Interview
Jacques Lamontagne : dessinateur de l’Etrange ??
Sceneario.com : Bonjour Jacques. Nous vous avons déjà accueilli une fois dans pages lors de la sortie des Druides tome 4. Mais, nous n’avons pas eu vraiment le temps de faire plus ample connaissance avec vous. Quel a été votre parcours avant de vous faire connaître dans le monde de la BD ?
Jacques Lamontagne : Mon parcours se résume de façon assez simple. Suite à mon cours de graphisme, j’ai travaillé pour quelques agences de pub durant 3 ans. Pour mon dernier emploi, j’étais directeur artistique. Mais ce que je désirais faire, c’était de l’illustration. J’ai donc donné ma démission et suis devenu illustrateur free-lance durant de nombreuses années. J’ai continué à travailler comme pigiste avec des agences de pub mais également avec de nombreuses maisons d’éditions, en réalisant des dizaines de couvertures de roman. Petit à petit, mes contrats ont débordé les frontières du Canada et m’ont amené à travailler pour les USA et quelquefois pour l’Europe. Tout ça, en lorgnant toujours la BD du coin de l’œil. Car, ce qu’il faut comprendre, c’est que j’ai tout de même collaboré durant toutes ces années avec les 2 principaux éditeurs de magazines d’humour au Québec. Cela me permettait de garder un lien avec cette passion qui sommeillait en moi.
Sceneario.com : Vous faites donc les Druides pour la collection Soleil Celtic, qu’est ce que vous aimez dans cet univers là ?
Jacques Lamontagne : Ce qui m’a immédiatement accroché dans le « speach » de présentation de Jean-Luc Istin, c’est le parallèle qu’il m’avait fait avec le roman d’Uberto Eco, Le Nom de la Rose. Le bouquin m’avait énormément plu, le film m’avait enchanté, il n’en fallait pas plus pour que je me lance dans l’aventure. Je n’avais toutefois pas deviné toute l’ampleur du travail. S’attaquer à une période aussi peu documentée, et surtout, mettre en images des lieux où je n’avais jamais mis les pieds, représentait un travail colossal.
Sceneario.com : Aujourd’hui, vous vous lancez dans une nouvelle série qui sort chez Quadrants ce mois ci : ASPIC – Detectives de l’Etrange. Ce titre est écrit par Thierry Gloris. Comment vous etes vous retrouvés à travailler ensemble et pourquoi sur cet univers là ? Qu’est ce qui vous a séduit ?
Jacques Lamontagne : Notre première rencontre, entre Thierry et moi, remonte à plusieurs années. Elle s’était faite alors sur un forum dédié à l’illustration et à la BD. Nous avions, à l’époque, amorcé une collaboration sur un projet que Thierry développait déjà, soit le Codex Angélique. J’ai fait quelques esquisses des personnages, mais les choses ont fait en sorte que dans la foulée, Les Druides me soit proposé. Mais nous nous étions toujours promis que nous ferions un jour un projet ensemble. Cela s’est concrétisé sous la forme de Aspic. Cette série trainait dans les cartons de Thierry depuis quelques années. J’ai toujours été un véritable fan de la littérature du 19e. Plus jeune, j’ai dévoré bon nombre de romans des auteurs classiques et populaires de cette période. Le projet était en plein dans mes cordes. En discutant ensemble, on s’est dit que ce serait une bonne idée de faire quelques essais. Ça a immédiatement fonctionné.
Sceneario.com : Quels ont été d’ailleurs vos influences graphiques, vos inspirations pour ASPIC ?
Jacques Lamontagne : Le cinéma est très certainement mon élément d’inspiration le plus important. La série Sherlock Holmes de la Granada Television avec le génial Jeremy Brett. La traversée de Paris avec Gabin. Les films avec Basil Rathbone. La téléfilm Double meurtre sur la rue Morgue avec George C. Scott. Les productions de la Hammer avec leurs décors en carton pâte. Toutes ces réalisations ont laissé leur empreinte dans mon imaginaire. Je restitue ces ambiances dans Aspic.
