Exposition - Salon
Exposition Parodies – Angoulême 2011
Du 05 janvier au 24 avril 2011
musée de la bande dessinée
16000 Angoulême
1 QU’ES-CE QU’UNE PARODIE ?
UNE PARODIE EST UNE ŒUVRE QUI EN IMITE UNE AUTRE, EN LUI FAISANT SUBIR CERTAINES TRANSFORMATIONS. CES CHANGEMENTS PEUVENT ÊTRE MINIMAUX (DE L’ORDRE DE LA VARIANTE) OU TRÈS IMPORTANTS (OU POINTS QUE. DE L’ŒUVRE PREMIÈRE, ON NE RETROUVERA ÉVENTUELLEMENT QU’UNE SITUATION. UN THÈME. UN PERSONNAGE). ILS SONT EFFECTUÉS DANS UN ESPRIT LUDIQUE OU SATIRIQUE, AVEC L’INTENTION D’AMUSER MAIS PAS NÉCESSAIREMENT DE SE MOQUER : DE NOMBREUSES PARODIES SONT, À LEUR FAÇON, DES HOMMAGES RENDUS À DES ŒUVRES DONT ON RECONNAÎT L’IMPORTANCE OU AVEC LESQUELLES ON ENTRETIENT UN LIEN AFFECTIF PRIVILÉGIÉ.
La veine parodique traverse toute l’histoire de la bande dessinée innombrables sont les récits dessinés qui détournent un film ou un roman, ou une serie télévisée ou bien encore une bande dessinée antérieure.
Sous le Second Empire déjà les « Salons caricaturaux » (appelés aussi « Salons pour rire ») fleurissaient chaque année dans les journaux satirique et les revues illustrées parodiant les toiles présentées au Salon de la Peinture Dertall, Cham, Nadar, Xillette, Robida font partie des caricaturistes qui se plaisaient à cet exercice tout comme Gil qui fonda en 1869, un périodique explicitement intitulé _La Parodie_.
Quand Rodolphe Töpffer publie ses premières « histoires en estampes » dans les années 1830 non seulement ses récites parodient certains genre littéraires en vogue (le roman pastoral, le roman picaresque, le voyage d’instruction) mais ses dessins parodient aussi les poses mélodramatiques des acteurs de l’époque. Il semble bien qu’aux origines, le personnage de bande dessinée comique a été une parodie d’acteur !
De nos jours, la parodie est plus vivante que jamais (notamment sur Internet) : elle est en phase avec une culture de masse qui diffuse des références partagées par tous, avec la philosophie de la création postmoderne, caractérisée par le métissage des formes culturelles et avec le genre d’esprit qui domine l’humour de notre temps, l’esprit de dérision.
Ce périodique bimensuel a été fondé par Gill en juin 1869 : Jules Vallès et le dessinateur Albert Humbert furent au nombre de ses collaborateurs. La publicité annonce que « Cette feuille amusante et éminemment fantaisiste reproduit en charge l’événement du jour, la pièce ou le roman en vogue, le salon, l’actualité »
salon comique
anonyme (Cham ?) d’après des œuvres de Gill, Abbema, Pelez, Laurens et Baudry
2 LE MOMENT MAD
EN 1952 NAÎT MAD, PREMIER SUPPORT DE BANDE DESSINÉE À FAIRE DE LA PARODIE UN USAGE CONSTANT, UNE ARME PRIVILÉGIÉE ET SA VÉRITABLE « MARQUE DE FABRIQUE ». HARVEY KURTZMAN ET SON ÉQUIPE INVENTENT UNE NOUVELLE FORME DE COMIQUE BASÉE SUR LA SURENCHÈRE PAROXYSTIQUE, LE COMPORTEMENT HYSTÉRIQUE DES PERSONNAGES, LA MULTIPLICATION DES GAGS, DES INSCRIPTIONS SECONDAIRES ET DES ONOMATOPÉES, LE JEU DES MULTI-RÉFÉRENCES CROISÉES. DES DESSINATEURS FRANÇAIS COMME GOTLIB ET PÉTILLON EN SERONT MARQUÉS À JAMAIS.
E.C. est le nom d’une maison d’édition dirigée par William Gaines spécialisée dans les comic books. Elle recrute en 1950 un juif d’origine russe né a Brooklyn qui dessine depuis le plus jeune âge : Harvey Kurtzman (l924~l993). Deux ans plus tard, celui-ci reçoit carte blanche pour lancer un comic book d’humour. Avec ses complices, les talentueux dessinateurs Jack Davis Will Elder Jonn Severin et Wally Wood, il invente _Mad_ (dont le titre complet est _Tales calculated to drive vou Mad_, « histoires conçues pour vous rendre fou »).
Le No.l parait en août 1952. Kurtzman écrit intégralement les 23 premiers numéros.
Les parodies de Mad comptent entre six et nuit pages. et chaque numéro en propose trois ou quatre. En plus de s’attaquer à la littérature. au cinéma, au théâtre et à la publicité, _Mad_ prend pour cible, un a un, tous les héros les plus fameux de la bande dessinée américaine, spectaculairement tournés en dérision. Le succès est tel que. des 1953-54, les imitations de _Mad_ se multiplient : elles ont pour titre _Crazy, Eh !. Flip, Get Lost, Nuts!, Riot, Unsane_, etc. En décembre l953. E.C. augmente ses propres parts de marché en lançant un deuxième titre parodique. Panic, qui ne comptera que douze numéros. jusqu’en décembre 1955.
Transformé en magazine. _Mad_ survivra au départ de Kurtzman et paraît toujours. Le ton est resté satirique mais la parodie n’intervient plus que comme un ingrédient parmi d’autres. Chaque numéro comporte tout de même une mise en boîte d’un film ou d’une série télévisée à succès, exercice qui fut longtemps la spécialité du dessinateur Mort Drucker.
Ce récit de terreur, dans lequel un jeune couple tombe en panne à proximité d’une maison réputée hantée où ils vont chercher de l’aide, parodie le genre d’histoire qui avait fait la réputation de la maion E.C. (éditrice de _Mad_), avec des titres comme _The Vault of Horror_, _The Crypt of Terror_ et _The Haunt of Fear_.
3 LA PEINTURE AU SECOND DEGRÉ
DANS L’HISTOIRE DE LA PEINTURE. IL EXISTE UN PETIT CERCLE D’ICÔNES SANS CESSE REVISITÉES : PARMI CELLES-CI, LA _CÈNE_, DE VINCI, LE PORTRAIT DE GABRIELLE D’ESTRÉES AU BAIN, _LA VAGUE_ DE HOKUSAÏ, _LE CRI_, DE MUNCH, OU ENCORE _AMERICAN GOTHIC_, LE COUPLE DE FERMIERS PEINT PAR GRANT WOOD, POUR NE CITER QUE QUELQUES EXEMPLES.
Star incontestée de ce panthéon, _la Joconde_ détient le record des citations. Le geste de Marcel Duchamp ajoutant, en 1919, des moustaches et une barbichette à une reproduction du portrait de Mona Lisa, et inscrivant au dessous les lettres L.H.O.O.Q., plaisanterie phonétique à connotation graveleuse. est légendaire et peut être considéré comme l’emblème de la transgression parodique dans le domaine visuel.
