VISAGES - CEUX QUE NOUS SOMMES
Derrière les signes ennemis

En 1927, le jeune Georg Knielinger se trouve dans une institution catholique pour orphelins au sud de l’Allemagne. Vivant en marge de ses camarades, il se plaint à une religieuse que personne ne communique avec lui. Il reçoit en retour une gifle et se voit traité de bâtard. Georg décide alors de fouiller secrètement dans les dossiers de l’institut et finit par découvrir son identité et celle de ses parents. Sans attendre que ces derniers viennent, un jour, le chercher, le garçon prend le parti d’aller les retrouver avec un objectif bien précis. 13 ans plus tard, alors qu’il a été enrôlé dans l’unité de la Wehrmacht, il abat dans les Ardennes un tireur adverse et découvre que ce n’est pas l’homme qu’il recherche. Qui sont donc ses parents qui l’ont « batardisé » ? Quelle est donc leur histoire et comment sont-ils parvenus, eu égard à leur appartenance à deux nations différentes belligérantes, à le concevoir honteusement ?

Par phibes, le 22 janvier 2023

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Notre avis sur VISAGES – CEUX QUE NOUS SOMMES #1/4 – Derrière les signes ennemis

Après avoir travaillé ensemble sur un projet vidéo intitulé Héros de lumière, Nathalie Ponsard-Gutknecht et Miceal Beausang-O’Griafa se retrouvent pour cette fois-ci se lancer dans une équipée romanesque illustrée sous le couvert de la Maison Glénat. Ayant fait appel au dessinateur averti Aurélien Morinière, les coscénaristes nous plongent dans une histoire à visage humain, une histoire somme toute dramatique qui devrait s’étaler dans la période 1900 à 1954 et qui met en exergue la destinée de plusieurs personnages qui sont appelés à se croiser.

Ce premier volet a la particularité de faire la ventilation de trois protagonistes clés, on ne peut plus captivants par leur différence, leur incroyable sort, leurs caractères spécifiques, que sont Georg, Lieselotte et Louis. Pour cela, les auteurs n’hésitent pas à jouer subtilement sur les époques, éludant toute linéarité pour permettre au lecteur de constituer un puzzle familial et d’instiller une intrigue saisissante qui va prendre racine des deux côtés d’une limite frontalière grevé par la guerre.

Entre vengeance et histoire d’amour tourmentée, cet opus se balance au rythme de séquences qui ont le privilège de bénéficier d’un fond authentique remarquablement mis en place. De la première guerre mondiale, on passe à la seconde, avec au beau milieu, l’histoire atypique de l’Alsace et de son peuple pris entre deux feux. L’on concèdera que cette première partie a tout ce qu’il faut pour mettre l’eau à la bouche, de poser également des questions de fond et ce n’est pas son final très incertain qui spécifiera le contraire.

De son côté, Aurélien Morinière fait de l’excellent travail. Son dessin reste humainement réaliste et témoigne de toute évidence d’une belle recherche documentaire pour camper les ambiances guerrières. Le choix des personnages est également adroit, Louis et Lieselotte étant ici particulièrement convaincants dans leur relationnel délicat voire dangereux, et Georg ô combien inquiétant dans son entêtement et sa quête vengeresse.

Une première partie d’une saga envoûtante sur une quête identitaire qui semble brasser espoir et désillusion. On attend avec impatience la suite qui devrait paraître très prochainement en avril.

Par Phibes, le 22 janvier 2023

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