Questions pour Nadine Thomas (Coloriste)
SCENEARIO.COM: Nadine, peux tu te présenter en quelques mots?
Oui.Nadine Thomas, née le 19 avril 1973 à Meulan (oui trente ans cette année, vos calculs sont bons).
J’habite depuis 4 ans à Bordeaux, ville que j’affectionne particulièrement malgré son taux d’humidité !
Je suis coloriste depuis…1997, oui c’est çà, entre autres des séries Candélabres (éd.Delcourt), Les Teigneux (éd.Soleil) et bien sûr Bluehope chez Glénat.
SCENEARIO.COM: Combien de temps pour faire cette première BD?
Pour le 1er tome de Bluehope vous voulez dire ?
A franchement parler je ne peux pas vous dire exactement car à ce moment là, comme aujourd’hui, je travaillais sur d’autres séries en parallèle, donc j’ai pas mal alterné, me consacrant à l’une ou l’autre selon l’arrivage des planches (il ne faut pas oublier que le travail de coloriste dépend beaucoup du « rendement » du dessinateur ou de la dessinatrice).
Enfin grosso modo il faut compter entre 2 et 3 mois de travail par album. Uniquement pour la couleur bien sur !
SCENEARIO.COM: Peux tu nous expliquer ta technique pour colorier cet album?
Il s’ agit d’ une mise en couleur informatique.La technique est assez similaire à celle du « gris » employée traditionnellement par les coloristes travaillant sur papier c’est à dire que les couleurs sont travaillées sur un document séparé du dessin lui même. Le « plus » qu’apporte la machine, c’est le confort notamment vis à vis des retouches.
Concrètement, le photograveur avec lequel travaille la maison d’édition (en l’occurrence Glénat) scanne les planches originales du dessinateur et me les envoie gravées sur CD.
De mon côté je fais un petite bidouille technique qui me permet de placer mes couleurs tout en préservant le trait, un peu comme s’il était placé sur un film transparent et que moi je peignait sur une feuille calée dessous.
L’autre avantage qu’offrent les logiciels d’illustration ou de retouche tels que Painter ou Photoshop c’est le calque : voilà une trouvaille qui m’aura sauvé la mise plus d’une fois !
En effet je travaille au minimum avec 4 calques.
Je commence par placer une ambiance générale sur un calque. Le calque suivant, superposé au précédant, comportera les éléments du décor, ensuite vient le calque des personnages. Enfin j’utilise un calque voir 2, 3, 4,5… Pour placer ombres et lumières, distinguer les plans, faire des retouches de couleur sur une partie de l’image…les possibilités de retouches en utilisant cette méthode sont quasi-infinies sans pour autant dégrader la qualité du rendu. Bien pratique lorsque le dessinateur veut que j’effectue des changements non prévus au programme (Thibaud, çà t’évoque quelque chose ?!).
Autre détail important sur Bluehope, c’est mon attachement à faire en sorte que l’on ne reconnaisse pas tout de suite la couleur informatique, et que, du moins au premier regard on ait une impression de traditionnel. D’ une part pour coller à l’ histoire même qui est sensée évoquer les années 1850, d’ autre part pour s’ accorder au dessin de Thibaud qui -à mon avis- aurait été desservi par une couleur trop glacée.
Enfin lorsque nous sommes tous deux contents du résultat j’envoie le tout (document couleur et document trait à part) au service fabrication de l’éditeur qui s’occupe du suivi de l’impression et du façonnage de l’album.
SCENEARIO.COM: Comment arrive-t-on a ce métier? Ca s’apprend?
Oui il existe bien sûr des écoles qui forment aux métiers de la bande dessinée dont celui de coloriste.
Pour ma part j’ai une formation plus large de graphiste (un BTS pour être précise).
Lorsque ce métier m’a fait de l’oeil j’ai d’avantage appris par curiosité et par chance de côtoyer des auteurs confirmés au sein de l’atelier Sanzot à Angoulême.
Ensuite c’est évidemment l’expérience qui a pris le relais, j’entends par là que pour chaque album qui sort j’ai mon lot de difficultés et d’erreurs à résoudre et si çà ce n’est pas formateur !