Pour Mona Lisa, ce n’était qu’un début. L’artiste colombien Fernando Bolero la peint à des ages différents (en commençant. En 1959, par _Mona Lisa, age twelve_) : Robert Rauschenberg en juxtapose quatre versions maculées, barbouillées, sous le titre _Pneumonia Lisa_ : Roman Cieslewicz l’hybride avec Mao Zedong, etc. Les dessinateurs de bande dessinée ne seront pas en reste : Don Martin la représente grimaçante, atteinte de strabisme et de convulsions, ou posant sur la cuvette des WC : Fred et Alexis la mettent face a un Léonard trop jeune, qui ne sait pas encore dessiner : Geluck l’hybride avec son célèbre Chat, engendrant « Le Jocond ».
En 1973, sous le titre _Les Débutants célèbres de la BD_, Jean Ache publiait dans Pilote sept variations sur _Le Petit Chaperon rouge_. Le célèbre conte était raconté sous la forme d’une bande dessinée en une page, successivement à la manière du Douanier Rousseau, de Fernand Léger, Miró Picasso, Giorgio de Chirico, Bernard Buffet et Piet Mondrian. Les « débutants célèbres » sont donc des peintres confirmés, dont Ache s’amuse à appliquer le style (qu’il pastiche avec habileté) à la narration séquentielle.
En Allemagne. le collectif d’artistes « interDuck » revisite depuis 1982 toute l’histoire mondiale de l’art, en créant peintures, sculptures et installations en tous genres, dans lesquelles les œuvres les plus célèbres sont revisitées, avec Mickey ou Donald se substituant aux personnages d’origine.
4 L’HISTOIRE ET LA MYTHOLOGIE AU SECOND DEGRÉ
L’HISTOIRE ET LA MYTHOLOGIE NE SONT PAS, EN ELLES-MÊMES, DES ŒUVRES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE DÉTOURNÉES, MAIS ELLES REGORGENT D’HISTOIRES ET DE PERSONNAGES ANCRÉS DANS L’IMAGINAIRE COLLECTIF QUI, EUX, SE PRÊTENT À DES DÉTOURNEMENTS D’INSPIRATION PARODIQUE.
Ainsi, le dessinateur Jean Effel (1908-1982) est célèbre pour sa Création du monde inspirée de la Genèse. Dans ce cycle pubié au Cercle d’Art à partir de 1951, qui totalisera quelque 900 dessins. Effel met en scène Dieu, Satan et les anges, racontant la création d’Adam et d’Éve, puis leurs premiers pas sur la Terre, avec un humour bon enfant empreint de poésie.
En 1847, le jeune Gustave Doré, âgé seulement de quinze ans, publiait chez Aubert, à Paris. un album de bande dessinée intitulé Les Travaux d’Hercule, dans lequel il faisait du héros gréco-romain un petit gros qui s’essouffle à relever les défis que lui a lancès Euryste, tout cela pour gagner un pari dont l’enjeu est… une bouteille de bière !
Les figures les plus glorieuses de l’Histoire de France ont aussi été passées à la moulinette des humoristes. La Jehanne de F’Murr prend les plus grandes libertés avec le mythe de la Pucelle d’Orléans. C’est une aventurière portée sur la boisson, qui s’en va soutenir Attila dans ses campagnes (ils font ensemble le siège de Paris). Elle est en outre flanquée d’un amant extra-terrestre, qui se déplace avec les siens à bord d’un vaisseau-cathédrale.
Plus recemment, Jean-Yves Ferri a donné une version hilarante du « Grand Charles » dans son De Gaulle à la plage (2007) ou le général, qui n’est pas encore revenu au pouvoir, trompe son ennui sur la côte bretonne entre Lebornec, son aide de camp, et le chien Wehrmacht. Même en short et en tongs, il reste pénétré du sentiment de sa grandeur.
F’murr – TIM GALÈRE (1985)
Jehanne d’Arque présente à Attila son fils, Timofort (né d’un amant extraterrestre). Chez l’auteur du Génie des Alpages, le « fléau de Dieu » et la Pucelle ont fait le siège de Paris ensemble et s’entendent comme larrons en foire.
5 LES CLASSIQUES LITTÉRAIRES AU SECOND DEGRÉ
SANS COMPLEXES, LA BANDE DESSINÉE S’ATTAQUE AUX TEXTES LES PLUS RÉVÉRÉS DE LA LITTÉRATURE INTERNATIONALE ET EN PROPOSE DES VERSIONS DÉSACRALISÉES, SOUVENT COCASSES ET PARFOIS MÊME SALACES. EN 1842 DÉJÀ, CHAM SE MOQUAIT DU BESTSELLER DE FÉNELON EN PUBLIANT UN _TÉLÉMAQUE_, FILS D’ULYSSE.
Classique français par excellence, Madame Bovary a reçu un sous-titre sous le crayon d’Yves Chaland qui, dans sa Mme Bovary ou « _La fureur de vivre_ », résume le chef-d’œuvre de Flaubert en une seule page, entre romantisme et trivialité. Emma, l’héroïne, ne se reconnaîtrait sans doute pas dans le récit de ses aventures par Goossens (dans l’album Panique au bout du fil), ni dans la version de Monsieur Vandermeulen (_Littérature pour tous_), qui relate son histoire en utilisant le parler des banlieues, afin de la mettre à la portée des jeunes d’aujourd’hui.
Alexis et Gotlib ont livré de mémorables parodies de _Notre-Dame de Paris_ (Hugo), _Hamlet_ (Shakespeare), _La Dame aux camélias_ (Dumas fils) et _Les Malheurs de Sophie_ (Comtesse de Ségur) dans les deux volumes de leur _Cinémastock_ (1974). Les deux derniers récits cités relèvent d’un humour basé sur la surenchère : Marguerite Gautier a un nombre d’amants qui croit exponentiellement, et la petite Sophie s’accuse de forfaits de plus en plus énormes et improbables.
Depuis les années 1950, les dessinateurs italiens (notamment de Vita, Carpi, Scarpa et Bottaro) alimentent la série à succès des « classiques Disney ». Ils y ont fait interpréter par Mickey (Topolino) ou Donald (Paperino) les plus grands rôles du répertoire théâtral et de la littérature. Mickey, par exemple, a endossé celui de Dante dans _L’Inferno di Topolino_. Mais Donald est jugé plus malléable et ses avatars ne se comptent plus, de _Paperino Don Chisciotte_ à _Paperin de Paperac_ en passant par _Paperin-Amleto_ ou _Paperin-Hood_ – sans oublier _Paperino e l’oro di Reno_ (d’après la tétralogie de Wagner).
L’Américain Robert Sikoryak, quant à lui, creuse un filon original en croisant des classiques littéraires avec des comics célèbres. _La Métamorphose de Kafka_ est réinterprétée par Charlie Brown (le héros des _Peanuts_), Batman s’infiltre dans l’univers de Dostoievsky et Garfield, le chat glouton et paresseux de Jim Davis, incarne Méphistophélès dans une version inattendue de Faust.
