PROVIDENCE
La peur qui rôde

(Providence 1 à 4)
En 1919, le journaliste Robert Black, qui travaille à la rédaction du New York Herald, propose un article sur le livre « Sous le monde » qui aurait provoqué des suicides parmi ses lecteurs… Il commence donc par contacter le Docteur Alvarez qui a jadis écrit un papier sur le livre… C’est le début d’une longue enquête qui va entraîner Robert à travers le pays, à la rencontre de ceux qui auraient eu en main le fameux livre…

Par fredgri, le 6 février 2016

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Notre avis sur PROVIDENCE #1 – La peur qui rôde

Il y a quelques temps Alan Moore (que l’on connait grace à Watchmen, V pour Vendetta, Miracleman, La Ligue des Gentlemen extraordinaires, From Hell etc.) a annoncé que dorénavant il ne travaillerait que sur des projets personnels, ou en tout cas loin des grosses boites d’édition. Ainsi, tandis qu’il met actuellement la dernière touche à son monumental roman "Jérusalem" qui devrait sortir en fin d’année, le scénariste anglais se lance sur cette maxi série, pour Avatar, éditeur pour qui il a récemment signé les 6 premiers numéros de "Crossed + 100", ou Necronomicon (qui revenait déjà sur les univers lovecraftiens) !
C’est l’occasion pour lui de revisiter avec brio l’univers de Lovecraft et de nous offrir une nouvelle pépite, comme il en a encore le secret ! Car il faut encore et toujours compter avec Moore !

Alan Moore rend donc un hommage à l’écrivain américain H.P. Lovecraft. Un hommage extrêmement respectueux et très référencé.
Avec Providence, il opte pour une enquête littéraire où un jeune journaliste nommé Robert Black part sur les traces d’un ouvrage qui posséderait certaines capacités surnaturelles. Ses recherches l’amènent à croiser le chemin de personnages étranges et dérangeant qui semblent tous avoir des secrets inquiétants.
Robert Black a lui même un certain nombre de secrets qui le hantent, son homosexualité qu’il tente vaguement de refouler, ce refus de l’assumer qui a poussé son amant à se suicider, son identité de juif et ses penchants mystiques qui l’entraînent vers cette histoire alambiquée.
Dès le début on est plongé dans l’univers lovecraftien revisité par Moore, qui nourrit son récit d’une multitude de références, qu’il s’agisse du personnage principal, des noms, des clins d’œil aux livres originaux ici et là.
On est très vite fasciné par l’audace de l’ensemble et par la rigueur de ce scénario. C’est intelligent, Moore ne sacrifie jamais son écriture aux effets tape-à-l’œil, il ne propose pas non plus une parodie grotesque qui pourrait se moquer du romancier pour qui il porte un culte évident. Il faut dire qu’il rajoute des textes à la fin de chaque épisode (rappelant ainsi le procédé de Watchmen). Ces textes sont la plupart du temps extraits des carnets intimes de Robert qui nous dévoile le cours de ses pensées, ses inquiétudes, son interprétation des évènements lus dans le chapitre, voir même ses réflexions sur le livre qu’il écrit en parallèle, son processus créatif… On est ainsi au cœur du ressenti du héros, on sent la tension qui augmente, on est les premiers témoin de ses découvertes.

Ainsi, l’ambiance devient de plus en plus oppressante, on voit de dévoiler devant nous une réalité mystérieuse, nourrie de secrets inavouables, tandis que se dessine un ensemble encore plus inquiétant ! Toutefois, on garde aussi le sentiment que chaque chapitre se détache des autres et pourrait presque se lire séparément. On rencontre ainsi des protagonistes qui disparaissent à chaque fois pour passer complètement à autre chose…

Aux dessins, Jacen Burrows propose une prestation époustouflante. Un réalisme froid, très propre et fin ou se glisse une subtilité renversante ! Certainement sa meilleure prestation à ce jour !

Cependant, je ne vous cacherait pas que la lecture peut aussi être quelque peu déstabilisante, car il faut s’accrocher. Les textes notamment peuvent paraître au premier abord inutiles, mais détrompez vous, ils gagnent à être lus, ne serait-ce que pour ce qu’ils apportent en matières supplémentaires, entre les cases. Ils permettent surtout à Moore d’approfondir les idées qu’il amène dans les planches !
Alors, non, il n’est pas nécessaire d’avoir lu tout Lovecraft, même si je reconnais que certaines références gagnent en pertinence en connaissant les parallèles. Car Providence est réellement une œuvre fascinante qui marque le grand retour de Moore… Vous serez prévenu !

Très recommandé !

Par FredGri, le 6 février 2016

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