SCENEARIO.COM: Que penses tu de tes 2 collègues?
Du bien ! C’est une question piège : je ne peux rien dire ici, d’autant que j’ai un tome 3 à négocier.
SCENEARIO.COM: D’autres projets en vu?
Et bien déjà le tome 3 de Bluehope, puisque nous sommes en train de boucler le tome 2.
Et puis toujours dans le registre des suites : Candélabres T4 et Les Teigneux T3.
Sinon en nouveauté je devrais démarrer sous peu les couleurs d’ un album Jeunesse aux Humanos ainsi que celles de la prochaine série scénarisée par Serge : Miki, qui parraitra aux éditions Glénat.
SCENEARIO.COM: Si tu devais partir en bateau très longtemps, que prendrais tu avec toi?
Bon mon homme va faire la gueule mais bon, vous avez dis « que » pas « qui ».
Donc ma réponse sera : mon chat. Bien qu’en étant tout à fait logique je ne suis pas sure qu’il apprécierait la balade.
Et des livres, plein. Parce que je ne suis pas très « thé dansant ».
SCENEARIO.COM: Quels sont les BD que tu as particulièrement aimé dernièrement?
Houlà je ne suis pas trop les nouveautés, alors ce que je retiens de mes dernières lectures :
Gothic (Rodolphe, Marcelé, Alluard), Le Tueur (Jacomon, Matz), John Doe (Baloo, Henriet, Besson) Gargouilles (Etienne, Filippi) Phoenomenum (Kaminka, Vedrines)
SCENEARIO.COM: Connaissez vous sceneario.com?
Oui.
SCENEARIO.COM: Comment avez vous connu sceneario.com et que pensez vous de ce site?
C’est un lien que m’ avais transmis Serge.
Bon, trés franchement je ne suis pas une accro des sites traitant de la bande dessinée, je suis sans doute trop influençable et je préfere me forger ma propre opinion.
Mais lorsqu’ il me prend de venir y faire un tour je trouve plutôt agréable de m ‘y attarder, l’ interface y est pour beaucoup.
Si j’ avais un souhait à formuler ce serait que la rubrique « avis » confronte 2 points de vue, l’ un avec un à priori postif sur l’ ouvrage et l’ autre négatif, de quoi me réconcilier avec l’ univers des critiques…
Questions pour Serge Meirinho (Scénariste):
SCENEARIO.COM: Serge, peux tu te présenter en quelques mots?
Bien sur. Je suis Marseillais mais j’habite Bordeaux (avec bonheur, et malgré les « galettes »), j’ai bossé dans le dessin animé en tant que layout man, dans la pub télé en tant qu’infographiste, et dans le jeu vidéo en tant que lead artist. C’est pour cette raison que j’apprécie sans modération la liberté de création que l’on trouve en bande dessinée. Pour les détails croustillants, vous les trouverez (si tant est que ça vous interesse) sur le site tout nouveau tout beau de mon éditeur : Glénat !
SCENEARIO.COM: Comment avez vous rencontré les autres auteurs?
J’ai rencontré Nadine quand nous étions étudiants à Marseille, et Thibaud quelques années plus tard à Angoulême. Nous avons travaillé tous les trois dans le dessin animé, avec comme idée derrière la tête d’être un jour auteur de Bande dessinée. Nadine a été la première de nous trois à franchir le cap en signant en tant que coloriste le tome 2 de « Cryozone » chez Delcourt avec Bajram au dessin et Cailleteau au scénario. Quand à Thibaud et moi, il nous a fallu quelques projets refusés chacun de notre coté pour se décider, entre deux parties de jeu de rôle (Thibaud imite d’ailleurs très bien le corbeau qui parle) à monter un projet ensemble : Bluehope.
SCENEARIO.COM: Pour tous les trois c’est un premier album. Comment ça se passe… On reçoit des conseils de partout, on se lance et on verra bien…?
C’est à peu prés ça ! On essaie de se faire plaisir (tant qu’à faire), on se concentre sur son travail (il ne faut pas trop se faire plaisir non plus), on prend en compte les critiques extérieures au projet sans perdre de vue l’intention de départ, et on se lance !