Alexis & Gotlib – NOTRE-DAME DE PARIS d’après le roman de Victor Hugo – _ Cinémastock_
Wolinski – LA CHAMADE d’après le roman de Françoise Sagan
Robert Sikoryak – ACTION CAMUS
d’après _L’Étranger_ d’Albert Camus, raconté à travers de fausses couvertures d’Action Comics paru dans Masterpiece Comics, page 62, Drawn & Quarterly
Robert Sikoryak – CRIME AND PUNISHMENT
d’après Dostoievsky, à la façon d’un crime comics des années 1950 avec Batman en Raskolniov paru dans Masterpiece Comics, page 45 à 47, Drawn & Quarterly
6 LES CONTES AU SECOND DEGRÉ
Même si, dans la réalité, les contes de fées sont plus divers, surprenants, cruels, voire pervers qu’on ne le croit généralement, ils n’en ont pas moins fourni tout un répertoire de situations archétypales qui sont devenues des clichés : la bonne et la mauvaise fée penchées sur le berceau, le carrosse qui se transforme en citrouille ou la grenouille en prince charmant, la princesse enfermée dans sa tour, et ainsi de suite. Du pain bénit pour les humoristes, qui se plaisent à tordre ces situations dans tous les sens, jusqu’à l’absurde.
Les deux premiers tomes de la Rubrique-à-brac regorgent de parodies de contes, comme si Gotlib avait éprouvé le besoin de liquider, par l’ironie, tout ce qui pouvait le rattacher à l’enfance avant d’aborder d’autres sujets.
L’œuvre de Daniel Goossens est un vaste recyclage de stéréotypes empruntés à la littérature et au cinéma. Son humour acerbe et nonsensique, sa façon unique de mélanger le sublime et le trivial ont fait merveille dans ses relectures de _La Princesse au petit pois_ ou de _La Petite Fille aux allumettes_.
Dans le magazine de bandes dessinées féministe _Ah ! Nana_, Nicole Claveloux s’amusa, quant à elle, à dénoncer les stéréotypes sexistes en mettant en scène la rencontre entre _La Connasse et le prince charmant_ ou en montrant une _Planche Neiche_ cédant à la séduction d’ « une lessive qui dégraisse tout en un clin d’œil ».
Une autre dessinatrice, l’américaine Diane Noomin, dont le travail est principalement d’inspiration autobiographique, a dessiné une version très personnelle de _Boucle d’Or et les trois ours_ en faisant jouer le rôle titre par son alter ego de papier, Didi Glitz.
Le Petit Chaperon rouge reste l’un des contes les plus souvent revisités. Gotlib ne s’est privé d’en faire ressortir la dimension érotique latente. A l’aube de sa carrière, F’Murr s’est livré à une série de variations sur le thème de la fillette et du loup, en multiplianr les emprunts à d’autres contes de Perrault, aux _Contes de mon moulin_ de Daudet ou _aux Fables_ de La Fontaine.
Leone Frollo – I SETTE NANI VIZIOSI (les sept nains vicieux) Biancaneve, Milan, Edifumetto – juin 1983
F’Murr – AU LOUP ! édition Dargaud 1993
Série publiée dans Pilote en 1971 sous le titre Contes à rebours; album initialement paru en 1974 chez Minoustchine éditeur.
F’Murr – AU LOUP !
édition Minoustchine, 1974 – Dargaud 1993
Nicole Claveloux – PLANCHE NEIGE
récit complet en 8 planches paru dans
_Ah ! Nana_ N° 3 avril 1977
7 LE CINÉMA AU SECOND DEGRÉ
Dès les années 1910, certains comics strips s’inspiraient déjà des formes typiques du cinéma des premiers temps, et notamment des _serials_, ces films à épisodes diffusés successivement dans une même salle, en premiere partie de programme.
A partir de 1921, les _Minute Movies_, d’Edgar S. Wheelan, parodient toute la production cinématographique du moment, n’oubliant aucun des poncifs du western, du policier, de la comédie, du mélodrame et même de l’animation.
_Hairbreath Harry_, de Charles W. Kahles (1878-1931), visait initialement le mélodrame théâtral, mais les emplois de la jeune fille innocente et du traître à moustaches cirées et haut-de-forme migrent à cette époque vers l’écran. On les retrouve dans _Desperate Desmond_, de Harry Hershfield (1885-1974), dont le sous-titre est des plus explicites « _A Picture Drama of Love and Hate, with a Thrill in Every Picture_ ».
Dès les premières numéros, _Mad_ donne une version loufoque de _King Kong_ (qui devient _Ping Pong_) et s’attaque aux films-événements de réalisateurs comme John Ford, Joseph L. Mankiewciz, Elia Kazan ou Robert Wise, en parraissant vouer un culte tout particulier à l’acteur Marlon Brando. Dessinée par Wood, la parodie du film de Mankiewicz _Julius Caesar_ est l’occasion pour Kurtzman de pratiquer l’autodérision en se moquant de ses propres procédés parodiques, présentés comme typiques d’un humour « nauséeux, lamentable ».
En Italie, le dessinateur disneyen Giorgio Cavazzano donne en 1987 une version très particulière du célèbre film de Michael Curtiz _Casablanca_. Mickey et Minnie tiennent respectivement les rôles d’Humphrey Bogart et de Lauren Bacall, et chaque case renvoie fidèlement à un plan du film. Cavazzano récidivera en 1991 avec _La Strada_, d’après le film de Fellini.
Côté français, on retiendra notamment l’hommage décalé de Régis Franc au _mort à Venise_ de Visconti (dans _Histoires immobiles et récits inachevés_, 1982) , les délires de Gotlib autour des films de Truffaut, Welles ou Sergio Leone, le recyclage de Goossens des personnages d’Autant en emporte le vent mais aussi de l’imagerie des films de guerre ou d’horreur, ou bien cet improbable anti-récit intitulé _Prénom Félix_ (1984), dans lequel Fromental, Bacquet et Attanasio s’appropriaient les procédés de Jean-Luc Godard.
Ciorgio Cavazzano – CASABLANCA
d’aprés le film de michael Curtiz (1942) initialement paru dans _Topolino_ N°1657
30 juin 1987 repris dans _I Maestri Disney N°4_
Dans cette bande dessinée, exceptionnelemet publiée en noir et blanc (avec des gris posés au lavis), Mickey et Minnie tiennent respectivement les röles d’Humphrey Bogart et de Lauren Baall, chaque case renvoyant fidèlement à un plan du film.
8 LA TÉLÉVISION AU SECOND DEGRÉ
PARMI LES PROGRAMMES DU PETIT ÉCRAN, CE SONT D’ABORD LES FEUILLETONS (QU’ON N’APPELAIT PAS ENCORE SÉRIES) QUI ONT INTÉRESSÉ LES DESSINATEURS HUMORISTES, AVEC LEUR RHÉTORIQUE PARTICULIÈRE DES REBONDISSEMENTS SANS FIN, LEUR GOÛT DU PATHOS ET DES RETOURNEMENTS DE SITUATION, LEURS PERSONNAGES SOUVENT STÉRÉOTYPÉS.
