famille en guerre (Une)
Jeunes pousses

Dans ce deuxième tome d’Une famille en guerre, nous retrouvons les Engel, famille de vignerons alsaciens déchirée par la 2^ème guerre mondiale. Alors que leur père a été arrêté par les Allemands, Antoine est de plus en plus impliqué dans la gestion du domaine, pendant que Fina met temporairement de côté ses activités dans la Résistance, aidant ce dernier dans les activités viticoles. Quant au jeune François, il poursuit son ascension dans les Jeunesses Hitlériennes, fasciné par la violence et l’idéologie nazie.

Alors que la guerre se poursuit, et que les forces de l’Axe connaissent de plus en plus de déconvenues, nous retrouvons avec plaisir ces trajectoires familiales s’inscrivant dans une région déchirée par la guerre, et intégrée au Troisième Reich. Au fil des planches, nous suivons en parallèle à l’évolution des personnages la « défrancisation » subie par les habitants, ceci allant jusqu’à la germanisation des noms et l’épuration des bibliothèques, l’embrigadement nazi de plus en plus oppressant, à travers les Jeunesses Hitlériennes, mais aussi le contrôle de l’enseignement (le lycée Bartholdi voit François étendre son emprise sur ses camarades), la répression avec l’évocation du Camp de sûreté de Vorbruck-Schirmeck, un camp de redressement nazi où est enfermé le paternel, ou bien encore l’évocation du destin tragique des Malgré-nous qui tentent d’échapper à leur incorporation forcée…

Saga familiale sur fond d’exploitation vinicole et histoire régionale s’imbriquent habilement grâce au scénario de Stéphane Piatzszek. Évitant de basculer dans la « leçon d’histoire », la série intègre justement le parcours d’une fratrie qui incarne les déchirures que va vivre toute une population. Le trait d’Espé, rompu aux épopées alcoolisées (Châteaux Bordeaux), est toujours appréciable, surtout sur ce type de fresque se voulant au maximum réaliste.

N’hésitez donc pas à rejoindre en cours de route Une famille en guerre. Le contexte alsacien de la 2^nde Guerre mondiale parvient à ne pas en faire un énième Maîtres de l’orge revisité, et lui insuffle une dramaturgie bien particulière.

Par V. DEGACHE, le 28 juillet 2023