SCENEARIO.COM: Vous êtes passionné de grands bateaux pour vous lancer dans cette histoire?
Plutôt par tout ce qui à trait à l’océan. Les Bateaux, c’est la grande passion de Thibaud. Moi, ce qui me plait dans Bluehope, c’est le goût du feuilleton, l’ambiance victorienne, les délires technologiques, les sombres complots, les méchants mystérieux, les héroïnes intrépides et le petit quelque chose de « Porcorosso » évoqué par la Régate.
SCENEARIO.COM: Combien de tomes sont prévus pour cette histoire?
Bluehope est prévu en quatre tomes. A l’origine, il n’y en avait que trois, mais en cours de premier album, on s’est vite rendu compte qu’on aurait jamais assez de place ! Le Tome 2 sort en juin, le Tome 3 est en cours de découpage, j’en suis à la moitié. Il n’est pas impossible que le tome 4 soit un peu plus épais que les trois premiers : on veut une Régate spectaculaire !
SCENEARIO.COM: Quels sont vos projets?
J’en ai quelques uns dans ma besace, mais deux d’entre eux sont déjà bien avancés.
Le premier est un projet de science-fantasy avec Shong au dessin qui s’appelle « No Way Back ». C’est l’histoire d’un groupe de jeunes scientifiques Européens qui se retrouvent projetés dans un lointain passé, sur une planète en passe de percuter la Terre. Il va leur falloir trouver un moyen de rentrer chez eux avant que la catastrophe ne se produise. Dans la pratique, ils vont passer beaucoup de temps à s’acclimater à ce monde bizarre peuplé de créatures dignes du « muppet show », mais version sales et méchantes. Shong vient lui aussi du jeu vidéo, il publie cette année un album aux éditions Soleil dans la collection « végetal manga ».
Le second est un projet jeunesse avec Nicole de Rueda au dessin qui vient de l’illustration. C’est l’histoire de « Pénélope », une jeune fille ordinaire un peu solitaire qui reçoit en héritage une tête réduite (oui oui, les horribles trucs amazoniens) dont les pouvoirs magiques vont totalement bouleverser son existence.
SCENEARIO.COM: Vous ne travaillez que sur cette BD?
Non, je suis un horrible scénariste prêt à fondre sur tout dessinateur de bonne volonté ! Plus sérieusement, j’ai une autre série en cours aux Editions Glénat, collection Grafica (la même que pour « Bluehope ») qui s’appelle « MIKI », avec Anton au dessin et Nadine Thomas (et oui) à la couleur, en cinq tomes. Anton vient également du jeu video, mais il a déjà publié « Eclipse » aux éditions Egone. C’est l’histoire d’une jeune femme de vingt ans qui découvre qu’elle a le pouvoir de donner corps et vie à tout ce qui lui passe par la tête, en particulier à ce qu’elle préfèrerait garder pour elle, le tome 1 est prévu pour fin 2003.
SCENEARIO.COM: Peux tu donner une qualité et un défaut de tes deux collègues?
Pour Thibaud, je dirais que nos qualités et défauts respectifs (même si c’est lui qui a le plus de défauts, évidemment) se complètent très bien. Quand à Nadine, elle nous supporte, ce qui est déjà pas mal !
SCENEARIO.COM: Quels sont les ouvrages que tu as particulièrement apprécié dernièrement?
« Maybe the moon » d’Amistead Maupin, « Pussey ! » de Daniel Clowes, « Frankie Blue » de Tim Lott, Promethea d’ Alan Moore and JH Williams III, « à la croisée des mondes » de Philip Pullman (jeunesse).
SCENEARIO.COM: Connaissez vous sceneario.com?
Oui, le mot « sceneario » ayant tout de suite éveillé mon intérêt !
Questions pour Thibaud de Rochebrune (Dessinateur)
SCENEARIO.COM: Thibaud, peux tu te présenter en quelques mots?
Je suis un auteur de bande dessinée débutant, ancien étudiant de l’atelier bande dessinée d’Angoulême, et ancien intermittent du dessin animé. J’ai commencer par travailler sur un comics de 24 pages chez le cycliste avant de m’attaquer à Bluehope. Je suis encore tout neuf!