Patrice Leconte (le futur cinéaste) s’en amusa dans Pilote avec sa _Longue Nuit de Korneblu_, dont les péripéties étaient suivies et commentées chaque soir par un couple de Français très ordinaires, à l’émotion facile. Dans Charlie mensuel. on a pu suivre longtemps le strip _Fosdyke Saga_, du cartoonist britannique Bill Tidy. dont chaque livraison commençait, en guise de résumé. par la phrase « La famille Fosdyke s’est enrichie grâce à la tripe et à l’opiniâtreté de ses membres. » Publié en Grande-Bretagne de l97l à 1985, le strip parodiait la série télévisée a succès The Forsythe Saga.
Plus récemment, l’album de Morvandiau, Mancuso et Arnal Santa _Riviera_ (2010), sous-titré « Le Venin des passions », a démonté les poncifs avec un humour nettement plus acide. La référence est ici, non seulement l’interminable et emblématique Santa Barbara (2137 épisodes diffusés aux Etats-Unis), déjà parodié à la télévision française par Les inconnus. mais plus généralement les _soap operas_ basés sur la trilogie « amour, gloire et beauté », sans oublier la haine, les jalousies et les coups fourrés. Dans l’album, les personnages ont les traits de Charles Bronson ou de la Princesse Diana.
Après les séries, ce sont surtout les jeux télévisés que se plaisent à moquer les dessinateurs. Fût-ce au prix d’anachronisme flagrants : dans l’épisode d’Astérix _Le Domaine des Dieux, _un tirage au sort au Cirque Maxime de Rome est animé par « le célèbre ordonnateur des Jeux Guilus », un Guy Lux plus vrai que nature. Le même animateur fameux se retrouve en couverture de l’album collectif _A vous Cognacq~Jay !_ (2010), qui évoque facétieusement quelques » grandes heures de la télévision » française. L’incontournable Gotlib avait, quant à lui, donné un mémorable _Tac au tac_, d’après le jeu de jean Frapat, dans lequel s’affrontaient en une joute graphique picasso, dali, Bernard Buffet et… Reiser.
Jack Davis – NOËL TALENT
paru dans _The Madniks_ N°2 1970, planche 11 et 12
jack Davis parodie ici les séries ayant l’hôpital pour cadre
Gotlib & Alexis – chapeau melon et bottes de cuir
Pilote N°583, 7 janvier 1971
Goscinny & Uderzo –
le domaine des dieux
Dargaud, 1972, planche 27
l’animateur de jeux Guilus est une caricarure de Guy Lux
9 LE MOMENT SITUATIONNISTE
DÉJÀ PRATIQUÉE PAR DADA ET LAUTRÉAMONT, LA PRATIQUE DU DÉTOURNEMENT D’IMAGES FUT CARACTÉRISTIQUE DU MOUVEMENT LETTRISTE PUIS DU SITUATIONNISME, QUI LUI SUCCÉDA. L’INTERNATIONALE SITUATIONNISTE ÉTAIT UN MOUVEMENT PHILOSOPHIQUE INSURRECTIONNEL, FONDÉ EN 1957, DONT LES MEMBRES LES PLUS CONNUS FURENT GUY DEBORD ET RAOUL VANEIGEM. SON PROJET ÉTAIT DE _CHANGER LA VIE_ ET DE RÉALISER LE VIEUX RÊVE D’UNE SOCIÉTÉ SANS MAÎTRES NI ESCLAVES.
Dans le N° l7 de l’_Internationale situationniste_, René Vienet publia un article dans lequel il encourageait ses camarades à détourner les photos-romans, les mass-medias [par exemple en ajoutant des phylactères subversifs à des affiches publicitaires), les bandes dessinées et les films. En l968,des dizaines de bandes dessinées détournées fleurirent au milieu des tracts politiques. Les situationnistes considéraient le détournement de bandes dessinées Comme une nouvelle conception de la praxis révolutionnaire.
Quelque quarante ans plus tard. Jean Luc André reprit cette pratique à son compte. Auteur de quelques bandes dessinées d’avant garde dans les années 1980, puis devenu artiste de galerie André autoédite des bandes dessinées de petit format, dont la plupart des dessins sont repris d’épisodes de « pockets » comme _Battler Britton_, _Totem_, _Mustang_, _Rodéo_, _Zembla_ ou _Akim_, et il prête à ces cow-boys, ces soldats de la Wehrmacht et ces fils de la jungle des dialogues truffés d’emprunts et allusions … aux situationnistes, précisément mais aussi à Deleuze, Wittgenstein ou a l’école freudienne de Paris.
Les membres de l’Ouvroir de bande dessinée potentielle (Oubapo) se sont eux aussi adonnés a ce qu’ils appellent des exercices de « substitution verbale ». L’un d’eux. François Ayroles. a par exemple remplacé les textes de la plus célèbre page de _Little Nemo in Slumberland_ (celle du lit qui marche) par un extrait de la _Traumdeutung_, de Freud. dont les réflexions sur le rêve tombent très a propos. Il a aussi remplacé les dialogues des premières pages d’un album de _Michel Vaillant_ par des réflexions des personnages sur la manière dont ils sont dessinés et mis en scène, transformant ainsi une bande dessinée d’aventures classique en méta-BD jubilatoire.
INTERNATIONALE SITUATIONNISTE
affiche annonçant la sortie d’_Internationale situationniste_ N° 11 1967
andré Bertrand sur un texte de Raoul Vaneigem
LITTLE NEMO IN SLUMBERLAND de Winsor McCay, planche du 26 juillet 1908
avec le texte d’orignie remplacé par un passage de _L’Interprétation des rêves_, de Freud
François Ayroles
Le prolétariat comme sujet et comme représentation
Une bande dessinée d’aventure américaine est détournée, son texte est remplacé par des extraits du livre de Guy Debord La société du spectacle.
anonyme (mouvement situationniste)
10 LA BANDE DESSINÉE SE RIT D’ELLE-MÊME
LES CLINS D’ŒIL CONFRATERNELS SONT FRÉQUENTS DANS LA BANDE DESSINÉE. CHEZ GOSCINNY ET UDERZO, CHAQUE FOIS QU’ASTÉRIX ET OBÉLIX PRENNENT LA MER, ILS RENCONTRENT LE MME ÉQUIPAGE DE PIRATE QUI, POUR AVOIR REÇU UNE OU DEUX RACLÉES, SE SABORDENT GÉNÉRALEMENT SANS MÊME TENTER L’ABORDAGE. CES ÉCUMEURS DES MERS PARODIENT LES PERSONNAGES DE LA SÉRIE _BARBE-ROUGE_, CRÉÉE PAR CHARLIER ET HUBINON, DONT LES AVENTURES PARAISSAIENT DANS _PILOTE_, TOUT COMME CELLES D’ASTÉRIX.
L’un des premiers dessinateurs à avoir parodié de façon insistante une autre bande dessinée est l’Américain Al Capp (1909-1979), l’auteur du comic strip _Li’l Abner_. Il prête à son héros une véritable passion pour une bande dessinée policière, _Fearless Fosdick_, attribuée a un certain Lester Gooch. Les aventures de Li’l Abner s’interrompent régulièrement pour céder la place à celles de Fosdick. que nous sommes donc censés lire avec lui, par dessus son épaule.
