Interview

Entretien avec Jean-Paul Bordier

SCENEARIO : Bonjour Jean-Paul. Ce mois de mars 2009 voit la sortie de Souvenirs d’un elficologue dont le scénario est signé Thierry Gloris. Comment en es tu venu à la bande dessinée ? Comment as-tu rencontré le scénariste et comment as-tu accepté cette histoire et collaboré avec Thierry Gloris ?

Jean-Paul Bordier : Aussi loin que je me souvienne j’ai toujours voulu raconter des histoires aux gens, tout petit je montais des mini-spectacles avec des décors en cartons, je reproduisais en BD les histoires farfelues inventées la journée lorsque je jouais dans les bois avec mes cousins, je ne m’endormais jamais sans lire quelques pages d’ Astérix même si c’était pour la 30ème fois!! Avec mes cinq grands frères et soeurs, j’ai baigné dans un climat très créatif à la maison, chacun m’apportant une influence, l’un adorait les westerns, l’autre les films de science fiction, etc.. tout ça a créé un bouillonnement très fort dans ma tête et j’ai toujours eu dans l’idée qu’un jour peut-être je pourrais emmener les gens dans mon univers et en faire mon métier. J’ai suivi une formation d’ébéniste et arrivé à la fin de mon cursus, mon prof d’art en voyant mes dessins m’a demandé pourquoi j’avais pas fait d’école d’art, ça a été le déclic. Après avoir passé mon Brevet des métiers d’art je suis rentré à l’école Pivaut à Nantes. Trois ans d’études après, et deux semaines après la fin des cours Jean-Luc Istin me repère en passant sur mon blog et me propose de travailler avec Thierry sur une série ayant pour cadre le Mont Saint-Michel. Coïncidence étrange, je venais de le visiter deux jours auparavant avec ma copine, j’ai pris ça comme un signe du destin et j’ai foncé. Je connaissais le travail de Thierry par le biais du codex, n’étant pas d’un naturel froid et lui non plus on s’est très vite bien entendu!

SCENEARIO : Quels ont été tes influences, tes inspirations pour le dessin ?

Jean-Paul Bordier : Il y a peut être quatre personnes dont le travail m’a toujours passionné; Uderzo, Giraud, Miyazaki, et John Howe… Quand j’ai un petit coup de blues, je me replonge dans leur travail et ça me redonne l’envie de dessiner; ce sont plus des « guides » que des influences véritable. On peut être influencé par beaucoup de chose, ça peut être une musique qui nous parle, une photo, le passage d’un film ou même un jeu-vidéo . Dans Souvenirs d’un Elficologue on peut retrouver un peu de Sleepy-hollow, de Dark-cristal, même du Akira. Le lecteur ne le verra peut-être pas mais c’est ce que j’aurais distillé petit à petit pendant un an.

SCENEARIO : Souvenirs d’un elficologue nous entraîne autour du Mont Saint Michel. T’es tu rendu dans ce magnifique endroit pour y faire des repérages ? Pour y sentir l’ambiance ?

Jean-Paul Bordier : J’y ai senti les moutons surtout héhé! Je dis ça parce que je me suis retrouvé à la fraiche le matin à faire des aquarelles au milieu d’un troupeau de moutons dans les près salé et étant donné que ces animaux ont la capacité cognitive d’une huître c’était assez folklorique. Il y a d’ailleurs une scène dans l’album qui illustre très bien la situation. J’ai été au Mont à de nombreuses reprises durant l’année pour sentir l’ambiance et surtout comprendre comment l’édifice est construit, c’est toujours un moment très impressionnant. J’ai même bâti une maquette afin de m’aider au dessin, car l’édifice est entièrement construit en spirale autour du rocher, et pour les dessinateur c’est un véritable casse-tête en matière de perspective.

SCENEARIO : Comment travaille-t-on avec Thierry Gloris ?

