Interview

Interview de Bruno Falba pour Le Chant des Elfes T1

                                  Interview de Bruno Falba, « Le chant des elfes » – tome 1.

SCENEARIO.COM : Bonjour Bruno Falba. Avant toute chose pourrais-tu te présenter, nous raconter ton parcours ?
Bruno Falba : Bonjour Berthold ! Oh, mon parcours est celui d’un enfant bercé par les contes et les légendes de sa tante Italienne, Athena. Avec le temps, elle lui m’a transmis son amour des livres et sa passion de l’histoire. En bref, je suis tombé dedans quand j’étais petit ! Arrivé à l’adolescence, je me suis immergé comme beaucoup, dans la BD, les romans fantastiques et les jeux de rôles. Aujourd’hui, Athena n’est plus de ce monde, mais avant de partir elle m’a légué cette envie irrésistible de raconter et partager des récits.

SCENEARIO.COM : Ton actualité est la sortie en cette fin de mois de mai 2008 du premier tome de la série « Le Chant des elfes ». Comment t’es venu l’envie de te lancer dans cette aventure ? 
Bruno Falba
: C’est sans doute le désir de retrouver de nouveau les contes de mon enfance. Ceux-ci faisaient références à Rome, aux Ogres Huns, et aux légendes de ma ville natale, Draguignan. Il se trouve qu’en Dracénie(1) , nous avons un dolmen, « La pierre de la fée », et un Dragon. Notre héritage Celtique est bien présent en Provence, mais plus discret qu’en Bretagne.
J’ai donc construit  Le chant des elfes  sur cette base, en donnant vie à notre folklore, nos croyances et nos superstitions. La fin de l’Empire Romain d’Occident s’imposait de lui-même comme cadre historique. Cette époque est l’une des clefs de voûte de notre culture, avec ses bouleversements politiques, économiques et religieux.
Bien sûr, la collection Soleil Celtic de Jean-Luc Istin correspondait parfaitement à ce type de projet, mais il était trop tôt pour le lui présenter. Il y manquait un dessinateur et une coloriste de talent. La rencontre avec Mike Ratera et Max fut l’élément déclencheur.

SCENEARIO.COM : Comment es-tu parvenu à réaliser « Le Chant des Elfes » ? Est-ce un projet de longue date ou quelque chose de spontané ? 
Bruno Falba
: Bien avant d’avoir la chance de travailler avec Mike Ratera, j’étais l’un de ses fans les plus fervents. Aussi, mon cœur n’a fait qu’un tour, lorsqu’on m’a proposé de dédicacer avec lui au cours d’une tournée de quatre jours en Belgique. Nous fîmes connaissance lors d’un repas organisé par Forbidden zone, dans un restaurant de Bruxelles. Le courant était passé tout de suite. Je fus heureux de constater que nous partagions les mêmes goûts pour l’histoire et l’héroïc-fantasy. C’est ce qui m’a encouragé le lendemain à lui parler, ainsi qu’à sa coloriste, de l’embryon du « Chant des elfes », au festival d’Andenne, près de Namur. Mike & Max furent immédiatement intéressés par le projet. De retour à Barcelone, Ratera contacta Jean-Luc Istin pour le lui proposer. Il accepta tout de suite, avant de nous proposer de collaborer avec Jacques Lamontagne. Nous étions comblés. Nous adorons cet auteur et sa série, « Les druides » !
SCENEARIO.COM : Quels ont été tes influences, tes sources d’inspirations elfiques?
Bruno Falba : j’ai puisé mes influences dans les légendes que me contait ma tante Athena. Puis, j’y ai associé les lectures de mon adolescence (Howard ; Michael Moorcok ; Tolkien ; etc) et les livres d’histoires que je dévore aujourd’hui. Et ce au grand dam de ma moitié, qui ne sait plus où ranger tous les biographies et autres mémoires sur les grands de ce monde que j’accumule inexorablement !

SCENARIO.COM : C’est la deuxième série que tu fais après « La loi du chaos ». Est-ce que l’héroïc-fantasy est un genre que tu affectionnes particulièrement ? 
Bruno Falba
: Zut ! Je suis démasqué. (rire) C’est vrai que j’aime ce genre. Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas de limite. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, il se renouvelle toujours. Les romans de Gemmel ne ressemblent en rien à ceux de Robin Hobb. Tout comme les BD d’Arleston sont différentes de celles de Ange ou de Istin. Toutes sont excellentes tout en possédant des styles et des tons biens marqués. Et je ne me lasse pas des possibilités que ce genre offre. Pour ma part, quand je ne lis pas de livre d’histoire, je dévore de l’héroïc-fantasy presque tous les jours, matin, midi et soir, quelque soit le support (BD, DVD, roman ou jeu) !

