Interview
Interview de Serena BLASCO pour la bande dessinée Enola HOLMES
Interview réalisée par Eiffel pour Sceneario.com en janvier 2025.
Sceneario : Ma première question portera sur vous, pouvez-vous vous présenter avec vos mots ?
Serena BLASCO : Je suis artiste-autrice, j’aime créer des univers et écrire de belles histoires. Je tire mon inspiration de ce qui m’entoure, des personnes que je rencontre, comme de mes nombreuses balades solitaires en forêt.
Sceneario : Pouvez-vous me dire comment a germé en vous l’adaptation des enquêtes d’Enola Holmes ?
Serena BLASCO : À cette époque, en 2013, je travaillais dans une grande librairie et j’étais en train de relire tous les Sherlock Holmes. Puis en rangeant les romans jeunesse, j’ai découvert la série de Nancy Springer, Enola Holmes. Ma première réflexion en tant que fan de Holmes, a été de me dire « Tiens, ils ont inventé une sœur à Sherlock maintenant ! »
Mais la curiosité l’a emporté et j’ai lu le seul tome qu’on avait alors, le cinquième, et j’ai adoré. J’ai commandé les autres et j’ai tout de suite vu le potentiel de cette histoire. Je me suis renseignée sur les droits, j’ai monté le projet et je l’ai présenté à une maison d’éditions.
Sceneario : Les descriptions de Nancy Springer sont fines et vous les retranscrivez parfaitement au travers de dessins construits et intelligents. Quels angles avez-vous privilégiés lors de l’écriture et de la mise en forme du storyboard ?
Serena BLASCO : De manière simplifié, on va dire que j’ai retranscrit ce que je voyais et imaginais, quand je lisais les romans. L’autrice a une écriture très visuelle et il est facile de se représenter le personnage d’Enola ainsi que ses actions.
Je me suis centrée sur le personnage principal que je trouvais original et bien pensé. Je l’ai laissée évoluer et j’ai mis en avant ses atouts et son tempérament.
Sceneario : Comment avez-vous exercé votre rôle de scénariste, comment avez-vous décider d’abréger telle ou telle partie ou au contraire de dédier une seule planche à des réflexions, un lieu ?
Serena BLASCO : C’est la partie la plus amusante à faire, décortiquer le livre. En effet, certaines scènes qui fonctionnent en roman, ne fonctionnent pas forcément en bande dessinée. Il faut découdre l’ensemble du livre et le remonter autrement.
Trier les scènes et les actions qui se déroulent, les relier, et choisir les plus importantes à mettre en avant. Globalement j’ai choisi de focaliser l’attention sur les actions et les réflexions de Enola. Et de mettre en avant son lien avec Sherlock, qui dans les romans, est moins marqué. Du moins, dans les premiers tomes.
Sceneario : Pouvez-vous m’expliquer comment vous créez une planche ?
Serena BLASCO : En premier, j’écris le scénario en entier. Puis je fais le storyboard complet de l’album en y plaçant les bulles de textes pour voir si, à la relecture, le rythme et la narration fonctionnent et si les plans s’enchaînent bien d’une page à l’autre.
Une fois que l’éditrice a validé l’ensemble, je commence la partie dessin, que je finalise jusqu’à la dernière planche. Puis je fais toute la couleur à la main en dernier.
Après vient la post-production, scanner et nettoyer les pages, placer les bulles définitives, et les relectures et corrections.
Sceneario : Comment s’est déroulé le passage de relais avec Lucie Arnoux qui a réalisé le 7ème tome avec vous et le 8ème seule ? D’abord avec les illustrations puis avec le scénario ?
Serena BLASCO : À partir du tome 6 j’avais déjà demandé à Lucie de me remplacer sur la couleur. La série ne comptait que 6 romans de Nancy Springer à cette époque, et l’histoire d’Enola se terminait à ce sixième.
Quand on a entendu parler d’un 7ème roman, j’avais déjà commencé à travailler sur d’autres projets. J’ai donc effectué le scénario et storyboard du tome 7 et proposé à Lucie de reprendre la partie dessins et couleurs.
Puis une fois encore, à l’arrivée du tome 8, j’étais en plein travail sur mon autre série Arcana, qui me demandait tout mon temps (60 à 80h/semaine), je ne pouvais plus du tout prendre en charge un nouveau Enola dans les délais demandés. Et comme Lucie adorait travailler sur Enola et qu’elle se destinait aussi au scénario, il m’a semblé être une suite logique qu’elle continue seule la série. Après tout, Enola c’est bien Alone à l’envers ! 😉
Sceneario : Pouvez-vous me dévoiler sur quel projet travaillez-vous aujourd’hui ?
Serena BLASCO : Après avoir terminé mon autre série Arcana, une grande épopée fantastique de plus de 400 pages en trois tomes, j’ai voulu faire une pause avec le dessin, car c’est la partie la plus chronophage et énergivore.
Mais je suis ravie d’avoir imaginé et scénarisé une nouvelle bande dessinée qui sortira au printemps, mis en dessins et couleurs par Dao Nguyen. Il s’agit d’une histoire complète, une comédie romantique ado/jeunesse, sur le thème des âmes sœurs, des tapisseries divinatoires et d’un gros imbroglio ! Il y aura beaucoup d’humour et les dessins sont magnifiques !
Sceneario : En étant scénariste et illustratrice, travaillez-vous en solitaire ? Est-ce compliqué ?
Serena BLASCO : Même si je fais une bande dessinée du scénario à la couleur, je ne travaille pas seule. Il y a toute l’équipe éditoriale qui suit le projet, le relit, donne des pistes, recommande des corrections, encourage, donc ça reste un travail d’équipe pour que l’album sorte tout beau et bien imprimé en librairie.
Et j’aime beaucoup travailler en binôme comme avec Lucie ou Dao, ça apporte toujours un truc en plus à l’histoire.
Sceneario : Un très grand merci, c’est la première interview que je réalise et j’ai été honorée que vous me répondiez.