Jean-Paul Bordier : Dans notre cas je ne sais pas si Thierry sera d’accord mais c’est assez symbiotique. J’arrive assez facilement à voir où il veut aller vers quoi il veut emmener le lecteur et lui essaie de s’adapter à mon style graphique et à mon univers, c’est donc un échange très profitable!

SCENEARIO : Quel est donc ta méthode de travail ?

Jean-Paul Bordier : Thierry m’envoie un découpage écrit, j’en fait un découpage dessiné taille « carte de crédit », ou j’essaie de dégager les intentions fortes dans ce que Thierry veut raconter. C’est le moment en règle générale où je m’arrache le plus les cheveux et où je tâtonne pas mal pour réussir à trouver le bon cadrage!! Une fois que l’on est raccord, j’agrandis le découpage pour le reproduire au format définitif, j’effectue un crayonné assez poussé, puis un encrage au pinceau.

SCENEARIO : Les personnages te sont-ils venus d’ailleurs naturellement ?

Jean-Paul Bordier : Les personnages les plus faciles à faire pour moi sont souvent ceux qui ont un fort caractère. Certains, comme Albin d’ Aigreffin-Tonnerre, un journaliste râleur et bon vivant, sont un pur bonheur à dessiner. Lorsque je lis le scénario de Thierry j’ai de suite la trombine du bonhomme qui s’affiche. J’aime particulièrement travailler sur les créatures fantastiques. C’est délicat car on jongle avec des codes très établis dans l’univers de l’imaginaire, c’est difficile d’aborder de telles créatures sans tomber dans le grotesque ou au contraire complètement déstabiliser le lecteur. J’essaie toujours de me plonger moi-même dans une ambiance un peu mystique avant d’aborder les scènes fantastiques.

SCENEARIO : Crois-tu aux fées ?

Jean-Paul Bordier : Quand j’étais gamin j’y croyais, j’avais un classeur ou je classais les monstres et les esprits de mon imagination par catégories, je faisais ça juste après m’être enfilé deux bonnes tartines de beurre trempées dans du chocolat chaud, juste à côté de la cheminée. J’ai toujours ce classeur dans mon vieux cartable d’école. Hélas avec le temps les désillusions d’adultes finissent par grignoter cette imaginaire miette après miette. Tout ce qu’il me reste c’est ce vieux cartable sous mon bureau, quand je repense à ce qu’il y a dans ce cartable et tous ce que cela représente, les miettes d’enfance reviennent et l’espace d’un instant, lorsque je suis sur mes planches j’essaie de croire au fées…

SCENEARIO : Quelles sont tes futurs projets ?

Jean-Paul Bordier : Je participe au dixième et dernier tome des Contes du Korrigans, et je travaille sur le Tome 2 de « Souvenirs d’un elficologue ».

SCENEARIO : Jean-Paul, quelle a été ton dernier coup de coeur en bandes dessinées ?

Jean-Paul Bordier : Alors je ne veux pas passer pour un fayot auprès de mon scénariste, mais j’ai beaucoup aimé Saint-Germain, et j’ai vraiment bien aimé « Jazz Maynard » et le « Sang des Porphyres », il y en à tellement!!

SCENEARIO : Ton dernier coup de cœur pour un film ?

Jean-Paul Bordier : Ca remonte un peu mais les deux derniers films qui m’ont vraiment marqués c’est « Wall-E » chez Pixar et « Batman: Dark Knight » . Mais je ne vais pas assez souvent au ciné!

SCENEARIO : Pour un livre ?

Jean-Paul Bordier : Hyperion (la saga complète)

SCENEARIO : pour une musique ?

Jean-Paul Bordier : Là encore il y a beaucoup de monde, j’ai découvert il y a peu Cécile Corbel une Harpiste aux doigts de fée. Idéal pour aborder la lecture de Souvenirs d’un Elficologue…

SCENEARIO : Merci pour ce temps passé avec nous.

Jean-Paul Bordier : Merci à Vous…

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