Interview

Leandro Fernandez, dessinateur de Hunter chez Soleil

Sceneario.com : Bonjour Leandro. Tu as commencé ta carrière dans les comics, chez Marvel, chez Oni Press, peux-tu nous en dire plus sur ce début de parcours ?


Leandro Fernandez : En fait, ce n’est pas comme ça que j’ai débuté. J’ai commencé sur ma propre série dans le magazine italien Intrepido, édité à Milan par Universo. Après, j’ai réalisé de petits projets pour Marvel. J’ai ensuite eu une période sans travail dans le comics, avant d’être à nouveau engagé pour de premiers travaux par Oni Press et Marvel. S’il y a quelque chose à dire sur mon parcours, c’est qu’il montre à quel point c’est difficile de commencer et d’avoir des propositions de manière régulière… Et surtout, j’ai commencé à une époque où on n’avait pas Internet et tout le confort que ça offre aujourd’hui.

Le truc, c’est que tu passes de longues heures à tomber des planches en donnant le meilleur de toi-même, et ce n’est que la moitié du boulot… La seconde moitié, c’est de démarcher pour décrocher des projets. En ce qui me concerne, j’ai dû voyager pas mal, et frapper à beaucoup de portes. 

Sceneario.com : Quelle différence y a-t-il dans ton travail sur Hunter par rapport à ce que tu as pu faire par exemple sur Punisher ?


Leandro Fernandez : Sur le style, Hunter est plus propre que Punisher : l’encrage a moins de grain, c’est plus doux et plus clair. Punisher a besoin d’être plus sombre, à cause de l’ambiance des histoires.

À un autre niveau, Hunter a des particularités techniques propres aux albums européens : plus de cases par page, moins de noir dans le dessin, etc. Et puis Hunter est une création 100% originale : chaque personnage a été créé sans précédent, comme les atmosphères et l’ensemble des scènes.

Sceneario.com : Comment se passe ta collaboration avec Patrick ?


Leandro Fernandez : C’est génial !

C’est très agréable de travailler avec lui… Il m’a donné le scénario entièrement écrit, ce qui m’a permis de préparer le livre dans sa totalité, en cherchant de la documentation, en réfléchissant aux différentes situations, et en ayant à l’esprit les tenants et les aboutissants de toute l’histoire. Ses descriptions de séquences sont claires et l’histoire est vraiment intéressante, en plus d’être riche.

J’imagine qu’avant de m’envoyer le scénario complet, il a dû passer beaucoup de temps à assembler tous les éléments de l’intrigue, pour obtenir une histoire aussi complexe.

Sceneario.com : Comment vous êtes-vous rencontrés et comment communiquez-vous ?


Leandro Fernandez : En fait, on ne s’est jamais rencontré ! On a été mis en contact grâce à Jean Wacquet, le directeur éditorial de Soleil, et on communique par mails. Comme je ne parle pas français, on le fait en anglais.

Sceneario.com : Travailles-tu de la même façon lorsque tu fais le Punisher par exemple ou bien sur Hunter ?


Leandro Fernandez : Non. J’ai davantage de temps pour travailler sur Hunter, donc je m’organise différemment… Sur le marché américain, je n’ai jamais plus d’un mois pour faire 22 pages de comics, alors que j’ai environ un an pour en faire 46 d’Hunter ! En soi, c’est déjà une différence énorme…

L’autre point, ce sont les différences techniques, comme le nombre de cases par page, qui changent l’approche qu’on a de la planche. Il y a plus de cases et mon original reste quasiment de la même taille : je travaille donc à une échelle moins importante sur Hunter. Les détails sont plus petits.

Sceneario.com : Continues-tu à travailler sur des personnages Marvel (ou DC) en même temps que ton travail sur Hunter ?


Leandro Fernandez : Oui, je travaille sur les deux en ce moment.

Sceneario.com : Avec cet album en France, tu passes un cap, quel regard portes-tu sur le marché européen par rapport aux USA ?


Leandro Fernandez : C’est différent à tous niveaux et je ne m’y suis pas encore vraiment habitué. À tous points de vue ! La dynamique est complètement différente d’une industrie à l’autre, comme les résultats. Deux univers radicalement différent… Pour l’heure, je suis juste impatient d’avoir en main l’album d’Hunter imprimé, et après on verra ! C’est un peu tôt pour donner mon avis sur le marché français, mais je pense que j’en saurais bientôt plus…

Une des choses qui me rend impatient, c’est la qualité des albums en format européen… Une édition aussi jolie, en couverture cartonnée, à cette taille et sans publicité, c’est une chose que tous les auteurs rêvent d’avoir parmi leurs travaux ! Je pense que c’est aussi une des différences… Une autre est de travailler sur une histoire vraiment à soi, mais ça arrive parfois sur le marché américain, même si je n’en ai pas encore eu l’opportunité jusqu’à présent.

Sceneario.com : Travailles-tu d’après photo ? Et pour tes personnages ?


Leandro Fernandez : Bien sûr. Surtout pour une histoire comme Hunter, avec autant de lieux et d’éléments réels. Pour les personnages, ça dépend de ce qui est indiqué dans le scénario. Patrick avait des personnalités réelles qui servaient de référence pour les différents personnages d’Hunter. Je m’en suis servi, bien sûr !

Sceneario.com : Quelle importance prend l’informatique dans ta façon de dessiner ?


Leandro Fernandez : Je l’utilise uniquement pour la colorisation et je n’en ai pas fait depuis longtemps… Pour moi, l’ordinateur est juste un outil de communication. Je n’en suis pas vraiment fan, je préfère passer des heures sur ma planche à dessin.

Sceneario.com : Es-tu prêt pour une nouvelle aventure avec un scénariste français après Hunter ?


Leandro Fernandez : Bien sûr que je suis prêt ! Tout dépend du genre de projet qu’on me proposerait.

Sceneario.com : Ton style a incroyablement progressé, comme si tu avais voulu « gommer » ce côté un peu forcé des comics pour entrer dans une phase beaucoup plus « réaliste », le scénario exigeait-il justement d’avoir une approche graphique moins typée ?


Leandro Fernandez : C’est une question intéressante… Je crois que cela ne se passe pas toujours dans ce sens… et à mon humble opinion, c’est même dans le sens opposé que les choses doivent aller pour bien faire !

Pour atteindre un certain niveau de simplicité, une forme de synthèse dans le dessin, on doit partir du réel. Et puis on le fait passer à travers une sorte de filtre, et c’est ce processus qui fait naître le style. À mes yeux, ça marche dans ce sens, pas l’inverse ! Concernant Hunter, ce n’est pas que j’ai fait les choses à l’envers, mais j’ai utilisé un style réaliste parce que l’histoire l’exigeait, ce qui est la meilleure des raisons.

Mais pour moi, l’évolution d’un style graphique commence quand on fait subir un traitement à la réalité, pour la codifier visuellement, d’une manière cohérente. J’espère que je me fais bien comprendre ?!

Sceneario.com : Merci !
 

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