Or, _Fearless Fosdick_ est une parodie transparente de Dick Tracy, célèbre _detective strip_ créé par Chester Gould en 1931 (le profil anguleux de Fosdick et son éternel couvre-chef reprennent des traits caractéristiques de Tracy). Roi de la gâchette, Fosdick n’acccorde aucune valeur à la vie humaine et fait des dizaines de victimes à chacune de ses enquêtes, en étant généralement couvert voire félicité par sa hiérarchie.
Dans les pages de _Vaillant_, le chien _Gai-Luron_ parodia sous le crayon de Gotlib, d’autres héros du journal, comme _Nasdine Hodja_ ou Le _Concombre masqué_. Dans Spirou, Walthéry, ancien assistant de Peyo, transforma un personnage de son mentor, _Benoît Brisefer_ en « Bébert Brisenoix ». Et le créateur de Cubitus. Dupa, consacra un album entier (_l’Ami ne fait pas le moine_, 1984) à mettre en boite ses principaux collègues du journal Tintin.
Toutefois, ces hommages peuvent être diversement appréciés. En 1976, quand Marion Vidal publia un essai intitulé _Monsieur Schulz et ses Peanuts_, elle demanda à 28 dessinateurs de livrer leur propre version de Charlie Brown, Snoopy et les autres. Ce ne fut pas du goût de Schulz et de son agent, qui attaquèrent pour plagiat, pornographie et atteinte au droit moral de l’auteur. lls furent déboutés en première instance et en appel.
ASTÉRIX AUX JEUX OLYMPIQUES
Goscinny & Uderzo
planche 16, les pirates sont un clin d’œil parodique à la série _Barbe-Rouge_, de Charlier et Hubinon
LA REINE DES MOUCHES
Goossens
parodie de _Blake et Mortimer_
les invraisemblables aventures d’istérix – collectif
féminax & walkyrax – Franziska Becker
les aventures de sarkozix – Lupano, Bazile & Maffre
CAPTIVANT – Yves Chaland & Luc Cornillon
Cet album est un faux recueil réunissant des numéros épars censés retracer l’histoire d’un « illustré » qui n’a jamais existé en réalité. Des publicités renvoient à des albums tout aussi fictifs. Toutes les bandes dessinées, réalisées par Chaland et Cornillon, pastichent au parodient des genres d’aventures et des styles graphiques typiques de la bande dessinée américaine ou franco-belge classique.
11 LES ARMES DE LA TRANGRESSION
LE NOMBRE DE PARODIES QUI LES VISENT EST UN ASSEZ BON INDICATEUR DE LA NOTORIÉTÉ D’UNE ŒUVRE OU D’UN PERSONNAGE, ET DE LEUR IMPACT SUR IMAGINAIRE DE L’ÉPOQUE. COMME LA JOCONDE L’EST POUR LA PEINTURE, SUPERMAN OU BLAKE ET MORTIMER SONT DE VÉRITABLES ICÔNES DANS LE CHAMP DE LA BANDE DESSINÉE. MAIS C’EST TINTIN ET MICKEY MOUSE QUI DÉTIENNENT LE RECORD DES DÉTOURNEMENTS EN TOUS GENRES ET DES VERSIONS « PIRATES ».
Incarnation des valeurs de l’Amérique bien-pensante, les productions Walt Disney furent prises à partie quand on entra dans l’ère de la contre-culture. Parmi les parodies les plus offensantes figurent un célèbre poster dessiné par Wallace Wood en 1966, _Disneyland Memorial Orgy_, ou Mickey et ses amis sont engagés dans des activités fort peu conformes à leur image, et les deux numéros des _Air Pirates Funnies_ (1971), conçus par Dan O’Neill, Ted Richards, Bobby London et Gary Hallgren, qui donnèrent lieu à un procès retentissant et a épisodes, jusqu’à l’abandon définitif des poursuites en 1980.
La plus ancienne imitation satirique visant Tintin remonte à 1944. Ces dernières décennies, plus de 100 albums autoédités et généralement diffusés hors commerce se sont accaparés la légende du reporter à la houppette. Rebaptisé « Zinzin » par le Suisse Exem ou « Nitnit » par le Québécois Henriette Valium, Tintin a vécu malgré lui des aventures érotiques burlesques. politiques (embrigadé pour combattre en Irak, au Salvador ou en Irlande), tandis que plusieurs dessinateurs « terminaient » à leur manière l’épisode inachevé _Tintin et L’Alph-Art_.
La parodie érotique ou pornographique constitue un véritable sous-genre en soi. Aux éditions C.A.P. on vit paraître des albums transformant _Les Pieds Nickelés_ en « Pieds Niqueurs » et _Bibi Fricotin_ en un « Titi Fricoteur » passablement déluré. Longtemps considérés comme le paradis de la licence sexuelle en Europe, les Pays-Bas sont à l’origine de détournements pornographiques d’un certain nombres de héros parmi les plus célèbres de la bande dessinée enfantine belge. _Lucky Luke_, L_es Schtroumpfs_ ou _Bob et Babette_ se virent ainsi arraché à l’enfance et plongé dans des ébats torrides.
DISNEY MEMORIAL ORGY
paru dans The Realist
Wallace Wood
Les Air Pirates étaient le nom d’un groupe d’adversaires combattus par Mickey dans les années trente, dans les histoires dessinées par Floyd Gottfredson. Quatre dessinateurs underground, Dan O’Neill, Ted Richards, Bobby London, and Gary Hallgren, le reprennent à leur compte en 1971 lorsque’ils font paraître les deux numéros d’Air Pirate Funnies. Mais la plupart des histoires s’emparent des personnnages disneyens pour leur prêter des comportement adulstes, voire déviants, impliquant noramment la drogue, le sexe et la politique
La couverture du premier numéro, dessinée par London, montre Mickey pilotant un avion de combat lesté de drogue. Disney attaque en 1971. Après de multiples rebondissement judiciaires, constatant qu’elle ne récupérerait pas les 190 000 dollars de dommages et intérêts qui lui étaient dus et qu’elle avait déjà dépensé quelque 2 000 000 de dollars en frais d’avocats, la Disney Company dédide en 1980 d’abandonner toute poursuite, contre l’assurance donnée par les quatres dessinateur de ne plus utiliser ses personnages.
MICKEY RODENT – Harvey Kurtman & Bill Elder
initialement paru dans _Mad N°19_, ici réédité dans _Tales calculated to drive you Mad N°7_
Donald s’étonne que la signature en bas de la case 2 ne soit pas celle de Walt Disney. Enfermé par Mickey, il se retrouve au milieu de vrai canards, dans une bande dessinée de style réaliste.
TINTIN À PARIS – Callico & Huart
L’histoire a pour toile de fond les événements de mai 68. La rédaction du journal bruxellois « Le petit Cinquantenaire » envoie Tintin à Paris. À peine arrivé, il se fait kidnapper par un certain Geremi, qui lui ressmeble comme deux gouttes d’eau, à ceci près qu’il est un peu plus blond et qu’il arbore une deuxième houppe, plus petite, à l’arrière du crâne.
