Comics, décide de lancer un mensuel situé dans l’univers du dessin animé. _The Batman Adventures_ débute en octobre 1992 et connaîtra plusieurs suites – dont _The Batman & Robin Adventures_ (en 1995), et _Gotham Adventure_ (en 1998) – qui prendront en compte l’évolution graphique de la série animée.

LES SUPER-VILAINS

LE SUPER-VILAINS : LE REFLET DÉFORMÉ

Il existe un vieil adage dans le domaine du divertissement : meilleur est le méchant, meilleure est l’histoire. Dès leurs débuts, à la fin des années 1930, les super-héros des premiers comic books, voient apparaître des adversaires à même de défier leurs pouvoir faramineux. De même que leur homologues justiciers, les « super vilains » ont su évoluer au gré des bouleversement sociaux et politiques, aussi bien qu’artistiques et éditoriaux. De plus en plus présents au sein des aventures des héros, au point de devenir indispensables dans les années 1960, ils ont également vu leur puissance et leur capacité de menace s’intensifier. Par la suite, ils sont reliés aux héros de façon plus intime : certains auront même été des amis de ces derniers, voire d »anciens coéquipiers.

Batman débute sa guerre contre le crime en affrontant des gangsters, des savants ou des monstres issus du bestiaire fantastique des années 1930, exprimant ainsi ses racines pulps. Mais les super-vilains qui arrivent par vagues successives vont être élaborés en miroir du justicier. Avec les _Joker_ et _Catwoman_, arrivent dans les années 1940 _Double-Face_, le _Pingouin_, l’_Épouvantail_, le _Sphinx_ et _Gueule d’Argile_. Il s’agit de vilains de premier plan que l’on retrouve dans les adaptations filmiques et télévisées, à la différence de ceux des années 1950 et 1960, où la censure du COMIC CODE est beaucoup plus présente. À quelques exceptions près (_Mister Freeze_ et _Poison Ivy_) qui se souvient aujourd’hui de _Zebra-Man_, _Firefly_, _Spellbinder_, l’_Effaceur_ ou bien encore, du _Maître des Indices_ ? Mais avec les années 1970, _Man-bat_, _Ra’s al Ghul_ et _Talia_ inaugurent une nouvelle vague de criminels qui vont se révéler encore plus redoutables. _Bane_, _Zsasz_ ou _Black Mask_ présent une apparence et des méthodes plus sombres et dangereuses, tandis que _Double-Face_, le _Sphinx_ ou le _Pingouin_ se radicalisent de leur côté.

Un fil rouge relie néanmoins ces différents ennemis : tous représentent un aspect de la psyché ou du mythe du héros. Certains testent les limites intellectuelles de Batman, comme le _Sphinx_, tandis que d’autres, comme _Bane_, le pousse au bout de ses limites physiques. Enfin, pour le _Professeur Strange_ ou _Ra’s al Ghul_, il s’agit de faire perdre définitivement pied au Chevalier Noir, de le faire craquer et de le pousser à abandonner son rôle de justicier, ou bien encore de le corrompre et de le rallier à une cause qui n’est pas la sienne.

Mais les super-vilains peuvent-ils, eux, s’amender ? C’est qu’espère en tout cas Bruce Wayne, qui verse d’importantes sommes d’argent pour pouvoir guérir _Double-Face_ et retrouver son ami, _Harvey Dent_. Mais c’est également lui qui crée un fonds destiné aux victimes de crimes violents. Dans l’univers de Batman, les raisons sociales et économiques qui mènent aux crimes ne sont pas ignorées : _Mister Freeze_ a ainsi vu ses recherches sabotées alors qu’il tentait de trouver un remède à la maladie de sa femme, tandis que _Killer Croc_ a dû survivre dans les bas quartiers, rejeté pour son apparence …

la série animée des années 1990 retranscrit particulièrement bien ce motif récurrent. Cette galerie de personnages devient aussi passionnante grâce à l’emphase des animateurs et des scénaristes qui accentuent le côté grotesque et les failles psychologiques des vilains, la schizophrénie du Ventriloque et se son pantin _Scarface,_ le trauma de _Baby Doll_, actrice coincée dans un corps d’enfant, ou bien la recherche du grand frisson par la cascadeuse _Roxy Rocket_ : autant d’exemples de freaks dont l’humanité est paradoxalement soulignée …