SCENEARIO.COM: Vous avez travaillé dans un atelier?
Hum, oui, mais assez peu de temps, et dans un atelier éphémère. Mais le travail en atelier est assez dangereux pour moi. Je suis trop tenter d’aller prendre des cafés et discuter. Il vaut mieux que je travaille chez moi si je veux que les pages avancent 🙂
SCENEARIO.COM: Vous êtes d’une famille de marin, ou vous avez des tonnes de documentations sur les bateaux?
Non, je ne suis pas d’une famille de marin. J’aurais bien aimé, ça m’aurais sans doute simplifié pas mal de chose quand à la compréhension du fonctionnement des voiliers anciens!
Malheureusement, je n’y connais pas grand chose. Ce n’est pas en quelques mois de dériveurs et 2 ballades de plaisancier que j’aurai pu acquérir les connaissances nécessaire à réaliser une bande dessinée dans cet univers. En fait, j’ai simplement une fascination pour les grands voiliers, et plus précisément les derniers grand voiliers, ceux de la fin du 19eme, et du début du 20eme siècle. une fascination de bon terrien, qui n’a même pas navigué assez pour avoir un jour le mal de mer. Et, malgré une bibliothèque pleine de bouquin, je crois qu’il me faudrait un stage sur le Belem pour tirer vraiment les choses au clair! …Il faudrait peut être que je lance une souscription sur le site de Bluehope pour me le faire offrir tiens…En attendant, je fais du mieux que je peux avec mes livres, internet, et parfois quelques remarques de lecteurs, et je tache de comprendre ce qui me parait encore obscure en prévisions des scènes à venir.
SCENEARIO.COM: Pourrais-tu définir tes 2 collègues en quelques lignes?
Des collègues exemplaires, travailleurs, inspirés et tellement…bon, ok, Nadine et Serge sont d’abord des amis, avec qui on a eu envie de travailler, avant d’être une coloriste et un scénariste. Enfin, pour Serge, ça depend de ce qu’il répondra à la question de la qualité et du defaut hein! En tout cas, l’amitié, ça se défini pas, ça s’aprécies! (whao, comment je m’en sors!)
SCENEARIO.COM: Es tu inspiré par un style de dessin ou un dessinateur?
Houlà, vaste question. Je suis inspiré par plein de style de dessin, et plein de dessinateurs.du manga, du comics, et de l’européen, des artistes du 19eme et du 20eme siècles…pour n’en citer qu’un par « genre », je dirai Otomo, Adam Hughes, Michetz (là, c’est vraiment très dur de n’en citer qu’un!), Mucha, Waterhouse…bref, vraiment rien d’original! C’est même d’un banal affligeant! 🙂
SCENEARIO.COM: Quelle est ta BD a amener sur une îles deserte?
Voyons voyons…une bande desinée qui pourrai mettre un peu de poésie dans l’oisiveté crasse, ou le desespoir le plus sombre (bé oui, je sais pas comment j’y arrive moi, sur cet ile!), une bande desinée qui apprend à trouver quelque chose de beau dans toute les circonstances: « L’homme qui marche », de Taniguchi. Bon, désolé, j’ai du retard, j’ai pas encore lu « quartier lointain »
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SCENEARIO.COM: Quels sont les BD que tu as particulièrement aimé dernièrement?
Vincent et VanGogh, merveilleusement déjanté, et incroyablement beau et référencé. un travail de fou… Quel bonheur!
J’aime aussi beaucoup Les olives noires, un dessin magnifique, au service d’un scénario intelligent, c’est imparable.
SCENEARIO.COM: Connaissez vous sceneario.com?
Oui, depuis un petit moment dejà. Je l’ai trouvé sur ma route alors que, plein de desoeuvrement et de stress suite à la sortie du tome 1, je parcourais le web pour penser à autre chose. Comme je vous l’ai dit pas mail précedemment, J’ai beaucoup aprécié votre volonté affichée de vous concentrer sur les scénarii. On ne perd jamais à aller au delà des apparences, et donc du simple graphisme. Bon courage, les albums sortent par milliers, la tache est immense!!!
SCENEARIO.COM:Merci à tous les trois et à bientôt ! |