Geremi se révèle être le fils de Tintin. Il entend aujourd’hui se venger de son géniteur, qui est traduit en jugement devant cinq accusateurs masqués, qui l’accusent de recisme, colonialisme, anticommunisme, antisémitisme et misogynie.
12 LES SUPER-HÉROS AU SECOND DEGRÉ
LA FIGURE DU SUPER-HÉROS SE PRÊTE ESSENTIELLEMENT À DEUX SORTES DE MISES EN BOÎTE. LA PREMIÈRE EST LA DISQUALIFICATION MORALE : LE CHAMPION EST INTÉRESSÉ, VÉNAL, OU DÉFEND UNE IDÉOLOGIE DÉTESTABLE. LA SECONDE CONSISTE DANS LE RETOURNEMENT DES TRAITS CENSÉS FONDER LA SUPÉRIORITÉ DU PERSONNAGE SUR LE COMMUN DES MORTELS. LE SUPER-HÉROS EST UN SURHOMME : ON EN FAIT UNE SOURIS OU UN LAPIN. IL EST SURQUALIFIÉ : ON EN FAIT UN MINABLE, UN INCOMPÉTENT. IL S’EMPLOIE À DES EXPLOITS HORS NORME : ON MET SES POUVOIRS AU SERVICE DE TÂCHES DÉRISOIRES.
En novembre 1958. l’éditeur DC invente Bizarro. Le double imparfait de Superman Les _Tales of the Bizarro World_ se passent sur une planète de forme cubique où les hommes portent tous le costume de Superman mais s’en distinguent par leur visage livide, leur peau craquelée leurs cheveux ébouriffés – ainsi que par leur intelligence limitée et leur syntaxe déficiente. Dans ces histoires, c’est en vérité le monde des humains qui est parodié, sur le mode du renversement généralisé. Car le monde Bizarro obéit à une formule, répétée dans chaque épisode : « _Us do opposite of all Earthly things_ ».
La compagnie Marvel lance en l967 un comic book à vocation expressément autoparodique : _Not Brand Echh_, qui connaît 13 numéros entre 1967 et 1969 Captain America y est rebaptisé « Charlie America » The Silver Surfer « Silver Burper » etc. Dans le dernier numéro Marie Severin dessine une histoire dont le postulat est que la Marvel loue désormais ses personnages à des particuliers. C’est ainsi que, pour le compte des familles qui les emploient on voit Spider-Man tisser un hamac, le Sub-Mariner nettoyer une piscine ou Iron Man réparer la plomberie.
_Bugs Bunny_ serait le premier animal à s’être mué en super-héros, le temps d’une histoire dans laquelle il apparaissait en « Super-Duper Rabbit ». Les super-héros à poils ou à plumes ont, ensuite proliféré : _Mighty Mouse_, _Atomic Rabbit_, _Atom the Cat_, _Thunder Bunny_, _Super Goof_, … jusqu’au très populaires _Teenage Mutant Ninja Turtles_ inventées par Kevin Eastman et Peter Laird en 1984.
THE SENSATIONAL SHE-HULK – John Byrne
N°2 huin 1989 page 2-3 & page 6
Jennifer Walters, avocate, est la cousine de Bruce Banner, le scientifique qui se métamorphose en Hulk depuis qu’il a été irradié par des rayons gamma. Elle se transforme à son tour en She-Hulk après qu’elle ait reçu le sang de son cousin à la faveur d’une tranfusion. John Byrne en fait un personnage parodique dans cette série qui comptera 60 numéros, jusqu’en 1994. Le numéro deux est placé tout entier sous le signe de l’humour réflexif (ou métanarratif). Tom De Falco, le rédacteur en chef, et John Byrne, l’auteur, communiquent par petits billets, accrochés au bord des planches par des trombines en trompe-l’œil. « Où est l’action ? La grandeur cosmisque ? La magnificence qui est la marque de Marvel ? » demande ici le premier, atterré par cette double page vide.
LES HÉROS DE L’EQUINOXE – pierre Christin & Jean-Claude Mézières
Vaérian, qui représente la Terre, est dépourvu de superpouvoirs, affronte en une série d’épreuves les champions de trois autres planètes, trois variations sur le mythe du super-héros, trois alternatives ou stéréotype américan : le guerrier en armure (armé d’une épée), le super-héros prolétarien (armé de chaînes), le gourou écologiste (aux méthodes douces mais douteuses). Chacun d’eux incarne caricaturalement une idéologie et un modèle de société.
C’est ironiquement, le plus faible des quatre, et le plus humain, Valérian donc, qui sortira vainqueur de leur compétition, parce que, lui explique-t-on, on n’aime pas trop « ces gens qui prétendent mettre le futur dans des boîtes dont ils sont les seuls à avoir les clefs ».
13 LA PARODIE DE GENRE
CERTAINES PARODIES NE VISENT PAS UNE ŒUVRE EN PARTICULIER MAIS BIEN UN GENRE EN TANT QUE TEL, C’EST-À-DIRE UN RÉPERTOIRE DE THÈMES, DE SITUATIONS, DE RÔLES ARCHÉTYPES. LA PLUPART DES GENRES QUE LA BANDE DESSINÉE A HÉRITÉS DE LA LITTÉRATURE POPULAIRE ONT DONNÉ LIEU À DES VERSIONS PARODIQUES.
Ainsi, _Adèle Blanc-Sec_, de Tardi ou _Blanche Epiphanie_, de Lob et Pichard, rejouent ironiquement les clichés et la rhétorique du roman-feuilleton. Lewis Trondheim tourne le récit de cape et d’épée en dérision dans _Mildiou_ (1994), où le duel être le héros et le traître, au lieu d’être le climax dramatique, situé vers la fin est étirée sur cent quarante pages et se confond avec le récit même. _Bienvenue aux Terriens_, de Pétillon (1982), partant du principe que dans la science-fiction il n’y a aucun frein à l’imagination, imagine un gouvernement terrien dirigé par une « tranche de museau vinaigrette d’une intelligence supérieure ».
Le même Pétillon se moque du polar avec son détective nabot et passablement demeuré _Jack Palmer_. Mais la parodie de récit policier passe souvent par l’animalisation du détective : il suffit de penser au _Canardo_ de Benoît Sokal (1978) ou à _La Vache_ de Demoor et Desberg (1992), dont l’héroïne « Pi 3,1416, agent de l’intelligence animale » quitte sa ferme, revêtue de la panoplie typique de l’emploi (imperméable et feutre mou), pour mener des enquêtes allègres et débridées.
Dans un western, la « règle du jeu » du genre veut qu’il soit question de virilité, de bravoure, et les personnages doivent observer un code de l’honneur. Dans un western parodique, le héros sera veule et corrompu (_Al Crane_, de Lauzier et Alexis) ou plus préoccupé (_Gus_, de Christophe Blain). Chez Jason, les duels se règlent, non avec des six-coups, mais par des parties d’échecs, tandis que le saloon ne sert qu’un seul breuvage : du café (_Low Moon_, 2008).