BANE, LE BRISEUR DE MYTHES

L’imposant Bane est une création des scénaristes DOUG MOENCH et CHUCK DIXON et du dessinateur GRAHAM NOLAN pour une saga intitulée _Knighfall_. Les origines et la première apparition de ce titanesque maître du crime, sont racontées dans _Vengeance Of Bane #1_ de janvier 1993, qui montre en détail son horrible « éducation » au sein de la prison de Santa Prisca, où il a appris à se battre mais aussi à haïr un homme appelé … Batman. Utilisant à la fois son intelligence redoutable et un super-dopant, le Venin, Bane va livrer une partie d’échecs machiavélique afin de briser autant mentalement que physiquement le Chevalier Noir. Bruce Wayne finira même un temps paralysé et devra être remplacé sous le costume de Batman par Jean-Paul Valley dit Azrael.

RA’S AL GHUL, LE STRATÈGE

Ra’s al Ghul signifie en arabe « la tête du démon ». Il est le chef sans pitié d’une organisation criminelle dont les activités s’étendent aux quatres coins du globe. Apparu pour la première fois dans _Batman #232_ de juin 1971, écrit par DENNIS O’NEIL et dessiné par NEAL ADAMS, il révèle au Chevalier Noir qu’il connaît sa double identité, en pénétrant directement dans sa Batcave ! Vieux de plusieurs siècles, Ra’s al Ghul doit sa longévité aux puits de Lazare dans lesquels il se régénère à intervalles réguliers. Il est un stratège brillant qui souhaite avant tout diriger le monde afin de rétablir son équilibre naturel. Ra’s al Ghul est devenu au fil du temps l’un des ennemis les plus intimes de Batman. En effet, sa fille, Talia tentera de nombreuses fois de séduire le Chavalier Noir, allant même jusqu’à avoir un fils avec lui, le turbulent Damian Wayne.

LE PINGOUIN

Apparu dans _Detective Comics #58_ (décembre 1941), le _Pingouin_ est un braqueur de banques spécialiste des oiseaux dont le gimmick consiste à utiliser des parapluies améliorés pour commettre ses méfaits. Il est devenu au fil du temps l’un des plus important vilains de l’univers du justicier, une position renforcée par ses apparitions dans la série télévisée des années 1960 (interprété par BURGESS MEREDITH) et dans le film _Batman, le défi_ réalisé par TIM BURTON en 1992 (où il est joué par DANNY DEVITO).

Depuis quelques années, le Pingouin est le propriétaire de la Banquise, un night-club qui sert de couverture à ses activités douteuses. Durant la période de No Man’s Land, le Pingouin, toujours avide de pouvoir et de reconnaissance, va même jusqu’à maîtriser le marché noir de la ville, se servant de ses contacts pour manipuler et diriger les habitants nécessiteux.

ARKHAM ASYLUM

L’ANTRE DE LA FOLIE

Au départ, le bâtiment de l’asile d’Arkham, que l’on découvre dans _Batman #258_ (octobre 1974), n’est pas totalement défini : son nom varie d’Arkham Hospital à Arkham Sanatorium suivant les épisodes, avant de fixer sur son nom actuel dans _Batman #326_, un épisode écrit par LEN WEIN dans lequel le professeur Milo passe de médecin à dément en quelques pages – un motif souvent réutilisé par les auteurs au cours des années. Si, dans _Dark Knight Returns_, l’asile garde une apparence d’institution psychiatrique assez commune, c’est avec _Arkham Asylum_, écrit par GRANT MORRISON et dessiné par DAVE MCKEAN, que ce lieu prend la forme aussi imposante qu’effrayante qui sera le leitmotiv de ses représentations à venir.

