Exposition - Salon

Exposition Jérémie Moreau – Angoulême 2019

Du 24 au 27 janvier 2019

01 LA SAGA DE JÉRÉMIE MOREAU

Plusieurs volets d’une même carrière, plusieurs œuvres d’un même auteur …

Âgé de 31 ans, Jérémie Moreau dit conntre depuis son plus jeune âge la trajectoire qu’il veut donner à sa carrière : il veut être dessinateur de bande dessinée. Or, ce projet se construit depuis plus de 20 ans dans le dialogue avec le Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. L’histoire commence alors qu’il n’a que 8 ans, avec le concours de la Bande Dessinée scolaire. Plusieurs fois sélectionné au niveau national, il profite d’invitations régulières pour découvrir le Festival à Angoulême. En 2005, il reçoit enfin, à 17 ans, le Prix de la BD scolaire. Preuve de son talent précoce, cette récompense est surtout pour Jérémie la confirmation d’une vocation.

Il en entame ses études supérieures au sein de la prestigieuse école des Gobelins pour se former au dessin et à l’animation. Mais Angoulême reste son point d’ancrage. C’est pourquoi Jérémie continue à participer aux concours proposés par le festival. Il remporte ainsi, après plusieurs sélections, le Prix Jeunes Talents en 2012 avec _Le Suicidaire Altruiste_. Ses planches témoignent de la virtuosité et de la diversité de son travail.

Après plusieurs œuvres remarquées par la critique et sélectionnées en compétition officielle du Festival d’Angoulême, il remporte le Fauve d’Or 2018, Prix du meilleur album de bande dessinée de l’année pour son album _La saga de Grimr_ aux éditions Delcourt.

La Saga de Jérémie Moreau – lauréat à son jeune age du prix le plus prestigieux de la bande dessinée – ne fait que commencer …

LE MOT DE JÉRÉMIE : « Aurais-je fait de la bande dessinée s’il n’y avait pas eu le Concours de la BD scolaire d’Angoulême? Pas sûr. C’est un peu honteux à dire … Et pourtant … Ça me rappelle mes cours de philo en terminale sur le finalisme dans la nature : La girafe tire sur son cou pour atteindre la cime de l’arbre et voici que les girafes ont des longs cous. Moi j’ai voulu gagner le concours et me voilà devenu auteurs de BD. »

02 LE SINGE DE HARTLEPOOL

Jérémie dessinateur

Lorsque Jérémie est primé en tant que jeune talent en 2012, il est déjà en train de donner forme à son premier projet d’édition professionnel. Le scénariste Wilfrid Lupano avait repéré son travail grâce à Jean-Baptiste Andreae et lui avait proposé de dessiner un de ses scénarios : _Le singe de Hartlepool_.

Étape fondatrice dans son parcours, ce premier livre est l’occasion pour le jeune dessinateur de tisser une relation étroite avec un scénariste aguerri et reconnu.

Salué tant par ses pairs que par les libraires et les lecteurs, _Le Singe de Hartlepool_ est sélectionné en compétition officielle pour le Festival d’Angoulême 2013 et reçoit au cours de cette année de nombreuse récompenses, dont celle du Prix des Libraires. La cruauté féroce du scénario de Wilfrid Lupano est particulièrement amplifiée par le trait de Jérémie.

Pour ce premier album, le dessinateur a principalement puisé son influence chez trois illustrateur et dessinateur de presse anglais, Quentin Blake, Ronald Searle et Ralph Steadman.

La nervosité du trait à la plume avec des empattement et des gouttes d’encre est particulièrement visible dans les recherches pour les personnages et les décors.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « Comment ? Un truc historique ? Avec des uniformes et des navire napoléoniens ? Non merci Wilfrid, pas mon truc. Et puis je veux écrire mes scénarios. Attends deux secondes, je relis vite fait pour voir comment c’est qu’on écrit un scénario. Ah ouais … Eh mais c’est plutôt cool en fait. Et puis c’est pas historique … Enfin si, mais pas chiant … En fait c’est une sorte de fable. C’est super malin … Et drôle … Et je vois trop bien les dessins pourraient aller avec. Faisons-le !! »

03 MAX WINSON

un premier récit pour s’affirmer comme auteur complet

Après le succès du _Singe de Hartlepool_, Jérémie veut asseoir sa légitimé en travaillant seul. Il se confronte alors à l’exercice du scénario et du dessin. Son amitié avec Wilfrid Lupano est déterminante dans la signature du projet : une fois encore, c’est au Festival d’Angoulême que la carrière du jeune auteur s’accélère quand, parrainé par son ancien scénariste, il présente et défend auprès de Guy Delcourt ses premières idées.

D’abord édité en deux tomes, ce récit retrace la vie d’un joueur de tennis, Max, pantin d’un père tyrannique et autoritaire soucieux de lui faire gagner indéfiniment ses matchs. Dans le premier volet, Jérémie dresse un portrait satirique, quasi-outrancier d’un monde assommé de sport-spectacle et biberonné aux valeurs sportives de la compétition et de la victoire. La seconde partie se concentre sur l’émancipation de Max, son réapprentissage de la vie et du jeu pour s’envoler de la compétition vers l’émulation.

