Rain

Voilà, Honeysuckle va enfin s’installer avec Yolanda, elle la regarde décharger la voiture de sa mère, le sourire aux lèvres, elles sont heureuses. Quand soudain, une étrange pluie vient éclater, projetant des pics de cristal sur tous ceux qui se tiennent à l’extérieur… En quelques minutes, des milliers de morts sont annoncés sur le territoire américain, mais Honesuckle n’a d’yeux que pour le corps inerte de celle qu’elle aime, de sa mère, quelques mètres derrière… Hantée par cette vision, elle décide de se rendre à Denver pour retrouver le père de Yolanda… Mais la route va être longue…

Par fredgri, le 4 février 2024

Notre avis sur Rain

Zoe Thorogood est ce que l’on pourrait appeler une étoile qui monte, de celles qui surgissent soudainement, mais qui dès leurs premières œuvres sont remarquées et célébrées. Avec « Dans les Yeux de Billie Scott », sorti en 2022, on le répétait sans discontinuer « surveiller cette jeune artiste, elle n’a pas fini de faire parler d’elle »… Et ça se confirme avec cet excellent album scénarisé par un autre nouveau venu, David M. Booher qui adapte ni plus ni moins un texte de Joe Hill… Excusez du peu…

Avec Rain, il est donc question d’un monde plongé brutalement dans une mystérieuse catastrophe que l’on pense en premier lieu « climatique ». Une pluie de pics de cristal vient pourfendre le paysage, transperçant tous ceux qui sont dehors, à prendre l’air, inconscients de ce qui se trame au-dessus d’eux. L’héroïne, Honeysuckle, une jeune femme qui réalise l’un de ses rêves, s’installer avec sa petite amie Yolanda dans un environnement bienveillant, prête à construire une existence à deux qu’elle espère épanouissante. Quand éclate l’étrange pluie, celle qu’elle aime est dehors, elle n’a pas le temps de se réfugier à l’intérieur et subit de plein fouet ce rideau meurtrier devant les yeux médusés de Honeysuckle. Tout s’effondre pour elle, l’avenir qu’elle imaginait, ce quotidien tranquille, l’ambiance paisible de la ville, son voisinage, d’un coup, tout est balayé…
Mais plutôt que s’appesantir sur la douleur, sur l’aspect purement psychologique de la situation, le scénariste s’attache à développer les réactions de la jeune femme qui refuse de se laisser aller, qui prend les devants en partant retrouver le père de Yolanda, accompagnée par un inconnu rencontré sur la route, Marc, et son jeune voisin, Tempelton. Ils sont alors confrontés à la dure réalité d’une sorte de fin du monde impitoyable qui n’a laissé derrière elle que paysages foudroyés et un amoncellement de corps piqués de tous les côtés. Mais la catastrophe a aussi impacté le comportement des uns et des autres, éveillant une violence implicite qui se révèle peut-être plus dangereuse que la pluie elle-même.
Toutefois, tout est vu de l’intérieur, au travers des pensées de Honeysuckle, sa perception marquée par sa douleur, par la nécessité de survivre, d’avancer aussi. L’écriture est subtile et très juste, les dessins de Zoé Thorogood sont un vrai bonheur des yeux.
Tout est réussite dans ce très beau volume très touchant et profond.

Alors oui, le talent de la jeune dessinatrice se révèle progressivement plein de promesse (et je vous conseille de lire son excellent It’s lonely at the centre of the earth, qui vient de sortir, toujours chez HiComics), mais n’oublions pas de surveiller également David M. Booher !

Une lecture indispensable.

Par FredGri, le 4 février 2024

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