SCENARIO.COM : Comment fais-tu pour sélectionner tes dessinateurs et coloristes ? 
Bruno Falba
: Il n’y a pas de règle. Les collaborations naissent parfois au gré des rencontres. Ce fut le cas avec Mike Ratera et Max. A d’autre moment, la proposition vient d’un éditeur, d’un directeur éditorial ou de collection. Mais il ne faut jamais perdre de vue l’indispensable nécessité de trouver le bon dessinateur pour la bonne série. Le genre de scénario doit impérativement correspondre au style graphique du dessinateur. Il en va de même pour le coloriste.

SCENARIO.COM : Es-tu exigeant au niveau du graphisme, ou laisses-tu les coudées libres au dessinateur ou au coloriste ?
 
Bruno Falba : La réalisation d’un album prend du temps. Et pour aller au bout de la réalisation d’un projet, il est nécessaire d’être aussi exigeant avec soi-même qu’avec ses collaborateurs. Il est donc important de bien définir le style graphique avant d’attaquer une BD. Ce fut le cas avec Mike Ratera & Max sur « Le chant des elfes ». Sinon, je dirai plutôt que je laisse « les coudées libres » au directeur de collection, pour ne pas contrarier ses indications. C’est le cas avec Jean-Luc Istin et Jacques Lamontagne, dont les suggestions sont toujours justes. Personnellement, je veille à glisser mon ego dans mes poches. Car les conseils et les orientations qu’ils nous donnent, sont là pour nous aider à donner le meilleur de nous même, sans jamais étouffer notre créativité.

SCENEARIO.COM : Comment perçois-tu ton travail avec Mike Ratera et Max ? Travail d’équipe ou chacun dans son coin ?
 
Bruno Falba : C’est un travail d’équipe, mais… chacun de son côté (rire) ! Je m’explique. Comme Mike vous l’a sans doute dit, nous travaillons à plusieurs centaines, voir des milliers de kilomètres les uns des autres… grâce à la fée Internet.
Mike et Max sont en Catalogne, Jean-Luc est en Bretagne, Jacques au Québec et moi en Provence. Et c’est Audrey Dauphin, assistante d’édition chez Soleil Productions, qui centralise via un serveur F.T.P., les fichiers au siège de la maison d’édition, à Toulon. Tiens, c’est l’occasion de lui faire un petit coucou au passage ! ;o)
Chacun a un regard sur le travail de son collaborateur, sans empiéter sur ses compétences. Jean-Luc et Jacques (ainsi qu’Audrey !) ont le recul nécessaire pour dénicher les éventuelles maladresses que nous aurions pu malheureusement faire. Et oui ! A force d’être sur sa tâche, on fini par ne plus la voir… la tâche. :o)

SCENEARIO.COM : Connaissais-tu le travail de Mike Ratera avant « Le chant des Elfes » ?

 Bruno Falba : Mike… qui ? (rire) Plus sérieusement, j’ai découvert son talent avec « King Kabur », puis « Bad Legion ». En les lisant, j’espérais sincèrement pouvoir un jour collaborer avec lui. Mon vœu c’est réalisé grâce à Jean Wacquet, le directeur éditorial de Soleil Productions. C’est en me penchant sur ses publications parus dans la presse espagnole, que j’ai réalisé que je connaissais certaines de ses réalisations passées. Comme quoi, un talent ne passe jamais inaperçu.

SCENEARIO.COM : As-tu d’autres projets que tu souhaiterais géré en même temps que « Le Chant des Elfes » ? De nouvelles séries en gestation ?
 
Bruno Falba : Ah, cette question est toujours difficile. Je suis tenté de répondre oui, car il y a toujours des séries en gestation. Mais j’évite d’en parler. Non pas par superstition, car… ça porte malheur… mais plutôt parce que les aléas de l’édition sont tels que, rien n’est sûr, tant qu’un album n’est pas chez les libraires. Aussi, ne m’en veuillez pas. Je préfère vous faire la surprise et revenir pour le moment, sur « Le chant des elfes »… Mais promis, dés qu’il y aura du neuf, scenario.com en aura la primeur, Berthold !

SCENEARIO.COM : OK, OK ! Alors, en combien de tomes est prévu cette série ? Y aurait-il plusieurs cycles ? Bruno Falba : Trois. Une autre question ? (silence, puis éclat de rire) D’accord, vous souhaitez en savoir plus ? « Le chant des elfes » est une trilogie. Trois est mon chiffre préféré. Il est synonyme ici, d’équilibre et de stabilité. Il permet de bien structurer son récit. Il est possible de développer l’histoire en un second cycle. Nous y avons pensé, et j’en ai tracé par prudence les grandes lignes, afin de ne pas être pris au dépourvu le moment venu. Mais cela dépendra de la volonté de toute l’équipe.