Les dessins sont nourris de multiples influences : Winsor McCay ou José Muñoz pour la bande dessinée, mais également le peintre Hokusai pour le trait au pinceau et à l’encre de chine. Son esthétique, à la technique très maîtrisée, donne au récit son dynamisme, soulignant tantÔt la cadence infernale des coups droits et revers de Max, tantôt les instants sombres ou suspendus des rencontres du jeune héros.

En 2015, le récit est réédité en intégrale. Jérémie en profite pour dessiner une nouvelle couverture en forme de clin d »œil au Facteur Cheval, artiste pour lequel il nourrit une affection particulière. Cette nouvelle illustration fait en effet plus précisément référence au Palais Idéal, bâtiment construit sans aucune règle d’architecture à la fin du 19è siècle. Jérémie s’inspire en effet de cette œuvre d’art brut pour composer le dessin, disposant plusieurs de ses personnages, qu’il associe à des éléments de formes et de tailles différentes, autours de son héros.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « 29 Janvier 2013 : « Monsieur l’éditeur, c’est LE projet du siècle, vous ne pouvez pas le rater : 300 pages, noir et blanc sur le tennis. Ça va être dingue ! Risqué ? Mais pas du tout ! Oui alors j’ai jamais écrit de scénario de plus de 3 pages, mais ce que vous ne savez pas c’est que je suis un génie dans ma tête .»

12 avril 2013 : « Allo Jérémie ? On vient de recevoir tes premières pages, ça ne va pas du tout … Tous les personnages parlent de la même façon, c’est désordonnée, l’entraîneur arrive comme un cheveu sur la soupe… je sais pas quoi te dire … Ah si : Appelle Wilfrid ».

04 TEMPÊTE AU HARAS

nouveau projet, nouvelle technique, nouvelle collaboration !

Jérémie Moreau se lance un nouveau défi : réaliser une adaptation en bande dessinée du roman de littérature jeunesse, _Tempête au Haras_, écrit par Chris Donner et paru à l’École des Loisirs en 2012.

L’histoire retrace le destin d’une jument et de Jean-Philippe, nés au même moment dans une famille vivant dans le milieu hippique.

Le défit que Jérémie se lance tient probablement à l’envie de proposer une adaptation littéraire le plus souvent muette.

La scène fondatrice de la tempête est ainsi sublimée par des chois très précis de cadrages, de tonalités d’ombres ou de couleurs. Elle exprime sans un mot la tragédie de l’accident qui va chambouler la manière dont jean-Philippe va pouvoir concrétiser son rêve de devenir jockey.

Le travail d’adaptation du livre de Chris Donner a été conduit conjointement entre les deux auteurs afin de couper, modifier, remodeler, enrichir le texte littéraire de base pour en faire un scénario indépendant, adapté au médium bande dessinée.

L’album est remarqué par le Festival d’Angoulême avec une sélection au Prix Jeunesse, salué notamment pour ses qualités graphiques.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « je reçois le roman par la Poste, On me propose de l’adapter. L’idée me plaît car il y a comme un parfin de challenge : des chevaux, une BD pour enfant, les spectres des grands auteurs de l’École des Loisirs… Je lis. Un double accouchement dans un Haras. L’entame me plaît. C’est dur, ça sent le fumier. Les chapitres se suivent et je vois de belles images. Je suis pris par l’histoire mais je vois venir le happy-end final. Là je me dis : « si ça finit bien je le fais pas. » Mais la fin est abrupte et amère, j’adore ! »

05 LA SAGA DE GRIMR

un album surpuissant

dernier livre en date de l’auteur, _La Saga de Grimr_ aux Éditions Delcourt est l’album qui lui amène la consécration et la reconnaissance d’un plus large public. Un succès critique et public amplifié par la victoire du Fauve d’Or, Prix du meilleur album à Angoulême, qui ouvre sur une nouvelle époque dans sa carrière.

Emprunt de référence et d’une technique mêlant stylo et aquarelle, _La Saga de Grimr_ est une œuvre puissante. Les planches bruyantes, lumineuses, graphiques méritent toutes d’être vues et analysées. Le travail appliqué et précis dont elles sont le résultat se conjugue avec un scénario millimétré dans lequel chaque personnage tient son rôle avec des attitudes des expressions soignées.