L’édifice a également une histoire tragique : le psychiatre _Amadeus Arkham_ a donné à l’hôpital le nom de sa mère _Elizabeth Arkham_, qui avait sombré dans la folie avant d’attenter à sa vie. Amadeus, lui, tente de restaurer la santé mentale de _Mad Dog Hawkins_, un tueur irrécupérable qui s’évade et massacre sa femme et sa fille. En retour, Arkham le torturera en lui administrant des électrochocs. Dès lors, l’asile d’Arkham est marqué du double sceau de la folie et de cruauté. C’est un endroit qui reflète les pires démons de Batman : c’est une Gotham qui ne peut ni ne veut être sauvée.

Pour les auteurs successifs, cela signifie également une astuce scénaristique permettant de faire sans cesse revenir les ennemis du héros. L’asile est le lieu o&ugrave les vilains se rencontrent, forment des alliances, fomentent des coups… C’est aussi un lieu qui pervertit certains, par exemple le docteur _Harleen Quinzell_, devenue _Harley Quinn_ au contact du _Joker_, ou bien encore le criminel en col blanc, _Warren White_, qui est défiguré à Arkham et y trouve son surnom de _Grand Blanc_, dans un récit intitulé _Les Patients d’Arkham_, réalisé par DAN SLOTT et RYAN SOOK en 2003. C’est aussi à Arkham que le Joker se dissimule sous l’identité d’un jeune médecin, dans les épisodes écrits par SCOTT SNYDER et dessinés par GREG CAPULLO.

L’asile d’Arkham est le lieu o&ugrave la folie règne, le bien et le mal se mélangent, le haut devient le bas, le blanc le noir. Le descendant et médecin en chef actuel de l’établissement, _Jeremiah Arkham_ (apparu dans _Shadow of the Bat#1_ écrit par ALAN GRANT et dessiné par NORM BREYFOGLE en 1992), est tout aussi nébuleux que ses « patients », dont la plupart n’émettent aucun remords ni ne semblent être sur la voir de la guérison. L’asile est l’élément qui symbolise le plus la tournure dramatique et sombre qu’ont prise les aventures du Chevalier Noir depuis les années 1980. Ici, chacun se doit d’abandonner la moindre parcelle d’espoir.L’asile valide de fait l’existence de Batman…

… en attendant, qui sait, que le Chevalier Noir devienne l’un de ses patients.

L’ÉPOUVANTAIL

LE SPHYNX

DOUBLE FACE

MISTER FREEZE

POISON IVY

HARLEY QUINN

Bien qu’elle n’ait que 25 ans d’existence, Harley Quinn est devenue un atout avec lequel tout l’univers de Batman, et même celui de DC Comics, peut aujourd’hui compter. Apparue comme un personnage secondaire dans l’épisode Chantage à crédit de la série animée de Batman en 1992, Harley a rapidement eu le droit de partager la scène avec son « poussin » d’amour le Joker, dans des épisodes tels que Heureux comme un poisson dans l’eau ou L’homme qui tua Batman – et même de prendre carrément la vedette dans Harlequinade, La folle journée de Harley ou Harley et Ivy. Et lorsque ses deux créateurs Paul Dini et Bruce Timm, réalisent ensemble le comic book Mad Love en 1994, ils lui donnent une origine des plus insolites : Harleen Quinzel était la psychiatre du Joker. Tombée folle amoureuse du clown meurtrier, elle l’aide à s’évader et s’acoquine avec lui, persuadée qu’un jour ils convoleront tous deux en justes noces.

En 1999, Harley devient un cas à part, puisqu’elle sort de l’univers animé pour intégrer la légende officielle de Batman, dans un récit situé durant la période No Man’s Land de Gotham écrit par Paul Dini.

LE JOKER

LE JOKER, CE CHER ENNEMI

Superman et Lex Luthor, Sherlock Holmes et Moriarty, James Bond et Blofeld… Tout bon héros se mesure à l’aune de ses ennemis et des menaces qui hantent les recoins les plus sombres de son environnement. Le Joker tient une place de choix au Panthéon des vilains : c’est l’ennemi juré de Batman, et il multiplie les méfaits depuis sa création en 1940 dans les pages de _Batman #1_.