SCENEARIO.COM : Quel a été ton dernier coup de cœur coté BD ?
Bruno Falba : cela va sans doute vous surprendre, car cet album n’a rien à voir avec l’Héroïc-fantasy. Mon coup de cœur est pour le dernier « Spirou  » d’Emile Bravo, dans la collection One shot de Dupuis. C’est le Spirou que j’attendais depuis toujours. L’album est parfaitement bien pensé et conceptualisé, tant sur le fond que sur la forme. Maquette, typo, couverture, page de garde tout est à sa place. Et c’est sans compter le scénario. Un pur chef-d’œuvre. Le thème abordé est grave, mais il est traité avec un ton juste, de l’humour et une charmante fraîcheur. Quand au dessin, le style rétro est respecté tout en conservant ce trait actuel cher aux lecteurs. A lire absolument !

SCENARIO.COM : Votre dernier coup de cœur pour un film ?
Bruno Falba : A vrai dire, je boude les salles de cinéma. Je sais, c’est dommage, mais je ne supporte plus le comportement incivil de certains, durant les projections. Ca me gâche le plaisir. Ajouté à cela un tarif de presque 10 euros par personne. Convertissez le montant en Franc et vous verrez, ça pique un peu. De peu que vous sortiez en famille avec des enfants, et vous comprendrez la douleur. En revanche, ça m’a permis de renouer avec les séries T.V.. J’ai adoré « Rome » saison I & II. Le jeu des acteurs, leurs costumes, les décors, les dialogues, les chorégraphies des combats et l’intrigue… rien n’est à jeter. Tout est bon. Un seul regret au tableau. Une partie des studios de Cinecitta à Rome, où a été tourné la série, a brûlé. Ce qui a compromis le tournage de la saison III. :o(

SCENEARIO.COM : Pour une musique ?
Bruno Falba : Non pas UNE, mais DEUX ! Avec :
Le baroque de Musica Antiqua Provence, dirigé par Christian Mendoze, qui nous offre de merveilleuses pièces de Vivaldi, enregistrées à la collégiale Saint-Paul de Hyères. L’album est sorti chez Integral Classic.
Et puis dans un genre radicalement différent, le dernier album de Fred Pallem et de son groupe « Le sacre du Tympan ». Outre l’invitation de musicien de renom comme « M », vous pourrez écouter des morceaux de jazz joués avec un son Rock, ou des reprises du grand et incontournable compositeur Français de musique de film, Michel Magne(3) .
Sinon, je travaille en écoutant des bandes sons correspondant au scénario sur lequel je planche. Mes préférences vont vers Danny Elfman (« Batman » ; etc.), Basil Poledouris (« Conan »), Lalo Schifrin (« Mission impossible » ; etc.), Howard Shore (« The lord of the ring » ; etc.), John Williams (« Harry Potter » ; etc.) et Hans Zimmer (« Gladiator » ; etc.).

SCENEARIO.COM : Pour un livre ?
Bruno Falba : Mon coup de cœur est pour un auteur en particulier : Robin Hobb ! J’ai littéralement bloqué sur ses deux séries parallèles, « L’assassin royal » et « Les aventuriers de la mer », chez Pygmalion. A la fin de chaque tome, j’ai ressenti un vide sidéral au fond de moi et un silence pesant tout autour de moi. L’horreur. Je ne savais plus quoi lire d’autre, tant ses romans m’avaient embarqué loin d’ici. Un conseil, si vous ne les avez pas encore lu, il n’est pas trop tard. Courrez les acheter, les louer ou les emprunter(4) , mais ne restez pas sans les lire. Vous passez à côté d’un monument de la littérature fantastique ! Robin Hobb écrit avec la sensibilité propre à la gent féminine, sans tomber dans l’eau de rose. Les personnages sont attachants avec leur caractère complexe, fouillé. L’univers est cohérent. Et les scènes de combats sont de véritables boucheries. Que demander de mieux ?
Dans un registre plus doux, destiné à la jeunesse, j’ai adoré « Aventures sur l’Aber » aux Editions Gibus (www.gibusimages.com). La plume d’Adelson, son auteur, vous entraîne avec tendresse dans l’imaginaire de jeunes bambins, partis en expédition sur le bras de mer qui longe la ferme de leur grands parents. Le récit se déroule dans la Bretagne de l’entre deux guerres, et est superbement illustré par le talentueux Jusseaume (« Tramp », Dargaud). N’hésitez surtout pas à le lire ou l’offrir à vos enfants. Le voyage en vaut le détour !

SCENEARIO.COM : Merci pour ce temps passé avec nous et souhaitons un bon succès au « Chant des Elfes ».
Bruno Falba : Ce fut un plaisir. Merci Berthold et longue vie à Sceneario.com ! ;o))) 

1 : Dracénie : autre nom de la commune de Draguignan, dans le Var.
2 : Dont c’est les 400 ans cette année ! VIVE LE QUEBEC LIBRE ! :o)
3 : Michel Magne est le compositeur des bandes sons de « Fantosmas », « Les Tontons flingueurs », « L’homme au monocle », etc. 
4 : Rayez la mention inutile !

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