EVOL
Volume 5

Si, au premier abord, Evol peut apparaître comme une série qui se concentre sur les super-vilains, plutôt que sur les héros, il faut néanmoins un peu plus recadrer le propos.
Ces « vilains », qui se comportent tel quel, sont malgré tout la revanche sur cette société « méritocrate » qui rejettent initialement les marginaux, en portant au pinacle les privilégiés, ceux qui légitimement ont le droit d’être au-dessus des autres, qu’ils soient héros, hommes politiques, sportifs ou riches citoyens, qu’importe… Et ce nouveau volume entérine encore plus ce constat, avec l’arrivée de nombreux autres jeunes ados qui se retrouvent aussi avec des pouvoirs qui leur permettent de se débarrasser de ceux qui abusent d’eux, qui les agressent, qui leur imposent des conditions de vie liberticides etc.
Progressivement, à travers Evol, Kaneko brosse le portrait d’un monde qui voit enfin ses victimes se dresser contre leurs tortionnaires, en inversant la donne. Les héros représentant alors une force au service des puissants qu’il faut abattre pour redistribuer équitablement les cartes.

Sans entrer davantage dans le débat sur la légitimité et les travers du chaos anarchique, on se rend néanmoins compte que sous ses dehors de juste vengeance, les membres d’Evol perdent assez vite le contrôle de la situation, dessinant le portrait d’un monde sans repère qui plonge dans la violence. Néanmoins, Kaneko met assez habilement en opposition la réalité qui entoure le trio, ses actions et ses affrontements avec les héros et les gens ordinaires qui regardent ça de loin, troublés par la violence de cette histoire, le combat des uns et des autres qu’ils ne voient que de loin, au travers les réseaux sociaux, les nouvelles à la télé… Une vision déformée qui réinterprète les faits à la va vite, transformant les uns en héros, les autres en terroristes, sans même chercher à creuser davantage la situation. Cela renvoie bien évidemment à ce que nous avalons nous même au quotidien, au fil des flux d’information qui nous habituent à ne plus prendre le moindre recul sur ce qui nous entoure. De ce point de vue, Evol apparait comme une intéressante métaphore sur ces nouvelles sociétés qui pointent du doigts les effets plutôt que les causes.

Bien plus qu’une simple série qui met en scène des super-héros et des super-vilains, Evol présente une version décalée extrêmement pertinente du genre, avec un vrai regard punk qui bouscule les codes, sans singer bêtement les tics américains.
Une très intéressante série, à lire absolument.

Par FredGri, le 22 avril 2024