Durant ses premières années d’existence, le Joker agit comme un assassin sans remords. Son mode opératoire inclut l’utilisation des médias, première trace de son gigantesque égo, et un gaz mortel agissant sur les muscles faciaux de ses victimes, figeant leurs visages dans un rictus atroce. Mais après une dizaine d’apparitions, il opère un changement de personnalité et devient un braqueur excentrique qui trouve pour chaque vague de crimes un gimmick original. Jusqu’en 1954,le Joker demeure l’adversaire flamboyant par excellence du Dynamic Duo, mais l’élaboration du COMICS CODE porte un premier coup à ce statut envié par d’autres méchants éphémères, comme Double-Face, le Chevalier Noir. Dans la période POST-COMICS CODE, le Joker est peu à peu remplacé par des menaces extraterrestres ou par des monstres de science-fiction, plus inoffensifs, et collant au tournant fantastique des séries Batman. Il faudra attendre la fin des années 1960 pour que le Joker revienne en force au sein de la série télévisée Batman (1966-1968) mettant en scène ADAM WEST et BURT WARD dans les rôles principaux.

MANIAQUE MÉGALOMANE

Le Joker réapparaît dès 1973, remanié en assassin machiavélique et sardonique comme il l’était à ses débuts. Face à un Batman plus félin et agressif, le _Clown Prince du Crime_ se fait plus dangereux et imprévisible. Encadrés par des épisodes de DENNIS O’NEIL et NEAL ADAMS et de STEVE ENGLEHART et MARSHALL ROGERS, les récits qui le mettent en scène vont autant faire la part belle à sa mégalomanie qu’à son esprit retours dans l’élaboration de vols spectaculaires. Et tout comme Batman, le Joker va connaître un nouveau changement radical en 1986, sous la houlette de FRANK MILLER, dans l’incontournable _Dark Knight Returns_. Plongé dans une catatonie depuis la retraite de Batman, le Joker, témoin de son retour reprend goût à la vie… et au meurtre. Le dernier affrontement des vieux ennemis se déroulera symboliquement dans le « Tunnel des amoureux » d’un parc d’attraction. Cette description cruelle et fataliste des relations entre les deux personnages marquer longtemps les esprits, et inspirera les auteurs qui auront la charge d’animer à nouveau leurs combats.

UN DÉMENT FASCINANT

Le Joker dépasse son rôle de méchant de la semaine pour devenir une véritable incarnation du mal et de la folie dans l’univers DC. Ce Joker manipulateur sera remarquablement interprété par l’acteur HEATH LEDGER dans _The Dark Knight_ (CHRISTOPHER NOLAN, 2008). Un maître-chanteur qui s’intéresse moins aux fruits de ses crimes qu’à la vague de terreur qu’ils provoquent.

Dans les comics, le Joker revient sur le devant de la scène au cours de l’arc de SCOTT SNYDER et GREG CAPULLO, _Le Deuil de la famille_. Cette fois-ci, loin de se cantonner à sa lutte sans pitié avec le Chevalier Noir, le maniaque s’en prend également à ses associés, et notamment au premier d’entre eux, le majordome Alfred. Après ce coup d’éclat, le scénariste GEOFF JOHNS renchérie avec une révélation surprenante lors de l’événement DC Univers Rebirth : il existerait trois Jokers ! Ce mystère supplémentaire s’ajoute à la longue liste des légendes attribuées au _Clown Prince du Crime_.

Le Joker a fasciné bien des auteurs, qui le redéfinissent pour un public toujours plus nombreux. Dernier récit en date qui a marqué le personnage : _Batman White Knight_, de SEAN MURPHY. Un album dans lequel le Joker prend la place de Batman en tant que protecteur de Gotham et va même jusqu’à se présenter aux élections municipales afin d’assainir la ville tandis que son ennemi juré croupit en prison !

ÉVOLUTION

ORIGINAUX

Publicité