POT-SHOT PETE – Harvey Kurtzman
Au cours des années précédant immédiatement la création de _Mad_, soit entre 1950 et 1952, Kurtzman sema une demi-douzaines de brèves histoires dans diffèrents comics de la Marvel, ayant pour héros Pot-Shot Pete, shérif à Yucca-Pucca Gulch. Censé être un dur-à-cuire. Pot-Shot Pete tue, par mégarde, mais sans états d’âme, des innocents, et s’évanouit pourt au seul énoncé du nom des terribles « Mc Yetnit Boys ». Le trait qui le caractérise le plus nettement est le refus obstiné qu’il oppose à sa fiancée, laquelle attend (depuis dix ans) qu’il veuille bien l’embrasser. Aussi le poursuit-elle comm son ombre en réclament inlassablement « Pot-Shot ! Kiss me ! »
RANCHO BRAVO – Blutch & Capron
Cet album est composé de courts récits indépendants les uns des autres. Ces pages-ci content le destin du sénommé Dusty Graves : adolescent, il massacre des poussins à coup de masse et voue un culte à un desperado mythique auquel il espère ressembler un jour; presuadé qu’il lui faut « buter un type » pour devenir un homme, il n’aura cependant pas le cran de le faire et ne réussira qu’à se tuer lui-même, accidentellement, en nettoyant son arme.
LES AVENTURES D’AL CRANE – LE RETOUR D’AL CRANE – Alexis & Lauzier
Dans cette série d’une noirceur sans rémission, le héros Al Crane est un être sans foi ni loi, dépourvu de toute compassion, massacreur d’indiens, corrompu, vénal, raciste et misogyne. Toutefois, ce personnage repoussoir n’est pas présenté comme un fiéffé coquin mais plutôt comme le produit conforme d’une société qui marche sur la tête.
Alesxis ponctue ironiquement la série d’un gag visuel récurrent, celui du personnage-écran : un ouvrier (charpentier ? accessoiriste ?) étranger à l’action passe opportunément dans le champ de l’image pour masquer au lecteur, chaque fois qu’il est nécessaire, certaines représentations ou phrases supposées choquantes.
CALVIN EN TRACER BULLET – bill Watterson
A la manière d’un Snoopy dans _Peanuts_, Calvin se projette volontiers dans un certain nombre de rôles « héroïques » : en aviateur, en astronaute ou, ici, en détective. Watterson modifie son esthétique pour l’occasion parodiant l’ambiance des films noirs.
14 L’AUTOPARODIE
UN ARTISTE PEUT VOULOIR S’AMUSER DE SA PROPRE CRÉATION, TOURNER SES PROPRES CODES EN DÉRISION ET LIVRER UNE VERSION DÉCALÉE DE SON TRAVAIL ANTÉRIEUR. CE FAISANT, IL COUPE EN QUELQUE SORTE L’HERBE SOUS LE PIED DES RIEURS EN DEVENANT SON PROPRE PARODISTE.
Ainsi, Christophe, après avoir fait faire le tour du monde à sa _Famille Fenouillard_; leur inventa un cousin. Zéphyrin Brioché dit « le Savant Cosinus », lui aussi épris de voyages mais qui ne réussit jamais à quitter Paris. D’une certaine façon, on peut dire qu’Hergé s’est autoparodié dans _Les Bijoux de la Castafiore_, en relevant la gageure d’une histoire où il ne se passerait à peu près rien, ou l’on ne quitterait jamais Moulinsart et où le seul coupable démasqué par Tintin se révélerait n’être qu’une pie.
Longtemps après l’avoir abandonné, Gotlib a ressuscité son héros canin _Gai-Luron_ en l’affublant d’un slip moulant des attributs mâles qui disparaissaient dès qu’il se retrouvait nu. Pour Le Trombone illustré (supplément au journal Spirou) Jijé signa, sous le titre _Que Barbaridad !,_ quelques planches où il se moquait avec une réjouissante causticité de l’une de ses œuvres maîtresses le western _ Jerry Spring_.
Le chef-d’œuvre de _Chris Ware,_ _Jimmy Corrigan the Smartest Kid on Earth_ (2000), ménage en son sein un espace dédié à sa propre parodie. Au bout de 70 pages, la narration est interrompue par deux pages en bichromie données comme le « résumé de notre histoire à ce stade, avec commentaires et explications ». Ce résumé sans nécessité consiste en une suite de retours sur des scènes déjà lues, réinterprétées sur le mode comique.
Enfin, les six tomes de la série _lnside Moebius_ sont l’occasion, pour l’auteur _d’Arzach_ et de _Blueberry_, de faire se côtoyer tous les personnages qu’il a créés en une méditation ironique sur les ressorts de sa création. Moebius se dépeint aux prises avec la panne d’inspiration, le manque d’humour les interrogations sur son dessin. Ses héros et lui-même feignent d’avoir perdu « le mode d’emploi » de leur art.
fludie glacial N°1 et N°286 spécial « 25 ans »
A vingt-cinq ans de distance, gotlib reprend le mëme personnage de fakir, en un peu plus fatigué
LA BATAILLE NAVALE… OU GAI-LURON EN SLIP – Gotlib
L’œuvre dessinée gotlibienne se termine en 1986 par cet ultime album en forme de retour sur sa première grande série, Gai-Luron. Cette fois la sexualité du chien flegmatique est frappée d’une curieuse ambiguïté : la protubérance qui déforme son caleçon (qui grossit quand Gai-luron serre sa bien-aimée, Belle-Lurette,dans les bras) laisse deviner un sexe hypertrophié, mais celui-ci est invisible, inexistant, dès l’instant où Gali-Luron est nu.
GEEK BROTHERS – Jay Linch d’après les _Fabulous Furry Freak Brothers_ de Gilbert Shelton dans _Biijou Funnies_ N°8
_Bijou Funnies_ est un des titres phares de la bande dessinée underground. Le numéro 8 est entièrement autoparodique, les dessinateurs s’échangeant leurs personnages.Ainsi, William Williamson dessine une version décalée du _Mr Natural_ de Crumb, sous le titre « Melvin Natural ». Son propre héros récurrent Snappy Sammy Smoot, devient « Snappy Melvin Stoot » sous le crayon de William Stout. Trashman, Nard ‘n Pat ou encore le Cheech Wizard de Vaughn Bodé, entre autres personnages emblématiques de _l’underground_, sont eux aussi moqués, détournés.
L’ensemble du numéro est placé sous le signe de la référence à _Mad_ : la couverture pastiche Harvey Kurtzman et le comic est rebaptisé « _Tales calculated to sell you Bijou_ ».
Le personnage a inspiré un si grand nombre d’imitations, de pastiches et de parodies (parmi lesquelles Gilbert le Barbant, de l’écrivain français Pierre Pelot), que le grand public connaît moins aujourd’hui les récits épiques et crépusculaires de Howard que la caricature du héros sous la forme d’un barbare analphabète à la musculature hors du commun. La bande dessinée américaine a donné des versions sérieuses et même grandiloquentes du personnage, notamment sous le crayon de Barry Windsor-Smith dans les années 1970, qui, à leur tour, ont inspiré les parodistes.
L’univers du Cimmérien est notamment moqué dans l’avant-dernier épisode de Little Annie Fanny, la pulpeuse et candide héroïne créée par Kurtzman et Elder pour Playboy, et dans les premiers numéros de Howard The Duck, un canard marxiste (tendance Groucho) inventé par Steve Gerber et dessiné d’abord par Frank Brunner. Howard y quitte veste et cravate pour endosser le costume du barbare et évoluer au milieu d’une population de magiciens, de monstres et de femmes dévêtues.
