Interview
Interview d’ Adeline Fontaine, adaptatrice de mangas pour les éditions ASUKA
Le rôle qui vous est reconnu est « Adaptatrice de manga ». Il ne m’en a pas fallu moins pour que des tas d’interrogations me (re)viennent, aussi je vous remercie d’avoir accepté de répondre à ces quelques questions et m’excuse par avance si ma méconnaissance du domaine de l’édition manga fait que certaines ne sont, en fait, pas directement de votre ressort ! Tout d’abord, pourriez-vous en quelques mots vous présenter et nous raconter votre parcours professionnel, comment vous êtes arrivée à cette activité éditoriale spécifique ? Adeline Fontaine : À vrai dire, je ne suis pas adaptatrice à plein temps. Je suis arrivée chez Asuka en juillet 2006 après l’obtention d’un master professionnel spécialisé dans l’édition. Je suis à l’heure actuelle responsable d’édition chez Asuka, c’est-à-dire qu’en plus des adaptations, je me charge d’élaborer les plannings avec les traducteurs, le studio de lettrage et les imprimeurs et de veiller à leur suivi. J’effectue également de nombreux travaux rédactionnels, aussi bien au niveau de notre site Internet que des outils de communication (dossiers de presse, catalogue, etc.). Nous sommes une petite équipe dans laquelle chacun effectue, en quelque sorte, plusieurs métiers à la fois. Sceneario.com : Entrons maintenant dans le vif du sujet… Comment définiriez-vous « l’adaptation de manga » ? En quoi cela consiste et quelles interconnexions peut-il y avoir avec le travail de traduction ? Adeline Fontaine : L’adaptation telle que nous la voyons chez Asuka, c’est avant tout de retravailler les textes que nous remettent les traducteurs sur différents points : grammaire et orthographe avant tout, mais également un travail de réécriture de certaines bulles pour contribuer à la fluidité du récit. Et quelquefois l’ajout de notes quand les personnages font appel à des références strictement japonaises pas forcément compréhensibles par les lecteurs français (quand le traducteur ne le fait pas lui-même).
Sceneario.com : L’adaptation ne concerne-t-elle que les textes ou également le format, les visuels, etc ? Adeline Fontaine : L’adaptation pure ne concerne que le texte. Cependant, comme je suis également en charge du suivi de la production, il m’arrive de demander à ce que, par exemple, certaines onomatopées soient effacées pour éviter que le dessin ne soit saturé de texte (nous demandons à ce que chacune des onomatopées soient traduites, mais certaines sont nettoyées pour ne laisser que la traduction en français). Sceneario.com : Y a-t-il parfois des contraintes artistiques dictées par les Japonais ? (Par exemple, si des visuels de pubs apparaissent dans des magazines, il faut absolument que tel ou tel élément ou personnage apparaisse…) Adeline Fontaine : Ce genre de choses touche plus à la fabrication et à la PAO. Mais en effet, les éditeurs japonais veillent scrupuleusement au respect de l’œuvre originale. Et chaque utilisation de visuels (jaquettes, posters, marque-page, publicités, etc…) doit obtenir l’aval préalable de nos homologues nippons. Sceneario.com : Avez-vous des anecdotes spéciales à raconter, marrantes ou au contraire révélatrices de problèmes, relatives à votre travail d’adaptation ? Adeline Fontaine : Sans conteste, l’adaptation de titres érotiques. Nombreux sont les traducteurs qui sont frileux à utiliser des termes crus pour retranscrire les paroles des personnages dans ce type de manga… Ce qui donne parfois de bonnes occasions de rigolades quand on repasse dessus. Sans compter les mails que l’on échange avec le traducteur !
Adeline Fontaine : Encore une fois, cela dépend. En ce qui nous concerne nous travaillons avec des agents qui représentent les éditeurs et les auteurs japonais. Et heureusement que les choses peuvent se faire à distance car nous sommes quotidiennement en contact avec eux… Sceneario.com : Cette question ne concerne pas forcément les éditions Asuka, mais comment expliquez-vous que certaines séries signées par des mangakas à succès ne soient pas encore publiées en France si leurs séries existant déjà en version française font un carton ? Pourrait-il y avoir une sorte d’entente entre éditeurs pour que les calendriers de sorties ne se « téléscopent » pas ? Adeline Fontaine : Les négociations prennent beaucoup de temps, surtout avec les gros éditeurs japonais et pour les gros titres. Et puis, tous les titres ne se valent pas.
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