_La Saga de Grimr_ se lit et se relit, chaque nouvelle lecture étant l’occasion de découvrir des références et des détails.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « Un jour, je regarde le documentaire « la Soufrière » de Werner Herzog. A un moment, il raconte l’histoire d’un survivant d’une éruption volcanique incroyable qui rase une ville de 30 000 habitants. Ce survivant et en fait un prisonnier, le plus mauvais de tous, qui avait été enfermé dans le plus profond des cachots. Je trouve l’histoire fabuleuse, je pense à en faire quelque chose. Mais les idées d’histoire ayant leur vie propre, elle mutent, s’entrechoquent, s’agglomèrent à d’anciennes idées, puis un jour, bien polies par les vents de la pensée, elles trouvent leur forme finale. D’un prisonnier de Martinique j’ai fait un Islandais bâtisseur. »

06 AUTOUR DE LA SAGA DE GRIMR

Les premiers mois qui ont suivi la sortie de _la Saga de Grimr_ en librairie ont été particuliers à vivre.

Alors que sélections et critiques se succèdent, Jérémie doute de la manière dont l’album est perçu par le publie et les professionnels. Éreinté par certains retours, il décide même d’arrêter l’écriture de son nouveau livre de fiction pour se lancer dans un récit plus autobiographique, tourné autours de son rapport à la création, à sa famille, où il serait le personnage principal.

Cet album quasi terminé ne verra jamais le jour.

En effet, au lendemain de sa récompense à Angoulême, le projet perd de son sens et Jérémie en abandonne l’écriture. Le prix à Angoulême a levé subitement les doutes qui le travaillent depuis des années et Jérémie peut sereinement reprendre le projet commencé après _La Saga de Grimr_. Cette exposition est donc l’occasion de montrer, en exclusivité, les planches de cette autobiographie inachevée et inédite, _Comic Boy_. D’autre influences se font jour dans ce projet, comme celles d’André Franquin, d’Osamu Tezuka ou Bill Watterson.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « Parfois on se sent des jambes de géant, alors on entreprend de longs voyages à travers les plus hautes montagnes. Puis on se réveille le lendemain avec de toutes petites jambes et des pieds nus pleins d’ampoules. Les destination de la veille semblent inaccessibles.

On se fixe de nouveaux objectifs, au lieu des monts enneigés, j’irai sur la petite colline là-bas. On fait avec ce qu’on a selon les périodes de grandes ou de petites jambes. Et puis parfois, très rarement, une fois dans sa vie, du jour au lendemain vous avez grandi de 100 mètres. Alors, vous repartez à l’assaut des plus hauts monts enneigés. Un fauve d’Or et ça repart ! »

07 ET APRÈS

La Saga de Jérémie Moreau se conjugue au futur

Jérémie a toujours été écartelé entre animation et bande dessinée, alternant les travaux sur les deux médiums. Aujourd’hui encore il mène de front deux projets d’envergure.

Le premier, en bande dessinée, s’intitule Penss et les plis du monde (titre provisoire). Il a débuté après la sortie de La Saga de Grimr. Le second, en animation, est un projet de long métrage réalisé avec Lucrèce Andreae, sa compagne.

Coté bande dessinée, Penss et les plus du monde est un projet très ambitieux qui devrait voir le jour à la fin de l’année 2019 aux éditions Delcourt. Le récit se déroule à la Préhistoire et raconte le parcours d’un jeune homme un peu rêveur, un peu philosophe, exclu par son clan car pas assez chasseur.

Contraint à la survie en solitaire, il arrache au monde l’un des plus grands secrets : les plis. Grâce à eux, Penss se lance dans une entreprise insensée : créer un monde sans faim. Réalisé à la plume et à l’aquarelle, les premières planches sont présentées dans cette exposition en exclusivité.

Coté animation Jérémie a travaillé sur des œuvres de grande ampleur comme Moi, moche et Méchants 2 ou Les pingouins de Madagascar. Mais c’est avec la talentueuse Lucrèce Andreae que les projets récents se multiplient. Lucrèce et Jérémie, qui se sont rencontrés alors qu’ils étaient tous deux sélectionnés au Concours de la BD scolaire à Angoulême, développent depuis des projets en commun. Pépé le Morse, court métrage d’animation réalisé en 2017 par Lucrèce a reçu le Prix du Public pour un court métrage à Annecy en 2017, le César du meilleur court métrage d’animation en 2018, a été en sélection officielle au Festival de Cannes et est en compétition aux Oscars en 2019.

Pour les mois (année ?) à venir, Jérémie et Lucrèce travaillent à un long métrage en animation pour enfants. Le film contera la rencontre de « Bergeronnette », un jeune garçon fils de berger Landais avec la dernière sorcière de la région.

LE MOT DE JÉRÉMIE : « Et si la plus petite particule de matière au lieu d’être l’atome, était un pli ? C’est le point de départ d’un cours de philosophie délirant de Gilles Deleuze qui m’a littéralement retourné le cerveau. A partir de l’écoute de ce cours, je me suis surpris à voir du pli partout, dans l’eau, le feu, les vêtements, ma main, les rides, les arbres, les montagnes, la pensée …

Cette philosophie du pli avait quelque chose de tellement poétique et visuel, et en même temps d’un brut et primitif. Mon esprit était en marche. Alors j’ai créé Penss, ce philosophico-esthète de la préhistoire qui va voir le monde comme une boule de plis en plein dépliement. »

Publicité