Un autre animal, l’oryctérope Cerebus, créé par le Canadien Dave Sim en 1977, parodie lui aussi Conan dans les premiers épisodes d’une saga qui en comptera 300 au total. Six ans plus tard, quand l’auteur envisage de porter son personnage à l’écran, il renoue avec cette inspiration et anime une séquence dans laquelle Cerebus reçoit sa première épée des mains d’un forgeron qu’il tue accidentellement en maniant l’arme.
Les dessinateurs underground, eux aussi, se sont moqués de Conan, notamment Gilbert Shelton et Jaxon, ce dernier donnant vie à « Testicles the Tautologist » en 1971. Enfin Sergio Aragonés, pilier du magazine Mad, livre depuis 1982 une version humoristique du mythe avec son Groo the Wanderer, bouffon à l’esprit étroit,mais très compétent au maniement de |’épée.
ROBIN DES BOIS
Robin est popularisé par Walter Scott et Alexandre Dumas, entre autres auteurs, puis par quantité de films, dont celui de Michael curtiz en 1938. On le met à toute les sauces. Ainsi, à l’écran, son univers a été hybridé avec celui de Star Trek et celui des gangsters de Chicago. La popularité du personnage ne s’est jamais démentie. Dans la version de Mad, dessinée par John Severin, les compagnons de Robin sont rebaptisés comme les nains de Blanche Neige : Joyeux, Dormeur, Atchoum, Prof, et ainsi de suite.
Outre Gotlib, avec son « Gai-Luron des Bois », deux dessinateurs français se sont emparés du personnage avec malice. Chez F’Murr, « Robin des Boîtes » est un piètrearcher et Lady Marianne le prend pour un crétin. Il assassine son roi, Richard « Gard de lyon » ou « quart de lion », selon l’inspiration. Dans ce petit album (1985) où Petit-Jean se promène en kilt et le shérif de Nottingham en tenue de cox-boy. F’Murr s’inscrit clairement dans la filliation de l’esprit Mas. En atteste, par exemple, cet écriteau typique : » Par la suite d’un arrêt de travail d’une certaine catégorie de personnel, cette image se trouve privée de décor ».
Larcenet, lui, représente Robin en nabot frappé par le grand âge et la maladie d’Alzheimer. Chaque fois qu’il se met à déraisonner, son compère Petit-Jean lui assène un coup de gourdin sur la tête et il retrouve ses esprits. L’action se situe, non dans la forêt de Sherwood, mais dans celle de Rambouillet. Vétu, ici encore, comme un héros de western, le shérif local va répétant « blood and guts ! » Quant à Lay Marianne, elle est devenue mocher et tout ce que robin trouve à lui dire, c’est « Me touche pas, vielle peau ».
SHERLOCK HOLMES
Devenu mythique, il a inspiré de nombreux écrivains (James Barrie, l’auteur de _Peter Pan_, grand ami de Conan Doyle, a écrit deux récits parodiques) et, naturellement, aussi les cartoonists. Quand au tout premier film (muet) consacré à Sherlock Holmes, c’était déjà une parodie.
Le personnage apparaît très tôt dans l’histoire de la bande dessinée. Walter Quermann en fait un chien dans _Inspector Bones_. Avan de devenir célèbre pour sa série familiale _The Gumps_ (La Famille Mirliton), Sidney Smith se consacre brièvement à _Sherlock Holmes Jr_ (1911). En 1910, Gus Mager dessine « Sherlocko the Monk » (monk pour monkey) et son complice « Watso » comme des singes. Trois ans plus tard, il leur redonne apparence humaine, les rebaptise « Hawkshawk the Detective » et « The Colonel » mais les attributs du héros (casquette à carreaux, loupe) demeurent les mêmes.
Dans Mad, Kurtzman et Elder s’intéressent à deux reprises au cas de Shermlock Shomes » et du « Dr. Whatsit ». Quelque peu hystérique, le célèbre détective éborgne tous ceux qui l’approchent quand il joue du violon et, même truffé de plomb, continue à discourir interminablement; l’enchaînement de ses déductions de plus en plus tordues finit par le rendre fou à lier.
Dans la série Baker Street, les Français Veys et Barral peignent un Holmes facétieux et imbu de lui-même, tout en s’amusant de tous les ckichés ayant cours sur la Vieille Angleterre. Quand a Pétillon, son Chien des Basketville est une improbable et délirante synthèse entre le Chien des Baskerville de Conan Doyle et l’Amant de Lady Chatterley de D.H. Lawrence, avec, de surcroît, des clins d’œil à Tintin.
TARZAN
Une liane, un slip léopard, un cri : tel sont les trois attributs essentiels du « seigneur de la jungle », tel que le myrhe l’a consacré. Apparu pour la première fois en 1912 dans le roman d’Edgar Rice Burroughs Tarzan of the Apes, ce fis d’aristocrates anglais élevé parmi les singes ne rencontre les humains qu’à l’âge adulte.
Son destin hors normes soulève des questions telles que le respect de la vie animale, les rapports entre nature et culture ou encore l’animalité de l’homme.
Adapté en bandes dessinées dès 1929, Tarzan y donnera son nom à un « illustré » français et aura de nombreux imitateurs, tels Zembla, Akim ou Ka-zar, cependant que Sheena, reine de la jungle, et beaucoup d’autres princesses plus ou moins dévêtues, féminiseront le mythe. Quand aux parodies, elles défient le recensement. Kurtman et Severin dessinent Melvin of the Apes dans Mad N°.2; le premier cité crée plus tard, avec Bill Elder, un personnage de candide nommé Goodman Beaver qui, lui aussi, rencontre Tarzan dans un épisode mémorable.
Avec Crazy Crazy (1974), sous-titré « le livre de la jungle », Guillermo Mordillo enchaîne les variations muettes et absurdes mettant aux prises un Tarzan nain avec les différents anumaux de la création.
L’un des premiers dessinateurs français à s’être approprié le personnage fur Marijac, qui créa Tar-Flan pour Coq Harqi, journal où parut aussi la parodie signée de l’Italien Jacovitti. Fred avec Tarsinge, l’homme-zan (dans Hara-Kiri en 1961) et Régis Franc, avec Trazan le flippé de la jungle (dans l’album Souvenirs d’un menteur), notamment, leur emboîteront le pas. Quant à Boucq, il fera de son placier en assurances Jérome Moucherot une sorte d’improbable synthèse entre un petit employé et un fier aventurier de la jungle.
Mais le dessinateur pour qui Tarzan semble représenter une veéritable obsession est Gotlib. Les allusions à Lord Greystoke fourmillent dans son oeuvre. On retiendra tout particulièrement les pages où Tarzan apprend de la bouche du Grand Singe à pousser son célèbre cri, et celles où l’on assiste à son « Petit lever ». Gotlib parodie là plus particièrement la version fameuse donnée par le dessinateur Bruce Hogarth, champion de la musculature hypertrophiée, « à la Michel-Ange ».
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