Sceneario.com : Y’a-t-il eu des scènes assez difficiles à faire ? Avez-vous eu en main le personnages principaux assez rapidement ?
Jacques Lamontagne : Les scènes de dialogues sont souvent les plus difficiles car il faut trouver suffisamment de diversité dans les plans afin que le lecteur ne se lasse pas. Pour le reste, certaines pages demandent simplement du temps, comme celle des travaux d’excavation pour le métro ou la scène du marché. Ce n’est pas que c’est complexe, c’est simplement long. Pour ce qui est des personnages, la plupart me sont venus assez rapidement. Celui qui m’a donné les plus de difficulté est Flora. On ne la désirait pas d’une beauté stéréotypée. On la voulait jolie, sans être trop « parfaite ». Cela met tout de même un certain temps avant que l’on ne s’approprie des personnages. Dupin est sans conteste celui avec qui j’ai le plus d’affinité… Peut-être parce qu’il me rappelle un peu mon père.
Sceneario.com : Comment travaillez vous avec lui ? Avez-vous votre mot à dire sur le scénario ? Car il est vrai que vous êtes aussi scénariste sur Yuna ? Y amenez vous aussi vos idées ?
Jacques Lamontagne : Je ne vais interférer que très rarement dans le travail du scénariste. Si je vois une petite faille ou une erreur de cohésion dans le récit, j’en discute avec lui. Ou bien, si j’ai une idée qui ferait en sorte de bonifier une scène, je lui en parlerai, mais sinon, je laisse à chacun le rôle qui lui revient. Comme je scénarise présentement 2 séries, je sais très bien qu’il peut être très agaçant pour le scénariste de voir ses scènes qu’il a longuement réfléchies, être transformées. Thierry est extrêmement consciencieux. Chaque chose installée dans son récit a sa raison d’être.
Sceneario.com : Quel est votre méthode de travail ?
Jacques Lamontagne : Un réveil matin réglé à 5h30, un bon petit déjeuner, un ou deux cafés et une longue journée de travail. En fait, je suis très discipliné côté boulot. Le matin est la période de la journée la plus active car c’est durant celle-ci que je peux communiquer avec mes collaborateurs qui sont pour la plupart installés en Europe. Les 6 heures de décalage sont quelquefois embarrassantes. C’est pourquoi, vaut mieux régler les détails le matin, sinon, il me faut attendre au lendemain avant d’obtenir les réponses.
Sceneario.com : Savez vous ce qui nous attend pour la suite ?
Jacques Lamontagne : Pour Aspic, nous avancerons à coup de deux albums. Chaque enquête sera construite sur un diptyque. Pour le reste, on va attendre de voir la réaction des lecteurs avant de se projeter trop loin dans le futur. On sait très bien que la survie d’une série tient en fonction des ventes.
Sceneario.com : D’autres projets en vu ?
Jacques Lamontagne : Je travaille actuellement à 2 séries comme scénariste. Je vais également reprendre d’ici quelques mois le travail sur le dernier tome des la série les Druides, et bien entendu, le second tome de Aspic. Pour l’instant, cela me suffit largement. Pour le reste, on verra d’ici quelques mois !
Sceneario.com : Lisez vous d’autres bandes dessinées ? Quel a été votre dernier coup de cœur pour une BD ?
Jacques Lamontagne : J’aime beaucoup Bouncer, graphiquement, c’est la claque !!
Sceneario.com : Votre dernier coup de cœur pour un roman ?
Jacques Lamontagne : L’ombre du vent, de Carlos Ruiz Zafon.
Sceneario.com : Votre dernier coup de cœur pour un film ?
Jacques Lamontagne : Il y a bien longtemps que je n’ai eu un véritable coup de cœur. Shutter Island m’a récemment bien plu.
Sceneario.com : Pour une musique ?
Jacques Lamontagne : J’en écoute que très rarement… Je suis très conservateur et écoute presque toujours les mêmes trucs en boucle.
Sceneario.com : Merci, Jacques, pour ce temps passé avec nous.
Jacques Lamontagne : Merci à vous pour l’invitation !