Bookhunter

 
Les lecteurs de bandes dessinées aiment généralement les livres. Parfois même au point de leur vouer une certaine admiration, parce que ces bandes dessinées peuvent être des raretés qu’ils ont mis longtemps à trouver, parfois parce que les collectionneurs leur attribuent une certaine cote, ou tout simplement parce qu’ils aiment les objets-livres et que pour rien au monde ils ne souhaiteraient les voir abîmés ou, pire, perdus ou volés…

Un auteur est forcément quelqu’un qui aime les livres, aussi. Alors quand l’un d’entre eux fait du livre son héros ou tout au moins le cœur de l’intrigue de l’une de ses histoires, on peut considérer là aussi que c’est un grand hommage qu’il rend au Livre avec un grand L !

Dans Bookhunter, l’Américain d’origine japonaise Jason Shiga est dans ce cas : il a imaginé un monde où le livre serait comme un bijou, au point qu’une police spéciale ait été créée pour tirer au clair toute affaire concernant l’un d’eux !

Sur cette idée de départ originale, l’auteur a réalisé un vrai polar, avec fait répréhensible suivi d’une enquête minutieuse. Et comme pour appuyer encore plus sur cette notion de l’importance donnée au livre, Jason Shiga a fait se dérouler l’action de son récit dans les bâtiments de la bibliothèque publique de Oakland… où il a lui-même travaillé, et donc qu’il connaît par cœur et au centre de laquelle il peut aisément nous faire circuler.

Car l’enquête de l’agent Bay est véritablement doublée d’une visite, jusque dans ses moindres recoins, de cette fameuse OPL (Oakland Public Library) ! Et triplée, dirais-je, d’un véritable documentaire sur le fonctionnement de ses différents services et sur les livres eux-mêmes, leur impression, leur typographie, leur protection contre le vol, etc, etc…

Bookhunter s’impose donc comme un véritable must pour tous les amoureux du livre ! Comme serait un livre encyclopédique sur le Penny Black pour les plus chevronnés des philatélistes !

Jason serait-il un prénom à surveiller, lorsqu’il s’agit d’auteurs de BD ?!? (Là, je fais naturellement référence au norvégien Jason, auteur, entre autres, de Hemingway aux éditions Carabas) En tout cas, ce Jason-là – Shiga – a aussi un coup de crayon d’une simplicité étonnante mais qui sert avec talent un scénario millimétré. Et aussi simple qu’il soit, son trait est néanmoins d’une terrible efficacité, faisant vivre des personnages tout en rondeurs dans des décors eux "tout carrés" de par ces représentations d’étagères, de livres, d’architecture intérieure…

Car comme moi, vous adorerez cette utilisation qui est faite de ces décors : la course-poursuite au milieu des rayonnages, avec ces tiroirs qui sont utilisés comme des marches d’escaliers… C’est génial ! La bibliothèque d’Oakland transformée sous vos yeux en un labyrinthe changeant !

Vous aimerez aussi l’humour distillé savamment, comme dans ces inimaginables interventions de la police des bibliothèques chez les gens, ou comme cette scène où Bay rattrapant un livre (alors qu’il est dans la position d’un Tarzan au bout de sa liane !) ne se souciera pas de celui qu’il poursuivait qui va sous nos yeux chuter pour aller (on le comprend) s’écraser plusieurs étages plus bas !!!

Bookhunter est d’une originalité qui ne peut pas laisser indifférent. C’est un titre qui mérite toute votre attention, un titre à découvrir aux éditions Cambourakis.
 

Par Sylvestre, le 13 avril 2008