HERR DOKTOR
La peste et le choléra

En 1940, le docteur Martin Wisenfall doit pour protéger sa famille s’engager comme médecin dans les SS, et partir sur le front, à l’Est. Sa femme, de confession juive, ainsi que sa fille, réfugiées à Paris, se retrouvent sous la menace des lois antisémites de Vichy.

Par v-degache, le 25 mars 2021

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Notre avis sur HERR DOKTOR #1 – La peste et le choléra

Herr Doktor commence en 1942 dans les plaines d’Ukraine, ces territoires appelés « Terres de sang » par l’historien étatsunien Timothy Snyder, car victimes successivement des exactions et massacres soviétiques puis nazis, des années 1920 à la fin de la 2ème guerre mondiale, devenant un enjeu par leur fertilité et leur fort potentiel nourricier.
Le Docteur strasbourgeois Martin Wisenfall, revêtu de l’uniforme SS, se confie alors à la babouchka dont il a réquisitionné la maison, lui racontant son histoire.

Jean-François Vivier au scénario, et Régis Parenteau-Denoël aux dessins nous emmènent alors dans un récit haletant commençant à Strasbourg en juillet 1940, aux lendemains de la Débâcle et de la signature de l’armistice. A travers le destin de ce personnage fictionnel, le Docteur Wisenfall, nous nous retrouvons plongés dans ces années de guerre.
L’atmosphère de ce tome 1 est pesante. La France est maréchaliste, beaucoup de nos compatriotes sont convaincus de la sincérité de Pétain et du « don de sa personne » pour atténuer les malheurs du pays, et l’impact négatif sur l’opinion publique française que causèrent les victimes de Mers el-Kébir sous les tirs anglais est également rappelé.

Le trait de R. Parenteau-Denoël est grave, les visages semblant comme déjà marqués par les privations et les dures épreuves qui les attendent. Ce contexte des premiers mois d’occupation est habilement restitué par quelques personnages croisés par le Docteur, quelques lignes de dialogues, sans toutefois desservir le rythme de l’intrigue, ni paraître trop didactique.
La famille Wisenfall incarne l’inquiétude de ces Alsaciens une nouvelle fois soumis au bon vouloir des autorités allemandes en ce qui concerne leur avenir. La femme de Martin est juive et les premières lois antisémites de Vichy l’amène, ainsi que sa fille, à se « mettre à l’abri » à Paris, obligeant son mari à de réguliers allers-retours.
Afin de les sauver d’une possible arrestation, Martin se voit, sous la menace, sans autre choix que de devenir un Malgré-nous, et de rejoindre le Reich en tant que médecin.

Les enjeux narratifs sont désormais posés, la tragédie familiale va pouvoir se dérouler sous nos yeux, dans une Europe passée sous le joug allemand. Ce premier tome de Herr Doktor – La peste et le choléra, réussit à proposer un scénario passionnant avec cette tragédie familiale, tout en l’insérant dans un cadre historique rigoureux, mêlant ainsi avec habileté Histoire et fiction.
Le dessin classique de R. Parenteau-Denoël restitue avec succès et énergie aussi bien les scènes de la vie quotidienne que les séquences marquées par l’action et les combats.

Le lecteur ne peut que regretter de laisser en fin d’ouvrage ces personnages attachants, sans jamais être caricaturaux dans leurs choix ou leur psychologie, et attendre le tome 2 avec une grande impatience pour en connaitre le dénouement !

Par V. DEGACHE, le 25 mars 2021

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